Territoires de l’innovation et communication urbaine

Mythes et réalité de politiques d’aménagement du territoire stratégiques

Innovation Territories and Urban Communication: Myths and Reality of Strategic Land Use Policies

DOI : 10.52497/kairos.417

Résumés

Résumé : Les territoires de l’innovation sont aujourd’hui des acteurs importants de la mondialisation qui sont en perpétuelle concurrence et cherchent à faire valoir leur compétitivité et leur attractivité à travers la mise en place de plans de communication urbaine. Cet article a pour but d’interroger les pratiques de communications de ces territoires, notamment à la lumière du modèle de la Silicon Valley auxquels ils se réfèrent tous. À travers les exemples de Bangalore, Sophia-Antipolis et du Silicon Sentier, nous verrons ainsi comment la communication urbaine impacte les projets de territoires de l’innovation en tentant de les rendre toujours plus attractifs, quitte à occulter un certain nombre de problèmes et de difficultés que ces territoires peuvent rencontrer, et comment la communication urbaine devient constitutive de l’opération d’aménagement productrice d’une image et d’un discours qui vont la valoriser tout autant que dessiner des objectifs à atteindre.

Abstract: The territories of innovation are today important players in globalization that are in constant competition and seek to promote their competitiveness and attractiveness through the implementation of urban communication plans. This article aims to question the communication practices of these territories, especially in the light of the model of Silicon Valley they all refer to. Through the examples of Bangalore, Sophia-Antipolis and the Silicon Sentier, we will see how urban communication impacts innovation projects by trying to make them more attractive, even if it means ignoring a certain number of problems and difficulties that these territories may encounter, and how urban communication becomes constitutive of the development operation as a producer of an image and a speech that will enhance it as well as draw goals to achieve.

Index

Mots-clés

territoires de l’innovation, Silicon Valley, Bangalore, Silicon Sentier, Sophia-Antipolis, communication urbaine

Keywords

territories of innovation, Silicon Valley, Bangalore, Silicon Sentier, Sophia-Antipolis, urban communication

Plan

Texte

Introduction

L’innovation est un concept central de nos sociétés. Les différentes étapes de la mondialisation de l’économie (Carroué, 2002 ; Grataloup, 2007), le passage d’une économie fordiste à une économie post-fordiste, en particulier dans les pays occidentaux, la nouvelle division internationale du travail, ont renforcé les logiques concurrentielles entre les territoires et les logiques de différentiation où les politiques publiques liées à l’innovation apparaissent comme fondamentales.

Il n’est pas d’échelon territorial qui n’inscrive l’économie de la connaissance et ses avatars (créativité, culture…) comme ressorts incontournables de son positionnement local, régional, national ou international. De la stratégie de Lisbonne aux politiques des pôles de compétitivité, en passant par la labellisation des technopôles, des SPL, des villes créatives ou des capitales européennes de la culture, les stratégies d’attractivité et de compétitivité territoriales portées par les territoires de l’innovation apparaissent comme des enjeux majeurs de développement pour les gouvernements nationaux, régionaux et métropolitains. Dans cet article, nous entendons les territoires de l’innovation comme des espaces appropriés (quartiers, parcs d’activités, villes…) par une communauté ou une collectivité dans le but de favoriser la production d’innovations techniques ou technologiques, qui sont envisagées elles-mêmes comme des moteurs de développement du territoire.

Bangalore s’est ainsi imposée comme une des Innovation Cities à l’échelle mondiale dans les années 2000, Sophia-Antipolis est le premier technopôle d’Europe depuis 1969 et le Silicon Sentier a été labellisé SPL dans les nouvelles technologies de l’information et des communications (NTIC) et adoubé par la DATAR en 2002. Territoires de progrès technologiques et sociaux, générant réussites et success stories, peuplés de cadres dynamiques, inventifs et créatifs travaillant de consorts pour concevoir, découvrir, inventer, les territoires de l’innovation sont promus grâce à un champ lexical positif, progressiste et des références qui les rattachent la plupart du temps à une filiation avec la Silicon Valley (SV) et sa formidable capacité à favoriser la création de start-ups et d’innovations (Saxenian, 1994).

Bangalore a ainsi vanté sa réussite technopolitaine dans les salons immobiliers du monde entier avec le slogan « When Silicon Valley meets Silicon Valley » (Grondeau, 2010). Sophia-Antipolis, auto-proclamée premier technopôle d’Europe, est régulièrement présentée comme la Silicon Valley française (Grondeau, 2017). Le Silicon Sentier, au même titre que des milliers de territoires dans le monde, fait régulièrement de même dès qu’il s’agit d’inscrire sa compétitivité et son attractivité dans la mondialisation, tant la référence à la SV fait l’unanimité. Dans chacun de ces exemples pourtant, les différences avec la zone technopolitaine de Palo Alto sont extrêmement importantes, tant en termes de circulation de l’information, que de coopétition, de dépôt de brevets ou de créations d’emplois innovants. C’est la principale limite des stratégies de communication urbaine : elles peuvent vendre des attributs et des qualités sans qu’ils existent réellement ou à un niveau ou un standing qui n’est pas le leur (les entrepreneurs, les créatifs, les investisseurs attirés se rendant vite compte de la réalité biaisée…) tout comme s’avérer de profonds vecteurs de prophéties auto-réalisatrices (Staszak, 2000).

Dans cet article, nous envisagerons la communication urbaine comme un outil et une pratique de l’aménagement des territoires de l’innovation à visées communicationnelle et promotionnelle, qui a précédé la mise en place de véritables stratégies de marketing territorial reposant sur une démarche organisationnelle balisée (Houiller-Guibert, 2012). Ce parti pris s’explique par le fait que c’est bien la communication urbaine qui a été mobilisée lors de la création et de l’aménagement des territoires de l’innovation à partir des années 1960, et qui y est la plupart du temps encore pratiquée. Elle a ainsi permis aux territoires de l’innovation de valoriser leurs potentiels, d’acquérir une nouvelle visibilité nationale ou internationale et d’affirmer leurs capacités innovantes (souvent synonyme de modernité) afin d’attirer des entreprises, des cadres qualifiés ou des investisseurs.

Après avoir présenté dans un premier temps, les caractéristiques référentielles de la Silicon Valley, nous nous intéresserons aux exemples de Sophia-Antipolis, du Silicon Sentier et de Bangalore à travers leurs pratiques classiques de communication urbaine (Kotler, 1971, 1972). Nous verrons, pour chacun de ces cas emblématiques, comment la communication urbaine impacte les projets de territoires (Rosemberg, 2000) en tentant de les rendre attrayants et attractifs (Devisme, Dumont, 2006). Nous chercherons à montrer comment l’ambition du projet de territoire de l’innovation est constitutive de l’opération d’aménagement tout autant que celle-ci est productrice d’une image et de discours qui vont la valoriser. Elle peut d’ailleurs, dans certains cas, être accompagnée par une politique de labélisation territoriale, c’est-à-dire par l’acquisition d’un nouveau signe distinctif, d’une marque possédant son propre logo et/ou slogan, pour un territoire donné (Filloz, Colomb, 2011) avec comme objectif la promotion des territoires en général, et celle des villes en particulier (Rosemberg-Lasorne, 1997).

Nous souhaitons ainsi montrer comment les caractéristiques territoriales et organisationnelles de la zone technopolitaine emblématique de Palo Alto, ont d’abord été, pour les responsables politiques, une source d’inspiration, puis un vecteur d’affirmation de leur réussite locale à visée internationale. Nous mettrons en perspective ces derniers en identifiant la manière dont les médias ont pu relayer ce type de discours promotionnel et nous verrons si les résultats territoriaux socio-économiques effectifs sont à la hauteur des annonces et des discours produits par les acteurs politiques et médiatiques. Pour ce faire nous nous baserons sur un important travail théorique, initié en 2002 et poursuivi depuis lors, rapportant l’innovation aux politiques d’aménagement du territoire. Nous illustrerons nos propos à travers les terrains analysés et les exemples de la Silicon Valley, de Bangalore, de Sophia-Antipolis et du Silicon Sentier. Pour chacun de ces terrains, l’approche méthodologique sera précisée en début de partie.

Territoires de l’innovation : la création du mythe de la Silicon Valley

La métropole de Bangalore se considère comme la première technopole asiatique, Sophia-Antipolis se présente comme le premier technopôle d’Europe, Paris aura bientôt sa propre Silicon Valley1

Depuis plus de soixante-dix ans, la réussite économique de la Silicon Valley a aiguisé les appétits de nombreux hommes politiques et aménageurs qui ont tenté de reproduire l’écosystème et les succès de la zone d’activités californienne. Ils ne sont pas les seuls. De nombreux journalistes, des chercheurs se sont emparés du processus pour en déduire des théories et des modèles au service du développement territorial : « comment relancer votre territoire grâce à la haute technologie », « petit manuel pour créer son technopôle », « l’innovation locomotive territoriale… » Les politiques visant à encourager l’implantation d’entreprises de haute technologie sur les territoires sont devenues incontournables. Certains ont même prédit l’avènement d’un Silicon’s World (Koep, 2002) favorisé en cela par l’apparition d’un nouveau processus de territorialisation inhérent à l’innovation : la technopolisation (Grondeau, 2015).

Dans la géographie de la mondialisation, les territoires de l’innovation sont des territoires qui gagnent (Benko, Lipietz, 1992). Leur image est positive. Ils sont synonymes de richesses, d’attractivité, de compétitivité et de modernité (Fache, 2002). Ils sont l’émanation directe du processus de destruction créatrice de Schumpeter (1942) et les territoires emblématiques de la globalisation et du néolibéralisme économique. La Silicon Valley est le premier de ces territoires, le plus puissant, celui dont on parle le plus, et qui s’est adapté incroyablement ou a initié la plupart des dernières révolutions technologiques (Henton, 2000) depuis la fin des années 1950 : des circuits intégrés à l’intelligence artificielle et aux nanotechnologies en passant par les ordinateurs personnels et Internet.

La Silicon Valley est également le territoire qui a vu naître, ou qui a créé selon les points de vue, les multinationales des nouvelles technologies les plus puissantes du monde : Google, Apple, Facebook, Amazon (GAFA). La pérennité de la capacité d’innovation de la SV depuis près de soixante-dix ans lui a conféré une dimension de modèle territorial, d’écosystème à reproduire, autant qu’une image ultra attractive et positive en matière de valeurs socioculturelles portées (dynamisme, indépendance, success story…).

La réussite continue de la SV et son rayonnement mondial sont manifestes. On peut les évaluer par exemple avec l’explosion du nombre de technopôles créés dans le monde depuis les années 1960 et s’inspirant du succès du technopôle californien. Il est passé d’une dizaine au début des années 1970 à plusieurs milliers au début des années 2000. Il y a de ce point de vue-là matière à poser la SV comme un morceau de la ville générique décrite par Koolhas (2000) ou un modèle tendant à se généraliser partout dans le monde quitte à l’uniformiser (Lussault, 2007). On peut également mesurer la réussite et le rayonnement internationale de la SV grâce à différents indicateurs de pénétration de la mondialisation comme le rapport Redifining Global Cities initié par la Brooking Institutions et JP Morgan Chase (2016)2. L’aire métropolitaine de la Silicon Valley (dans sa version élargie puisqu’intégrant les agglomérations de San Jose et de San Francisco) y est présentée comme l’écosystème le plus dynamique au monde en matière d’innovations et classée numéro un en termes de de productivité, d’attractivité des capitaux-risqueurs, de productions scientifiques, et parmi les toutes premières en matière de concentration de diplômés. Dans les deux cas, la réussite de la SV et l’image qu’elle renvoie sont citées en exemple et décortiquées par les aménageurs et les experts du monde entier afin d’être reproduites.

Pour schématiser, l’enjeu du modèle technopolitain de la Silicon Valley a reposé dans sa capacité à aménager un territoire favorable à la circulation de l’information et à la production d’innovations (Saxenian, 1994 ; Wallsten, 2004) autant que dans la création d’un cadre de vie idéal pour la vie des cadres selon l’expression popularisée par Benko (1991) dans sa géographie des technopôles. Dans le premier cas, le rapprochement des acteurs de l’innovation (scientifiques, entrepreneurs, investisseurs) sur un même territoire (en l’occurrence l’université de Stanford) au sein du premier technopôle aménagé, le Stanford Tech Park fait figure de cadre ideal-typique pour favoriser les relations, l’émulation, la proximité organisationnelle (Gilly, Torre, 2000). L’effet cafétéria (interpénétration maximale des acteurs de l’innovation) apparaît alors comme le but ultime des aménagements technopolitains partout dans le monde comme si la proximité spatiale générait de facto de la proximité sociale, des imbrications ou des interactions sociales. Dans le second cas, malgré des abus métropolitains manifestes et récurrents en matière d’inflation immobilière, de densification du bâti, de congestion des transports (Steinberg et Wolf, 2002 ; Grondeau, 2007), le mode de vie technopolitain et l’urbanisation d’une partie de la SV sont devenus un modèle de développement urbain alternatif (pour l’époque) qui s’est matérialisé par exemple par la substitution de « campus industriels » aux établissements industriels habituels. Le Sunset magazine fut le fleuron de ce nouveau style d’aménagements. La création du « campus industriel » de ROLM illustre cette évolution. Le choix est fait de décomposer un bâtiment unique en cinq unités : deux pour les tâches de conception, de direction et de développement, une pour la production, une pour la restauration et une qui prend la forme d’un complexe sportif. Ces cinq unités s’inscrivent dans un cadre vert où des chutes d’eau parcourent un grand jardin qui est utilisé pour se détendre par les employés le vendredi en fin d’après-midi. Cette organisation va stimuler et renforcer la culture d’entreprise technopolitaine. Elle va devenir le symbole et l’image référente des territoires de l’innovation. De plus, la flexibilité des locaux qui peuvent évoluer en fonction des besoins de l’entreprise (que cela soit la cafétéria, les salles de conférences), l’attractivité du site et les fonctions multiples permettent de recréer une ambiance communautaire qui va devenir un modèle d’aménagement et d’urbanisme pour les grandes entreprises ou les PME importantes (on peut citer le parc de Xerox ou le « campus » de Google) de la zone, puis du monde entier.

Ces différentes caractéristiques de la Silicon Valley ont finalement abouti à la définition spontanée d’une sorte de mythe « gagnant » du territoire de l’innovation à reproduire par tous les pays ou toutes les régions du monde souhaitant intégrer, ou demeurer à la pointe de la mondialisation. Cette définition s’est accompagnée de la constitution de tout un discours et d’un champ lexical autour de ce territoire idéal-typique producteur d’innovations.

Pitti (2003) analyse ainsi une métropole qui se présente comme « une aire de prospérité universelle et de paix sociale » dont le slogan, promu en grande pompe par le Silicon Valley Leadership Group est « Change the World », et qui vante à outrance sa liberté jusqu’au London Design Museum avec l’exposition « California : Designing Freedom ». Toutes ces idées largement relayées par les médias du monde entier ont été renforcées par l’impact d’entrepreneurs comme Mark Zuckerberg, Steve Jobs ou Elon Musk qui grâce à leur position médiatique et leurs discours renforcent un peu plus la marque Silicon Valley et son symbole de réussite. Comment ne pas vouloir ressembler à un territoire qui a vu naître – engendré ? – Facebook, Twitter, Airbnb ou Uber ? Et comment accepter qu’il puisse exister une face cachée de la Silicon Valley avec sa pollution, sa saturation en matière de transport, son inflation immobilière (Steinberg, 2002), ses discriminations en matière de sexe, d’ethnies, ou d’âge (Pitti, 2003 ; Hyde, 2003) quand la plupart des médias et expertises ignorent ces problèmes ? Cela reste compliqué, d’autant que désormais, même des séries télévisées à succès prennent le nom de la célèbre technopole pour vanter ses qualités entrepreneuriales et d’innovation à l’instar des six saisons de Silicon Valley diffusées sur HBO depuis 2014.

Reprenant les qualités diffusées par ces différents canaux médiatiques (TV, presse, radio, Internet, conférences des patrons emblématiques), la communication urbaine utilisée par les territoires de l’innovation souhaitant s’inspirer de la SV a tenté de transformer l’image desdits territoires tout en développant leur attractivité économique. Dans les parties suivantes, nous allons analyser la constitution de ces territoires de l’innovation en étudiant la manière dont leurs aménageurs, gestionnaires et acteurs les ont créés et fait évoluer jusqu’à aujourd’hui en même temps qu’ils produisaient un discours ayant pour objectif de les mettre en valeur afin de se « vendre » d’une certaine manière à des investisseurs, des entrepreneurs ou des actifs. Nous comparerons ces discours aux réalités territoriales observées, ainsi qu’à la réussite de ces opérations, d’abord à une échelle infra-métropolitaine, celles des technopôles et des cyberdistricts labellisés systèmes productifs locaux (SPL), ensuite à l’échelle métropolitaine, avec l’exemple d’une Innovation City.

Sophia-Antipolis, la technopole jamais réalisée3

À partir de la fin des années 1960, l’aménagement de territoires de l’innovation se développe en particulier dans les pays de Triade (Benko, 1991 ; Castells, Hall, 1994). En Europe, Sophia-Antipolis (SA) s’impose comme le premier parc d’activités dédié aux innovations. Dès sa création en 1969, le projet annoncé par les pouvoirs publics est d’aménager une Palo Alto méditerranéenne, une Florence du xxie siècle et d’installer « le quartier latin aux champs », en pleine pinède azuréenne. Porté par Pierre Laffitte, le directeur de l’École des Mines, originaire de la région, et par la DATAR, le bras armé gouvernemental en matière d’aménagement du territoire, le projet s’affirme comme ambitieux dès l’origine. Nice-Matin annonce ainsi en 1969, l’année du lancement de SA :

Sophia-Antipolis, la ville aux 20 000 chercheurs pourraient voir le jour d’ici 1980 dans la région de Valbonne.

Et Pierre Laffitte d’y décrire dans un long entretien sa volonté de créer une « véritable ville de la recherche scientifique » capable d’initier la fertilisation croisée emblématique de la Silicon Valley.

L’assentiment gouvernemental et le soutien des collectivités locales obtenus, il s’agit pour Pierre Laffitte de « développer une stratégie pour faire mûrir ce rêve, cette utopie et la vendre » (Buades, Fey-Gausset, Nussbaum, 2009). Cette stratégie de communication urbaine va reposer sur deux idées et images fortes : l’aménagement d’une ville idéalement organisée autour et pour la vie des acteurs de l’innovation : chercheurs, entrepreneurs, investisseurs, étudiants ; l’affirmation de la construction d’un écosystème de l’innovation capable de favoriser les échanges, l’émulation et la production d’innovation. Dans les deux cas, la technopole de la Silicon Valley est citée comme un exemple de réussite territoriale et organisationnel à reproduire.

C’est dans ce contexte qu’est proposé le terme de technopole pour décrire le projet sophipolitain. Pour mieux le cerner, le Dictionnaire critique de la Géographie (Brunet, Ferras, Thery, 1992) décrit :

[Un] lieu qui accorde une grande place aux fabrications et aux services de technologies avancées : Silicon Valley, Sophia-Antipolis, Montpellier… Prend la forme […] d’une ville entière lorsque celle-ci affiche une politique globale orientée vers l’accueil et le mode de vie des cadres, chercheurs et techniciens, jusque dans ses manifestations culturelles et les activités de loisirs.

Ce terme de technopole constitue donc un projet urbain, à l’échelle de la ville, totalement tourné vers la production de l’innovation et de ses acteurs.

Reprenant l’idée de Claval (1981) que la « ville c’est le contact, » et cherchant à la mettre en application, Pierre Laffitte et le SYMIVAL, le syndicat intercommunal en charge de l’aménagement du plateau de Valbonne (un village qui ne compte à l’époque pas plus de cinq mille habitants) s’inspire des réussites de la Silicon Valley, en y ajoutant une très forte exigence environnementale (une charte est signée obligeant de respecter deux tiers d’espaces verts pour un tiers de bâti). Ils mettent également en avant la proximité d’infrastructures de qualité (aéroport international, téléport) et l’héliotropisme local, proche de celui de la Californie pour attirer à Sophia-Antipolis, les grandes entreprises américaines des hautes technologies qui cherchent à pénétrer le marché européen (Longhi, Queré, 1997) : IBM, Texas Instrument, Compass Design Automation, Sequent Computer… Séduites autant par le projet technopolitain que par l’image de « Sun Belt » et les références à Palo Alto renvoyées par la localité, « les Américains ont vu Sophia-Antipolis comme un eldorado, une sorte de petite Californie d’Europe » résume l’actuel directeur aménagement de la communauté d’agglomération de Sophia-Antipolis, Serge Bibet, quand on lui demande de décrypter les raisons du succès international originel de SA, confirmant le point de vue de la plupart des experts et gestionnaires locaux que nous avons rencontrés.

Dans les faits pourtant, la morphologie urbaine de Sophia-Antipolis est loin de ressembler à une ville et donc à une technopole. Le discours promotionnel d’avènement d’une ville de la sagesse et de l’innovation se heurte en effet à la réalité de la diffusion urbaine sophipolitaine. Les normes territoriales imposées par la charte environnementale, la volonté de préserver l’environnement, l’organisation des transports routier ont installé une diffusion urbaine manifeste qui se révèle être, en réalité, à l’opposé de la définition d’une technopole, une ville dédiée à l’innovation. Cette dernière, au sens classique du terme, possède plusieurs éléments constitutifs dont une histoire (un plan, une trame), un paysage caractéristique et une agglomération de la population et des activités. L’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) parle de ville à partir de 2 000 habitants agglomérés. À son lancement, Sophia-Antipolis ne réunit aucun des éléments précités, ce qui n’empêche pas les acteurs politiques à l’initiative du projet, locaux comme nationaux, d’affirmer dans la presse la construction d’une ville nouvelle totalement portée vers l’innovation : une « Silicon Valley azuréenne ». La réalité du projet sera pourtant tout autre puisque l’opération d’aménagement d’intérêt national aboutit à la construction d’un parc d’activités dédié à la haute technologie : un technopôle.

Cette distinction technopôle / technopole est loin d’être anodine en matière de communication urbaine, car cinquante ans après sa création, la volonté initiale de la création d’une Silicon Valley azuréenne ne s’est jamais réalisée malgré différents aménagements locaux et la constitution d’une communauté d’agglomération sensée permettre au projet urbain initial de s’épanouir dans sa globalité (Grondeau, 2006). Ces différentes tentatives n’ont jamais permis l’émergence d’une urbanité sophipolitaine, alors qu’il s’agissait de l’objectif premier annoncé par les fondateurs de SA (Grondeau, 2018). Craignant l’assimilation à de banales zones d’activités, dont le nombre a explosé dans les années 1980 et 1990, les gestionnaires de SA ont toujours refusé et réfuté l’appellation technopôle que cela soit dans leur document de travail, de stratégie de développement (CASA, 2014 ; 2016), ou de campagnes médiatiques et promotionnelles (Les Échos du 21 octobre 2017). Il est d’ailleurs intéressant de noter que les acteurs politiques ont été totalement relayés par les acteurs médiatiques en matière de définition urbaine. Le mot technopôle est totalement absent des documents officiels de cadrage et de développement et quasiment absent des articles locaux et nationaux traitant de SA.

On note d’ailleurs à ce sujet, que ces dix dernières années, l’emploi du terme technopole au sujet de SA n’a jamais été aussi fort (le 30-05-2018 France Info parle de « l’engagement environnementale de la technopole », le 15-01-2019 la Tribune évoque le « territoire de la technopole »…), prouvant dans ce cas-là précis, que la communication urbaine peut se passer de coller à la réalité, et ce d’autant mieux quand elle est suivie par les médias et les relais auprès du grand public, qui à aucun moment ne questionnent, à défaut de remettre en cause le vocabulaire et les terminologies employés par les gestionnaires de territoire.

L’autre grand point de communication urbaine développé par les gestionnaires de territoire concerne l’avènement d’un écosystème favorisant l’émulation et la fertilisation croisée à l’instar de ce que l’on peut observer dans la SV. En matière de fertilisation croisée, terme popularisé par Pierre Laffitte, dès la fin des années 1960, le constat est proche de celui de l’utilisation du terme technopole : les gestionnaires de SA n’ont cessé depuis leur création de vanter les relations entre les acteurs locaux de l’innovation et les interrelations. Un certain nombre d’études universitaires ont pourtant signifié la faible proximité organisationnelle sophipolitaine que cela soit dans les années 1980 (Perrin, 1986), dans les années 1990 (Fourcade, 1991), ou dans les années 2000 malgré de nombreuses tentatives pour la développer (Longhi, Lazaric, Thomas, 2004 ; Queré, 2004). Ancien président du Club des Dirigeants de la zone, J. Mariacci, confirme que « Sophia n’a plus le quart d’heure d’avance qu’elle avait en 1989, » même si les quinze dernières années ont vu des relations professionnelles et une émulation technologique se mettre en place avec réussite (Grondeau, 2017) grâce au dynamisme des associations professionnelles locales et à l’instauration des politiques de pôle de compétitivité.

C’est ce double échec relatif – rappelons que malgré les crises économiques et les révolutions technologiques, Sophia-Antipolis est un territoire créateur d’emplois et de richesses (Grondeau, 2018) qui rapproche la stratégie originelle de communication urbaine de SA, et ses politiques d’aménagement successives, d’une prophétie auto-réalisatrice au sens de Stazack (2000). La promotion de l’urbanité et de l’émulation sophipolitaines par les pouvoirs publics est en effet apparue autant comme un moyen de valoriser l’attractivité du territoire que comme un moyen d’envisager son avenir.

C’est cette double logique qui a poussé les gestionnaires du territoire à se donner récemment les moyens de leurs ambitions avec un vaste projet de réaménagement intitulé Sophia 2030 qui consiste à relancer, si ce n’est créer, l’urbanité locale et à doter la zone d’une nouvelle vitrine urbaine à la hauteur de leurs ambitions et de la concurrence internationale. L’objectif annoncé est clair et posé par le Club des Dirigeants dans leur document de cadrage Sophia Vision :

Développer l’urbanité et les services associées : L’humain étant au centre de Sophia vision 2020, des réponses doivent être apportées afin d’attirer, retenir et fidéliser les talents. Sans renier le passé, il apparaît nécessaire de redonner de l’ampleur et de l’humanité au « vivre et travailler autrement ».

La référence à la durabilité des territoires ardemment défendus par les tenants du Silicon Valley Leadership Group lors de leurs congrès annuels est manifeste et montre une fois encore l’importance référentielle récurrente de la zone de Palo Alto pour les acteurs de Sophia-Antipolis.

Pour cela, la CASA a prévu d’aménager pas moins de quatre nouvelles centralités mixtes du point de vue fonctionnel et social afin de créer « de la ville », de l’urbanité : Saint-Pilippe, Trois Moulins, Les Fuguerets, Les Clausonnes. Elles seront desservies par un nouveau type de transports en commun : le Bus-Tram, qui aura pour mission d’améliorer l’accessibilité du site et les relations inter-sites. L’objectif de réaliser une technopole n’est toujours pas mort et la possibilité que la réalité urbaine rattrape la communication territoriale n’a même jamais été aussi proche comme le confirme officieusement plusieurs experts locaux ne souhaitant pas revenir sur la non-réalisation de la technopole. Cette image de ville de la science, une nouvelle vitrine urbaine doit désormais la symboliser. Il s’agit de l’opération Open Sky qui va voir l’implantation d’un centre commercial à ciel ouvert dernière génération dont le projet a été confié à Jean Nouvel. La ZAC regroupera en son sein des commerces, des logements, des lieux de restauration avec l’ambition de renforcer l’urbanité du cluster tertiaire constitué autour du campus Sophia Tech et des Espaces Antipolis.

Maquette du projet Open Sky

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Crédit : ©Compagnie de Phalsbourg. Source : http://www.compagniedephalsbourg.com

Maquette du projet Open Sky

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Crédit : ©Compagnie de Phalsbourg. Source : http://www.compagniedephalsbourg.com

Ce nouveau quartier sophipolitain sera positionné à l’entrée du technopôle et jouxtera des équipements et des bâtiments, alignés sur les canons urbains de la mondialisation : monumentaux et spectaculaires à l’instar de l’Azur Arena Antibes, la salle multisport locale dernier cri réalisée par le célèbre architecte allemand Carlo Weber. Dans l’esprit des aménageurs locaux, le quartier à venir doit s’imposer comme la nouvelle image de SA, symbole de la modernité, du dynamisme et de la volonté implicite du technopôle de se réaliser en technopole. La communication interne autour de ce projet est ainsi totalement tournée vers la réalisation des rêves urbains des pères fondateurs de faire de SA une Silicon Valley azuréenne.

Le Silicon Sentier ou la prophétie territoriale auto-réalisatrice4

La labélisation institutionnelle d’un territoire comme le Silicon Sentier (SS) donne un autre éclairage de la communication urbaine qui peut être, accompagné par exemple d’un lobbying soutenu, vecteur de prophétie territoriale auto-réalisatrice (Staszak, 2000). Le terme « Silicon Sentier » est ainsi apparu à la fin des années 1990 (1998/1999). C’est d’abord le nom que donne, de manière informelle, un certain nombre de fondateurs de start-up de la nouvelle économie, au quartier du second arrondissement de Paris dans lequel ils se localisent. Le quartier du Sentier se trouve être en effet à la fin des années 1990 le lieu d’une concentration importante d’entreprises liées à Internet. Ces entreprises, la plupart des start-up, ont à leur tête des dirigeants qui se reconnaissent, se côtoient, travaillent et font la fête ensemble d’autant plus facilement que leurs sociétés se localisent sur un tout petit périmètre (Dalla Pria, Vicente, 2006). En juillet 2000, ces entrepreneurs décident de se regrouper en association qu’ils nomment Silicon Sentier. Pour son président J. Ferré, « lancer cette association du Silicon Sentier n’est pas quelque chose d’anodin. C’est le point de départ d’un grand mouvement. Nous avons tous de l’ambition et nous aimons Paris. L’idée d’une Silicon Valley en plein cœur de la plus belle ville du monde est très porteuse. C’est bon pour chacun d’entre nous5 ! »

Carte 1 : Le quartier du Silicon Sentier à l’origine dans le 2nd arrondissement

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Source : Vicente J., 2005 d’après Robitaille et alii, 2001

Le projet est ambitieux. Pour J. Ferré, il s’agit de « faire du lobbying pour ce qui se passe de plus dynamique à Paris, et faire comprendre que l’on peut vivre comme dans une technopole, en tissant des relations inter-entreprises fécondes, mais au cœur même des villes ». La communication urbaine utilisée par l’association a donc vocation ici à être une affirmation identitaire et territoriale forte. Elle émane d’un petit groupe d’acteurs privés qui souhaitent donner sens et reconnaissance à un espace qu’ils pratiquent au quotidien afin de le rendre visible et d’inscrire son image dans la modernité et la compétitivité territoriale.

Les références à la Silicon Valley et au terme de technopole sont là aussi bien présentes car l’objectif de l’association est de mettre en valeur leur territoire d’activité, le Sentier, afin de lui donner une image permettant d’attirer investisseurs et classe créative « globalisés ». L’intense travail de lobbying de l’association, qui s’accompagne de la création d’un site Internet, d’événements (petit-déjeuners professionnels, soirées de lancement…), d’envoi de newsletters régulières va trouver des relais dans la presse spécialisée et dans la presse nationale marquant ainsi la capacité de ces acteurs privés à faire exister le terme « Silicon Sentier », alors qu’il n’a encore aucune existence administrative.

C’est en 2001, malgré l’effondrement du Nasdaq et ses impacts économiques sur les activités de la haute technologie, que l’association Silicon Sentier est labellisée, à son initiative, par la DATAR comme système productif local (SPL). Un SPL est selon la DATAR (2002) « une organisation productive particulière localisée sur un territoire correspondant généralement à un bassin d’emploi. Cette organisation fonctionne comme un réseau d’interdépendances constituées d’unités productives ayant des activités similaires ou complémentaires qui se divisent le travail (entreprises de production ou de services, centres de recherche, organismes de formation, centres de transfert et de veille technologique, etc.) ».

C’est donc au pire moment de sa courte vie, le krach boursier des valeurs de la haute technologie, que le Silicon Sentier se retrouve être reconnu et encouragé par les pouvoirs publics. De nombreuses entreprises historiques du Silicon Sentier rencontrent, en 2001-2002, de nombreuses difficultés économiques qui en obligent certaines à fermer et d’autres à quitter l’hypercentre parisien. Il existe donc bien, à ce moment précis, une distorsion entre la reconnaissance territoriale de la compétitivité d’un quartier et la réalité effective de la dynamique de développement dudit quartier.

C’est également à cette période, et pour essayer de fédérer plus d’entreprises du secteur des nouvelles technologies, que son périmètre initial du SPL (le second arrondissement de Paris) est élargi. En 2003, le SPL du Silicon Sentier englobe ainsi les 1er, 2nd, 3e, 9e, 10e et 11e arrondissements et se définit selon les dirigeants de l’association comme « un grand Sentier ». Cette labellisation permet à l’association de bénéficier d’aides de l’État qui s’ajoutent aux subventions municipales et de continuer son travail de communication urbaine autour du Silicon Sentier.

Carte 2 : Le SPL du Silicon Sentier.

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Source : Grondeau, 2007.

Au vu de ces premiers résultats, le mérite des membres actifs du Silicon Sentier est d’avoir su utiliser au mieux la communication urbaine afin de se présenter comme des acteurs incontournables de la haute technologie dans Paris capable de reproduire, en tout cas d’initier, le succès territorial de la Silicon Valley. Leur lobbying a convaincu les pouvoirs publics locaux d’autant plus facilement que, selon nos entretiens, un certain nombre des membres du Silicon Sentier était proche de l’équipe dirigeante de la mairie actuelle et du gouvernement Jospin. La ville de Paris et l’État, via la DATAR, ont ainsi adhéré au projet, l’ont soutenu et légitimé. La labellisation du SPL montre à quel point une opération de communication urbaine efficace peut influer sur l’image de territoires et conditionner son image positive.

Il est intéressant de noter dans ce cadre-là que la terminologie Silicon Sentier, produite par la communication d’un petit groupe d’acteurs territoriaux privés, a été d’emblée acceptée et relayée par les journalistes sans être véritablement questionnée. Ainsi, les travaux de R. Suire (2003) et de R. Suire et J. Vicente (2002) ont montré comment l’attention des médias concernant les nouvelles technologies parisiennes s’est focalisée uniquement sur le second arrondissement parisien d’où étaient originaires les membres actifs de l’association Silicon Sentier. La presse s’est ainsi emparée du terme « Silicon Sentier » qui à la fin des années 1990 était « vendeur » et permettait de comparer Paris à Palo Alto (et sa Silicon Valley), à New York (et sa Silicon Alley) ou à San Francisco (et son Multimédia Gulch). L’installation d’un certain nombre de start-ups dans le quartier du Sentier après l’implantation de Yahoo, Nomade et Lycos (1997-1998) avait tout pour séduire. Elle participait d’un vaste mouvement de revitalisation économique des hypercentres métropolitains initié par le secteur des nouvelles technologies (Indergaard, 2004) qui était perçu par les médias de l’époque comme une « évidence ».

C’est ainsi que l’on ne trouve, à la fin des années 1990, que de très rares articles posant des questions sur la pertinence et la réalité du cyberdistrict. À la fin de 1998, par exemple, un article de Libération présente le Silicon Sentier comme très surfait :

Le Silicon Sentier, ça reste une boutade, mais allez savoir : à force d’en parler, cela va peut-être finir par devenir une réalité6.

Pour évaluer la réalité du Silicon Sentier, et donc l’efficacité de la communication urbaine des acteurs privés du quartier, nous avons voulu évaluer la pertinence territoriale qui a abouti à la labélisation SPL. Pour ce faire, nous avons interrogé la localisation des entreprises concernées par le SPL afin d’évaluer la localisation des services informatiques de pointe dans le second arrondissement, les six arrondissements caractérisant le SPL et l’ensemble des arrondissements de Paris. L’hypothèse que nous avons faite, à la suite de différents entretiens avec des entrepreneurs parisiens du secteur des nouvelles technologies, est que, contrairement à la communication urbaine mettant en avant la concentration de ces activités dans six arrondissements parisiens, la plus grande partie des activités caractéristiques du Silicon Sentier se localisaient en réalité en dehors du périmètre du SPL.

Pour cela, nous avons identifié les activités du Silicon Sentier (cyberdistrict et SPL) grâce à leurs codes NAF et les avons cartographiées. Les résultats montrent qu’à l’époque de sa labellisation, les activités caractéristiques du Silicon Sentier se localisaient en majorité en dehors du second arrondissement et a fortiori à l’extérieur du périmètre du SPL qui a pourtant été labellisé par la DATAR. Pour 2002, par exemple, le 8e arrondissement possédait plus d’emplois dans les services informatiques de pointe que le 9e arrondissement, le plus fourni du Silicon Sentier. De plus, le 17e, le 16e et le 13e arrondissement comptaient plus d’emplois que le 10e, second arrondissement du SPL le plus marqué par ce type d’emplois. Si l’on prenait l’an 2000 (Grondeau A., 2007), on obtient le même résultat et on ajoute le 12e, le 15e et le 13e qui comptaient plus d’emplois dans les services informatiques de pointe que le second arrondissement le plus concerné par ces emplois et intégré au SPL.

Carte 3 : Localisation des effectifs des services informatiques de pointe dans Paris intra-muros en 2002

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Source : A. Grondeau 2007

À la lecture de ces résultats, on peut donc imaginer que la qualité du lobbying des acteurs privés de l’association Silicon Sentier et leur capacité à valoriser l’image d’un territoire, ont permis la labélisation d’un périmètre qui comprenait leurs membres actifs mais qui ne recouvrait pas la réalité des activités censées être caractéristiques du SPL. Si cela avait été le cas, le SPL aurait dû englober au moins quatre autres arrondissements (le 8e, le 17e, le 16e et le 13e), n’aurait probablement pas intégré les 1er et 3e arrondissements et aurait beaucoup plus penché vers le sud-ouest que vers le centre de la ville.

En réalité, nous avons montré par ailleurs (Grondeau A. 2007) que dès 1998, la plupart de ces activités du secteur des nouvelles technologies se localisaient dans le sud et l’ouest de la ville selon un découpage classique francilien à savoir : les activités à forte valeur ajoutée à l’ouest et au sud et les activités industrielles plus classiques au nord et à l’est. Ces analyses allaient dans le sens des conclusions du Geistel, le groupe d’études international sur les stratégies territoriales et l’économie locale sur la localisation des activités de haute technologie en Île-de-France (Geistel, 2006). Elles viennent également conforter les travaux de Staszak (2000) qui proposait d’envisager le développement du Silicon Sentier comme une illustration de prophétie territoriale autoréalisatrice, puisque depuis la fin des années 2000, le SPL Silicon Sentier a étendu sa zone d’influence et couvre désormais la totalité de Paris intra-muros. Pour plus de cohérence, il a également été intégré au pôle de compétitivité Cap Digital qui recouvre la totalité de la métropole parisienne.

Bangalore, une métropole innovante créatrice de fragmentation

À l’échelle des métropoles, la communication urbaine liée à l’innovation, au sens large du terme, est très importante. Elle permet aux villes du monde entier d’afficher leur attractivité, leur compétitivité et de se comparer les unes avec les autres. Elles affirment leur spécificité grâce à différents classements internationaux et labels comme ceux d’Innovation Cities7, leur permettant de lancer de grands aménagements favorables aux activités, aux investissements et aux emplois à haute qualification liés à l’innovation. Ces aménagements mobilisent des transformations urbaines importantes qui se réalisent parfois au détriment des classes populaires autochtones (Vallat et al., 2009 ; Deboulet et al., 2007), inscrivant alors la communication urbaine comme un facteur aggravant de la fragmentation urbaine…

Bangalore8, en Inde, est une des Innovation Cities les plus dynamiques d’Asie. La capitale de l’État du Karnataka se présente d’ailleurs depuis sa création comme la première technopole indienne. Dès les années 1980, ses représentants politiques ont mis en place une communication urbaine intensive et agressive qui avait comme ambition de présenter son technopôle phare comptant près de 100 000 actifs travaillant dans les secteurs de l’innovation, l’Electronic City, comme la Silicon Valley indienne. Pour ce faire, ils avaient lancé de nombreuses campagnes de publicité dans les magazines spécialisés américains et diffusé les études menées par USAID qui évaluaient les potentialités de l’Electronic City et affirmaient que le modèle du nord de la Californie était reproductible dans le sud de l’Inde. Les actions de communication urbaine se sont également matérialisées à travers l’organisation des salons Bangalore IT qui sont des manifestations internationales d’affaires dans les activités TIC ou la diffusion de spots publicitaires. La promotion de Bangalore n’y manque jamais comme le slogan de la première édition de Bangalore IT le rappelle : « Silicon Valley meets Silicon Valley ».

Dès l’origine du projet technopolitain de Bangalore, la communication urbaine des gestionnaires métropolitains s’est donc positionnée sur le caractère reproductible de la zone de Palo Alto dans la capitale du Karnataka. L’idée était de convaincre les multinationales américaines qu’elles disposeraient du même écosystème de travail que dans le nord de la Californie, tout en profitant des avantages comparatifs locaux (souplesse et coût de la main d’œuvre très qualifiée…). Les pouvoirs publics se sont appuyés pour ce faire sur des promoteurs et des aménageurs privés (dans le cas de l’International Tech Park (ITP)) et sur une organisation paragouvernementale (dans le cas de l’Electronic City) : la Karnataka State Electronics Develoment Corporation (KEONICS). L’Electronic City bénéficie ainsi de 136 hectares, dédiés aux activités de l’électronique et des TIC, dotés des infrastructures les plus performantes et autonomes : électricité, connexion satellite, fibre optique, alimentation en eau et aujourd’hui Wifi, largement mis en avant dans leur plaquette promotionnelle.

De son côté, A. Choudury, qui travaille chez Ascendas, la société qui gère l’ITP en partenariat avec le gouvernement, nous a expliqué l’importance du rôle volontariste de l’état du Karnataka, en particulier en matière de communication urbaine concernant les programmes immobiliers technopolitains :

Les pouvoirs publics sont très vigilants à la haute qualité de nos aménagements car ils souhaitent les promouvoir partout dans le monde comme la Californie vend sa Silicon Valley. Nous devons être au niveau.

Il a ajouté que sa société allait probablement construire un ou deux nouveaux bâtiments ultramodernes pour répondre à la demande des entreprises qui souhaitaient intégrer l’ITP et « promouvoir son style de vie international ». Car c’est bien ce que ces technopôles fermés reproduisent : une partie de ville générique qui pourrait être située dans la Silicon Valley avec les bureaux des ingénieurs côtoyant des restaurants chics, des fast-food internationaux, des salons de coiffure, des banques, des salles de sport, des animations, en somme tous les services « globaux » auxquels la main d’œuvre très qualifiée aspire. Les promoteurs privés de technopôles dans le reste de la métropole ne sont pas en reste comme le démontre l’Embassy Golf Business Park qui accueille déjà Microsoft, Mphasys ou Netapp. Et les projets d’aménagement d’une dizaine de nouveaux technopôles au sud et l’est de Bangalore sont en cours. B.S. Patri, le directeur des opérations de Keonics, nous a d’ailleurs expliqué qu’une seconde Electronic City était en projet, encore plus grande et plus perfectionnée : « pour être mieux que la Silicon Valley ».

Spot publicitaire gouvernemental vantant la Silicon Valley indienne.

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La réalité socio-territoriale de Bangalore reste pourtant très éloignée de la Silicon Valley. S’il y a bien une américanisation d’une certaine « classe globale », qui travaille dans les TIC, il existe des différences fondamentales entre les deux zones technopolitaines. La faiblesse des créateurs d’innovations, en particulier des sociétés de capital-risque, celle des start-ups, la forte domination des grandes entreprises étrangères, l’hétérogénéité du marché du travail et des formations scientifiques, l’aspect récent des activités R&D dans le secteur des TIC sont autant d’éléments qui font que Bangalore n’est pas le nord de la Californie (Shiri, 1999 ; Didelon, 2003 ; Heitzman J., 2004 ; Hamm S., 2007). La proximité organisationnelle reste également très faible et, de ce point de vue, le milieu local est encore loin d’être un « milieu innovateur ». Nos différents entretiens ont montré que les entrepreneurs ont de plus en plus conscience que l’avenir des entreprises indiennes, ou étrangères mais implantées en Inde, passe par l’émulation et que celle-ci est encore balbutiante localement parlant. Les liens devraient donc se densifier tant au niveau des collaborations technologiques entre entreprises qu’entre organismes publics de recherche et entreprises.

Au-delà de ces aspects technopolitains classiques vantés dans les salons du monde entier, mais encore loin d’être réalisés, l’autre grande différence avec la Silicon Valley reste la fracture urbaine et sociale entre les territoires des TIC et de la haute technologie et ceux du reste de la société. Bangalore reflète cette société indienne à deux vitesses avec sa dualité sociologique, économique et urbaine (Benjamin S., 2000 ; Grondeau, 2010) totalement occultée par les discours officiels des gestionnaires métropolitains. Ainsi B.S. Patri est apparu très surpris quand nous lui avons à plusieurs reprises demandé si le fait d’occulter l’extrême pauvreté d’une partie de la population vivant dans les slums situés parfois à seulement quelques dizaines de mètres des technopôles dont il assure la promotion, ne posait pas problème :

La Californie a aussi ses pauvres et cela n’empêche pas la Silicon Valley de rayonner. Ici, c’est pareil.

Le message est clair et assumé, et les mille slums que l’on dénombre à Bangalore (Shiri, 1999 ; Benjamin, 2000) accueillant plus de dix pour cent de la population, ne changeront pas la communication urbaine des élites locales. Les gestionnaires métropolitains et la technocratie locale liée aux castes et aux classes dirigeantes ont fait des TIC et de la haute technologie leur priorité : 85 % de la totalité des budgets alloués aux politiques d’aménagement du territoire s’avèrent ainsi dévolus aux activités TIC et à leurs territoires et leurs usagers. Les inégalités et les processus de ségrégation socio-spatiale sont donc amplifiés par les politiques d’aménagement liées aux territoires de l’innovation et totalement occultés par la communication urbaine des gestionnaires métropolitains.

Conclusion

Depuis l’avènement de la mondialisation, l’innovation est au cœur de nos politiques économiques et territoriales. Symbole de la modernité, de la réussite et de la compétitivité des territoires, elle est devenue un enjeu de communication essentiel des politiques publiques. L’aménagement et la promotion de technopôles, la labellisation SPL, par la DATAR, de clusters numériques, ou la qualification métropolitaine d’Innovation City vont tous dans le sens d’une mise en valeur des qualités et des potentiels innovants de territoires cherchant à développer leur attractivité afin d’attirer un maximum d’entreprises, d’investisseurs ou de créatifs.

Très largement inspirée des caractéristiques socio-économiques et organisationnelles ayant généré la réussite de la Silicon Valley, la communication urbaine des gestionnaires de territoires de l’innovation a comme objectif principal la production d’un discours positif et attractif permettant d’améliorer la compétitivité des territoires dont ils ont la charge. Elle reprend ainsi un certain nombre de qualités californiennes comme la qualité de vie, l’émulation, la circulation de l’information qu’elle met en avant afin d’y inscrire le territoire qu’elle promotionne. Sophia-Antipolis, Bangalore, le Silicon Sentier, n’ont eu de cesse, depuis leur création, d’avoir recours à ces comparaisons, autant qu’à la pratique de communication urbaine.

Dans ces trois exemples que nous avons étudiés, nous avons vu qu’il peut exister une différence importante entre le discours véhiculé par les responsables politiques des territoires de l’innovation et la réalité observable. La fertilisation croisée et l’urbanité sophipolitaines ne sont pas celles de Palo Alto. Elles en sont même très loin. La qualité de vie de Bangalore est différente du nord de la Californie. Elle peut même être à l’opposé des ambitions de durabilité affichées dans la zone technopolitaine californienne. Le Silicon Sentier n’a pas la même pertinence territoriale que la Silicon Valley. Dans chacun de ces cas pourtant, la communication urbaine sert autant à la promotion des territoires qu’à la définition d’objectifs à atteindre et de ligne directrice pour les projets technopolitains locaux.

Le plan Sophia 2030 a ainsi vocation à densifier l’urbanisation locale pour permettre à la ville de la sagesse et de l’innovation de se réaliser. La mixité fonctionnelle et sociale, l’urbanité technopolitaine sont les buts clairement assumés par le projet d’aménagement du territoire en cours de définition. La communication urbaine se fait ainsi outil de prospective autant que de promotion territoriale. À Bangalore, la reproduction de la qualité de vie et de travail de la Silicon Valley au sein de technopôles fermés est autant un argument de vente de bureaux destinés aux firmes globales qu’un véritable projet de territoire technopolitain, qu’il soit porté par les acteurs publics ou les promoteurs privés. Dans le Silicon Sentier, l’affirmation identitaire d’un milieu innovateur et d’un écosystème favorable aux nouvelles technologies a permis la reconnaissance d’un cluster innovant et lui a permis de devenir un objectif prioritaire défini puis soutenu par les pouvoirs publics.

La mise en image et en discours promotionnels des territoires de l’innovation ne peut donc être simplement résumée à la distorsion ou la réécriture de leurs réalités socio-économiques, urbaines ou métropolitaines, au nom de la définition et de l’encouragement de leur attractivité. Elle correspond également à une réalité espérée, ou projetée, qui peut devenir un projet de territoire ambitieux pour peu que les gestionnaires de territoires s’en donnent les moyens, ce qui n’est pas toujours le cas comme l’a montré l’exemple de Bangalore, où la fragmentation urbaine est concomitante des aménagements technopolitains. Dans tous les cas, la communication urbaine s’est imposée comme un important levier des politiques de compétitivité des territoires. Elle les a justifiées autant qu’elle a pu influer sur leur détermination, intégrant de fait les éléments stratégiques permettant de définir l’efficacité d’une politique d’aménagement du territoire.

1 http://www.leparisien.fr/espace-premium/actu/la-capitale-aura-bientot-sa-silicon-valley-11-10-2012-2222331.php

2 https://www.brookings.edu/wp-content/uploads/2016/09/metro_20160928_gcitypes.pdf

3 Cette sous-partie se base sur la réalisation de plusieurs études consacrées à la gouvernance, au développement et à l’urbanité

4 Cette sous-partie d’article se base sur la réalisation d’une étude consacrée à la localisation des activités de haute

5 http://www.creascope.net/contenu/trajectoire/010106.html

6 Médiangles, Libération, 19-12-1998.

7 https://www.innovation-cities.com/innovation-cities-index-2018-global/13935/

8 Cette sous-partie se base sur la réalisation d’une étude de terrain produite à Bangalore dans les deux plus grands technopôles

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Notes

1 http://www.leparisien.fr/espace-premium/actu/la-capitale-aura-bientot-sa-silicon-valley-11-10-2012-2222331.php

2 https://www.brookings.edu/wp-content/uploads/2016/09/metro_20160928_gcitypes.pdf

3 Cette sous-partie se base sur la réalisation de plusieurs études consacrées à la gouvernance, au développement et à l’urbanité sophipolitaine menées entre 2004 et 2018 en partenariat avec la communauté d’agglomération de Sophia-Antipolis. Ces études ont consisté en différentes enquêtes par questionnaires sur les thématiques de la proximité organisationnelle et de l’urbanité auprès d’échantillons de plusieurs centaines de personnes et des entretiens avec plus d’une centaine d’acteurs incontournables de Sophia-Antipolis. La dernière enquête en date a été réalisée en 2017.

4 Cette sous-partie d’article se base sur la réalisation d’une étude consacrée à la localisation des activités de haute technologie en Ile-de-France, menée entre 2004 et 2006 pour le Plan Urbanisme Construction Aménagement (PUCA). Cette étude a consisté en une analyse statistique sur les différents périmètres du cyberdistrict, et la réalisation de près de 70 entretiens d’acteurs du Silicon Sentier dont plus de 55 dirigeants d’entreprises. L’étude a été mise à jour en 2015.

5 http://www.creascope.net/contenu/trajectoire/010106.html

6 Médiangles, Libération, 19-12-1998.

7 https://www.innovation-cities.com/innovation-cities-index-2018-global/13935/

8 Cette sous-partie se base sur la réalisation d’une étude de terrain produite à Bangalore dans les deux plus grands technopôles de la métropole (Electronic City et International Tech Park). Cette étude repose sur un large passage en revue de la littérature grise et académique ayant trait aux aménagements technopolitains locaux, une étude critique du schéma directeur métropolitain mis en place par le bureau d’études SCE ainsi que cinquante entretiens d’acteurs locaux (entrepreneurs, aménageurs, experts) afin de mieux comprendre les dynamiques technopolitaines métropolitaines.

Illustrations

Maquette du projet Open Sky

Maquette du projet Open Sky

Crédit : ©Compagnie de Phalsbourg. Source : http://www.compagniedephalsbourg.com

Maquette du projet Open Sky

Maquette du projet Open Sky

Crédit : ©Compagnie de Phalsbourg. Source : http://www.compagniedephalsbourg.com

Carte 1 : Le quartier du Silicon             Sentier à l’origine dans le 2nd arrondissement

Carte 1 : Le quartier du Silicon Sentier à l’origine dans le 2nd arrondissement

Source : Vicente J., 2005 d’après Robitaille et alii, 2001

Carte 2 : Le SPL du Silicon             Sentier.

Carte 2 : Le SPL du Silicon Sentier.

Source : Grondeau, 2007.

Carte 3 : Localisation des effectifs             des services informatiques de pointe dans Paris intra-muros en             2002

Carte 3 : Localisation des effectifs des services informatiques de pointe dans Paris intra-muros en 2002

Source : A. Grondeau 2007

Spot publicitaire gouvernemental             vantant la Silicon Valley indienne.

Spot publicitaire gouvernemental vantant la Silicon Valley indienne.

Citer cet article

Référence électronique

Alexandre GRONDEAU, « Territoires de l’innovation et communication urbaine », K@iros [En ligne], 4 | 2020, mis en ligne le 08 septembre 2020, consulté le 28 mars 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/kairos/index.php?id=417

Auteur

Alexandre GRONDEAU

Maitre de conférences, Aix-Marseille Université,UMR 7303, Laboratoire TELEMMe

Droits d'auteur

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