Je mettrais l’accent sur les points suivants :
I. Le rôle important croissant du droit et de la jurisprudence dans la concrétisation et la sauvegarde du droit humain universel à l’eau et du droit de l’eau à la vie
Le contexte mondial actuel est toujours plus marqué par l’expansion continue de la marchandisation de la vie, de la monétisation de tout bien tangible et intangible et de la privatisation de tout bien et service public, avec perte de responsabilité politique publique collective et effacement de toute démocratie. Le marché et la finance privée ne sont pas démocratiques ni responsables par rapport à l’intérêt général : ils sont guerriers, conquérants et prédateurs (voir les limites, les ambiguïtés et les mystifications autour de la RSE). Dans le cadre du marché et de la finance privée, il n’y a pas de droits, mais uniquement des besoins à satisfaire individuellement et/ou collectivement selon une logique d’optimisation de sa propre utilité.
Dès lors, il est de plus en plus évident que le droit (l’État de droit, les constitutions…) reste le denier ressort de protection et de défense des droits des êtres humains et des autres espèces vivantes. D’où l’importance des sentences des juges, par exemple contre les coupures d’eau (admises et acceptées par les pouvoirs publics favorables à la marchandisation et à la privatisation/financiarisation ; ainsi que des décisions prises en 2017 dans quatre pays du monde de reconnaître une personnalité juridique à des fleuves [en Nouvelle-Zélande, Inde, Équateur et Australie] avec l’obligation de la nomination d’un représentant de l’État en tant que garant et défenseur des droits des fleuves.
II. Le rôle fondamental à jouer par l’université dans cette phase historique cruciale en faveur de la conception, promotion et sauvegarde des biens et services communs, publics, étroitement liés aux droits à et de la vie
Nous assistons actuellement à une banalisation des biens et services communs publics noyés dans un univers multiple, varié et fluide, défini vaguement, par le concept de « communs ». Selon ce concept, toute chose tangible et intangible peut être considérée faisant partie des « communs » à condition qu’il y ait des sujets qui la considèrent un « communs ». Dès lors, fini la soumission à l’idéologie de la propriété privée et publique qu’elle soit. Ce qui compte c’est l’usage et, non pas le régime de propriété, un usage « en commun ». Fini aussi l’État régulateur vive l’autorégulation spontanée et libre en innovation permanente grâce aux savoirs et aux puissantes technologies en mutation continue. Dans le cadre de cette banalisation des communs, des droits et de la vie, le risque est élevé que l’Université soit conçue et réduite à un système complexe de production et diffusion [payante, dans le marché] des savoirs et des compétences par les laboratoires et les plateformes des universités et leurs réseaux formellement auto‑organisés en systèmes collaboratifs, mais en réalité, marchands/financiers privés. Elles sont ainsi destinées à devenir les lieux de la nouvelle culture technoscientifique managérielle. Les « pôles de compétitivité » interuniversités de partenariat dits public-privé autour de l’eau, nés surtout en France ces vingt dernières années, constituent un exemple précurseur de cette techno-scientification managérielle marchande de l’Université.
Une réflexion forte à ce sujet s’impose.