1705 – 8 mai, Neuchâtel
Cote : AVN B 101.14.001, fol. 601r‑605v
SDS NE 3 17050508 [En ligne] URL : https://www.ssrq-sds-fds.ch/exist/apps/ssrq/NE/SDS_NE_3_17050508.xml.
Touchant les testamens.
Sur la requeste presentée à messieurs le maitre bourgeois et Conseil Etroit de la Ville de Neufchastel par le sieur David Dupaquier, notaire bourgeois de ladite ville, agissant au nom du sieur Jaques Baron, bourgeois de Blaye en Guyenne, tendante aux fins d’avoir declaration de la coutume dudit Neufchastel sur les points et articles suivans.
1. Si dans la souveraineté de Neufchatel l’on juge suivant le droit romain ou suivant une coutume locale ?
2. Si par la coutume de Neufchastel, l’on n’entend pas tant les anciennes usances qui ne sont point redigées par ecrit, que les declarations rendues par messieurs du Conseil Etroit de cette ville et qui se trouvent par ecrit scelées du seau de la ville et signées par le secrétaire de ville, ou vidimées et collationnées sur l’original par un notaire fameux ?
3. Si une personne qui veut faire un testament ne doit pas estre en bon sens, de franche et libre condition, âgée de dix neuf ans accomplis, disposer de chose qui soit en sa puissance, [fol. 601v] sans sollicitation, ni induction de personne, et si le notaire ne doit pas faire mention de cet état et disposition dans ledit testament ?
4. Si un testateur n’est pas obligé de nommer specifiquement par nom et surnom tous les heritiers et legataires à peine de nullité de son testament ?
5. Si le testateur n’est pas obligé d’exhereder aussi nommément et specifiquement tous ceux, qui autrement seroient ses heritiers legitimes et ab intestat, et leur laisser au moins à titre de proprieté cinq sols faibles1 en departement de ses biens ?
6. Si le testateur n’est pas obligé de faire les denominations susdites à haute voix de sa propre bouche et en presence des témoins et du notaire, ou s’il peut les donner par écrit pour ensuite estre revetues par un notaire des solemnités necessaires ?
7. Si dans tous les testamens il n’y doit pas y avoir une institution d’heritier apres les legataires, avec charge de payer et acquitter les dettes d’un defunct ?
8. Si, avant la Reformation, il estoit en ce [fol. 602r] pays permis de donner son bien a son confesseur, ou s’il l’est encore dans les lieux de ce pays où la religion catolique romaine est encore professée ?
9. Si une disposition faite au profit des enfans d’un tiers, sans designer ny par leurs noms, ni par leur nombre, ni par leur sexe peut subsister par la coutume du pays ?
10. Si l’on peut leguer l’usufruit d’un bien à une personne, à la charge de laisser parvenir apres sa mort la proprieté de ce bien aux enfans qu’elle a dans le tems de la disposition, et si une telle disposition ne tient pas de la substitution deffendue par la coutume du pays ?
11. Si n’estant pas fait mention dans ledit testament qu’il a esté lu et ensuite reconu par le testateur et les témoins, cela n’est pas une nullité essentielle au testament ?
12. En quel degré les témoins peuvent estre parens du testateur, des legataires, de l’heritier institué et du notaire ?
13. Si un testament sollemnel doit estre [fol. 602v] revestu de la signature du testateur et des témoins avec celle du notaire ?
14. Si l’on ne doit pas faire apposer le seau de la seigneurie à l’acte que l’on veut produire sur le jour fatal, ou produire attestation qu’on la demandé à la seigneurie.
15. Si un heritier institué et tous ceux qui ont des pretentions en la succession d’un defunt par droit de proximité ou autrement, ne doivent pas estre munis et pourvus de leurs droits, titres et informations sur le jour fatal, et s’ils ne les font pas, ils ne sont pas entierement privés et dejettés.
16. Si le jour fatal n’est pas le quarantième jour apres l’ensevelissement du defunt, et au cas que ledit defunt soit enseveli le dimanche, s’il ne faut pas demander l’investiture le samedi devant.
17. Si les absens de l’État de Neufchatel sont obligés de se presenter sur ledit jour fatal, et s’ils n’ont pas un an et six semaines à compter ou dès le jour de la mort du defunt, ou dès le jour qu’ils ont appris cette mort.
18. Si l’heritier institué ne doit pas presenter [fol. 603r] sur le jour fatal, or et argent sur tables pour payer les legs, ou faire offre de les payer.
19. Si un legataire est obligé sans distinction de prendre la possession en investiture sur le jours fatal en justice, tant des meubles que des immeubles à lui legués ?
20. En quel tems un legataire peut il demander à l’heritier la delivrance de son leg, et dans quel tems l’heritier peut il lui opposer la prescription.
21. Si un testament nul en un point, [...]d ne l’est pas en tous.
Mesdits sieurs du Conseil, ayant eu avis par ensemble, donnent par declaration, que de tout tems immemorial de pere à fils jusqu’a present, la coutume de Neufchastel est telle.
Assavoir, sur le 1. et 2. article que, en jugeant, on ne suit pas le droit romain, mais bien la coutume particuliere et ancienne ecrite et non ecrite usitée dans cette souveraineté.
[fol. 603v] Sur le 3. Une personne, pour pouvoir valablement faire testament, donnation ou autre disposition de ses biens, doit avoir pour le moins dix neuf ans accomplis, et il doit estre de condition franche et en bon sens, sans estre induit, sollicité ni contraint, et il convient qu’elle dispose de chose qui soit en sa puissance et disposition, autrement le testament, donation ou autre disposition de bien sont deffectueux.
Sur le 4. 5. et 6. Celui, (n’ayant point d’enfans) qui veut exhereder de ses biens aucuns de ses plus proches parens, lesquels à deffaut d’enfans legitimes devroient estre selon le droit de nature ses heritiers legitimes et ab intestat s’il n’en estoit disposé autrement, il les doit specifiquement nommer, et declarer ce qu’il lègue et ordonne à un chacun d’eux en département de ses biens, l’or, argent, obligations, terres ou autres choses et pour le moins la valeur de cinq sols foibles.
Sur le 7. dans tous les testamens il y doit avoir institution d’heritier, et celui qui en consequence se porte heritier d’un defunt est obligé d’acquitter les dettes et les legs dudit defunt.
[fol. 604r] Sur le 8. Toute personne qui est de franche condition et qui n’a point d’enfans peut tester et disposer de tous ses biens et les donner à qui il lui plait, excepté à moines blancs.
Sur le 9. Une disposition faite au profit des enfans d’un tiers qui est clairement et specifiquement nommé peut subsister, sans qu’il soit necessaire d’une plus particuliere designation desdits enfans.
Sur le 10. On peut disposer d’un bien fond et donner la proprieté à une personne, et leguer l’usufruit dudit bien à une autre personne, sans que cela puisse passer pour substitution.
Sur le 11. il n’est pas de pratique que le notaire énonce que le testament a esté lu.
Sur le 12. le notaire qui reçoit un acte testamentaire, ne doit estre plus près qu’au quatrième degré de parentage avec le testateur et avec l’heritier institué. Et les témoins qui sont appellés à la passation dudit acte, ne doivent estre plus près qu’au tier en quart degré de parentage avec le notaire, avec le testateur et avec l’heritier institué par ledit testament.
[fol. 604v] Sur le 13. Il n’est pas necessaire qu’un testament passé par main de notaire en presence de cinq témoins non suspects soit signé du testateur ni des témoins.
Sur le 14. 15. 16. 17. et 18. Celui sachant la mort d’un defunt, qui pretend avoir action à la succession d’icelui, par droit de proximité, ou en vertu d’un testament ou donation, doit demander la mise en possession et investiture en justice de son pretendu sur le jour des six semaines de l’ensevelissement du defunt, muni de ses droits et informations. Et quand un defunt est enseveli par un jour de dimanche, la mise en possession et investiture se doit demander le samedi precedent le jour des six semaines, qu’est la veille d’iceluy. Et en demandant la mise en possession et investiture sur ledit jour, en vertu d’un testament, donnation ou autre disposition de biens, il doit produire en ouverte justice l’acte seelé du seel de la seigneurie, ou à ce deffaut, attestation de la recherche qui en auroit esté faite. [fol. 605r] Et l’heritier testamentaire ayant produit son acte en due forme, doit sur ledit jour presenter or et argent sur table en justice pour satisfaire les legs pecuniaires en son tems, s’il y en a, ou au moins faire offre de les payer suivant l’ordonnance testamentaire. Et estant dans le lieu et ils ne s’approche pas sur ledit jour pour demander la mise en possession et investiture, estant bien certioré du trépas du defunt, il ne pourra aucunement avoir accès au bien d’icelui, ains il en est entierement et pour le tout privé et dejetté. Mais celui qui n’est pas dans le lieu, il a an et jours qu’est un an et six semaines pour s’approcher et demander la mise en possession et investiture du bien delaissé par le defunt, alors venant dans ledit tems, il peut jouir de son pretendu. Et s’il ne vient dans ledit terme d’un an et six semaines à compter du jour de l’ensevelissement, ains le laisse passer et expirer, il est entierement frustré de la succession dudit defunt et il n’en peut avoir aucune part, s’il n’en est relevé par la justice souveraine.
Sur le 19. à l’egard des legataires, la pratique n’a pas esté bien fixe jusqu’à present, les uns en ayant demandé la mise en possession et investiture et les autres ne l’ayant pas fait, sans que pour cela ils ayent perdu leurs legs.
[fol. 605v] Sur le 20. les legs portés dans un testament se doivent payer au tems et terme que le testateur l’ordonne, moyennant qu’il n’y ait aucun usufruit sur les biens d’icelui. Cependant un heritier testamentaire d’un defunt n’est pas obligé de payer les legs portés au testament au terme designé dans icelui lors qu’il y a procès ou cause intentée pour annuller ledit testament, ains seulement à la fin de la cause ou procès. Et la prescription n’arrive qu’au bout de dix ans à compter dès le jour que l’heritier est ivestu et reconu.
Sur le 21. Quand un testament est deffectueux en un point essentiel, il est censé estre deffectueux en tous.
Laquelle declaration, mesdits sieurs du Conseil ont ordonné à moy, secrétaire de ville soussigné, d’expedier en cette forme, munie du seau de la mairie et justice dudit Neufchastel, à Neufchatel le 8. may 1705.
L’original est signé par moy.
[Signature :] Jean‑Jacques Favargier [Seing notarial].