Construire le lien social à distance

Un des défis au sein d’une formation hybride pour la formation d’enseignants en langues

Creating a Social Bond Online: a Major Challenge in Blended Learning for the Training of Language Teachers

DOI : 10.52497/kairos.163

Résumés

En contexte de formation à hybride et d’un point de vue socioconstructiviste vygotskien, le lien social à distance est fondamental à l’apprendre ensemble. Par conséquent, un des défis à relever pour ce type de formation sera de créer le lien social et de le maintenir durant toute la durée de la formation, sachant qu’il dépend de plusieurs paramètres d’ordres technologique, humain et culturel difficiles à contrôler. De par la nature, la forme ou la configuration qu’il peut prendre, le lien social à distance influence l’apprenant. Totalement ou partiellement instauré entre les participants, il garantit une dynamique pédagogique, alors que la non-participation aux échanges peut exprimer le choix d’exister autrement au sein du dispositif, ce qui n’empêche pas pour autant de se construire. Notre étude basée sur l’analyse d’un dispositif de formation à distance d’enseignants de langue en Guyane française permettra de vérifier comment se met en place ce lien social et à partir de quelles modalités, en vue de « l’apprendre ensemble ».

In the context of blended learning, from a socio-constructivist perspective (Vygotsky), the social link at a distance is of paramount importance to learn together online. As a result, one of the challenges with hybrid systems is to create this social link and maintain it throughout the course of the training as it depends on technological, human and cultural parameters that are difficult to be controlled. Due to its nature and configuration, the social link created at a distance influences the learner. Totally or partially established between the participants, it guarantees an educational dynamic, whereas non-participation in exchanges can express the choice to exist differently, which is somehow a way to build oneself. Our study, based on the analysis of a distance learning environment for the training of language teachers in French Guiana will allow us to analyse how the social link can be established, based on which modalities, in order to ‘learn together’.

Index

Mots-clés

apprentissage à distance, communication médiatisée par ordinateur (CMO), interaction sociale à distance, scénario de communication, tutorat

Keywords

distance learning, computer-mediated communication (CMC), online social interaction, communication scenario, tutoring

Plan

Texte

Introduction

Notre contribution s’intéresse au rôle joué par le lien social en contexte formatif hybride qui se crée grâce aux interactions sociales entre acteurs via les technologies de l’information et de la communication (TIC). Dans un dispositif hybride1, les interactions sociales entre participants, en présentiel et à distance, permettent à la fois la mise en discours et l’apprentissage. Nous présenterons « l’environnement d’apprentissage » que nous étudions, au sens de Mangenot (2009), selon les axes social et technologique qui prennent en compte la relation entre le sujet et l’artefact (Rabardel, 1995), et les relations susceptibles de se construire entre les acteurs selon leurs caractéristiques socioprofessionnelles et leurs objectifs propres. Un des défis de l’ingénierie pédagogique est de concevoir un environnement d’apprentissage propice à l’établissement et au maintien du lien social en tenant compte de ces deux dimensions.

Notre recherche-action a pour objet d’étude un dispositif médiatisé à distance de type hybride qui s’échelonne sur deux années, de 2013 à 2015, et qui vise la formation en Guyane française d’enseignants de langue du secondaire en poste non titulaires2. La démarche vise l’amélioration des pratiques du cours de langues vivantes étrangères (LVE) en cherchant à parfaire l’organisation pédagogique de ces enseignants qui intervient en amont du cours de langues. Notre recherche analyse les effets du dispositif sur la formation de ces enseignants, et dans cette optique, nous verrons que la création du lien social entre les sujets participants est un élément important qui permet « l’apprendre ensemble ».

La formation hybride étudiée comporte un volet distantiel majoritaire3, ainsi nous nous intéresserons plus largement à la construction du lien social à travers l’analyse des interactions écrites des participants ayant eu lieu à distance. Nous montrerons également le rôle joué par les interactions sociales intervenues en partie présentielles, mais dans une mesure moindre.

Importance du lien social en formation à distance (FAD)

Dans un premier temps, nous précisons de quelle manière la notion de « lien social » sera abordée dans le contexte formatif qui est le nôtre. Paugam (2008, p. 63) explique que chaque type de lien social peut se définir à partir de deux dimensions qui sont la protection et la reconnaissance, qu’il résume à l’aide de deux expressions :

L’expression « compter sur » résume assez bien ce que l’individu peut espérer de sa relation aux autres et aux institutions en termes de protection, tandis que l’expression « compter pour » exprime l’attente, toute aussi vitale, de reconnaissance.

Dans ce cadre formatif, nous pouvons penser que les interactions sociales intervenant entre nos apprenants vont aider à la création « d’un lien de participation organique » tel que défini par Paugam (op. cit., 64), qui unit « les acteurs de la vie professionnelle » d’enseignants de langue non titulaires, dans notre cas précis. Ainsi, les participants pourront non seulement compter sur leurs pairs et leurs tuteurs pour communiquer et échanger en fonction de leurs besoins mais ils compteront, au sein de la communauté de pratiques, pour un membre actif et reconnu de cette communauté.

Au sein du dispositif hybride, les notions de distance et de présence sont imbriquées l’une à l’autre pour permettre à l’acte social de s’établir en présentiel et/ou à distance. Il est en effet fondamental que des rapports sociaux se créent entre les participants du dispositif pour qu’ils puissent apprendre ensemble. Les interactions entre apprenants peuvent agir comme stimulus cognitif et contribuer à déclencher des pratiques pédagogiques collaboratives. Ainsi, en contexte éducatif, le lien social joue un double rôle communicationnel et formatif. En FAD, il permet « l’apprendre ensemble » lorsque la relation pédagogique médiée entre apprenants et enseignants s’établit puis se maintient via des outils techniques favorisant les échanges synchrones (chat, visioconférence…) et asynchrones (courriel, forum…).

Les signes de présence à distance

La FAD permet l’apprentissage à des apprenants qui sont « empêchés » (Paquelin, 2011, p. 557) de suivre une formation présentielle pour des raisons diverses (éloignement géographique, raisons économiques, choix personnels). Ainsi, la notion de distance physique est au centre du contexte d’apprentissage puisqu’il dépend d’elle pour exister. Cependant, dans le but de pallier le manque physique d’enseignant et de rapprocher les participants les uns des autres, on cherche à « apprivoiser » la distance (Jacquinot, 1993, p. 56).

La complexité de la notion surgit dans le paradoxe qu’elle induit car elle est à la fois une réponse à un problème posé qui est de permettre l’apprentissage à des apprenants en dehors d’une salle de cours, mais pose à son tour une autre question : comment combler l’absence créée par la distance spatiale entre les acteurs de la relation pédagogique ? Par ailleurs, la distance en FAD est plurielle : l’environnement éducatif induit d’autres types de distances que celles qui viennent immédiatement à l’esprit, comme les distances spatiale, physique et temporelle. Les travaux de Moore puis de Jézégou se penchent sur la distance transactionnelle, définie comme un « espace psychologique et communicationnel entre l’enseignant et l’apprenant mais aussi entre les apprenants, dans une situation éducationnelle » (Moore, 1993, p. 23). Cette distance transactionnelle renvoie aux variables de structure et de dialogue ou, en d’autres termes et selon Jézégou (2007), au degré d’ouverture de l’environnement éducatif et au niveau de présence des interactions entre les acteurs.

Jacquinot (1993, p. 57) répertorie six autres distances, outre la distance transactionnelle, dont nous classons les types et les caractéristiques dans le tableau ci-dessous :

Tableau 1. Les caractéristiques des types de distance d’après Jacquinot (1993).

Type de distances Caractéristiques
Spatiale/physique Écart géographique entre deux personnes induisant une absence, un manque par rapport à une formation en face à face.
Temporelle Décalage entre le temps de l’apprentissage et le temps pédagogique qui s’étale ou se raccourcit selon le rythme ou l’envie de l’apprenant.
Technologique Difficultés de conditions d’accès aux TIC et/ou à l’intégration des TIC.
Socioculturelle Socio-économique Frein au droit à l’éducation pour tous, quel que soit le milieu social, l’âge ou les expériences professionnelles et scolaires.
Pédagogique Distance physique/psychologique entre tuteurs et apprenants, et entre apprenants.
Cognitive Prise de recul permettant la réflexion métacognitive.
Transactionnelle Faible ou forte en fonction du niveau d’ouverture du dispositif et de la relation éducative/sociale de l’environnement éducatif.

Le syntagme « distance » est polysémique par nature (Paquelin, 2011) et ce sont donc des distances, quelles que soient leurs natures, que l’on va chercher à apprivoiser en FAD. En premier lieu, cela se traduit par le fait de rendre la relation pédagogique possible entre les acteurs du dispositif médiatisé à distance. Pour l’apprenant, il s’agit d’interagir au sein du dispositif avec le tuteur et les pairs en exploitant les potentiels pédagogiques du dispositif (Henri, 2010, p. 164). Pour ce qui est de l’enseignant, il doit chercher à ce que la relation se bâtisse à travers « les ressources d’apprentissage, le scénario pédagogique et les interventions du tuteur. » (op. cit., p. 165). Ainsi, si le lien social est primordial en formation en présentiel, il l’est d’autant plus en FAD puisque sans lui, il n’existe pas de relation pédagogique. En formation hybride, l’absence physique du formateur en modalité distantielle, à l’inverse du présentiel où le formateur se trouve face à ses apprenants, est palliée par « une invisible présence » (Rinaudo, 2009, p. 5). Elle se situe entre l’absence totale du formateur = 0 et la co-présence = 1 comme le suggère Jacquinot-Delaunay (2001). Nous pouvons penser que d’autres degrés de proximité entre ces deux coefficients (0 et 1) existent en fonction des modalités choisies et des outils mis en place au sein du dispositif hybride, ce qui permet d’imaginer d’autres présences qui correspondent, comme le dit Weissberg (2001, p. 32) « aux diverses solutions intermédiaires entre l’absence et la présence strictes ».

Blandin (2004, p. 365) nous propose de concevoir le partage de « l’ici et maintenant » de la relation pédagogique à distance selon quatre modalités de présences diverses :

  • Face à face en mode présentiel : il y a partage effectif d’un ici et maintenant ;
  • Présence virtuelle : il y a partage d’un maintenant et d’un espace virtuel, les ici des protagonistes étant différents ;
  • À distance synchrone : il y a partage d’un maintenant, mais les ici des protagonistes sont différents ;
  • À distance asynchrone : il y a échange de signaux et/ou de messages qui rendent compte4 d’ici et maintenant différents.

Ainsi, ces présences à distance positionnent la présence physique comme « une » des dimensions de la présence (Jacquinot-Delaunay, 2001), tout comme le fait que la distance se pose comme une dimension de la présence. La présence corporelle de l’enseignant face à son public, donc dans une situation supposée de partage de l’ici et maintenant, ne garantit pas toujours une relation constructive, la présence est donc empreinte d’une distance, preuve en est l’attitude rêveuse de certains apprenants… ou le manque de disponibilité de l’enseignant.

Les six types de présences nécessaires au processus d’apprentissage à distance selon Kawachi (2011, p. 593), sont la présence institutionnelle, de l’apprenant, cognitive, socio-affective, transactionnelle et pédagogique. Ainsi, la notion de distance qui sépare s’efface au profit d’une notion de proximité qui relie si l’on parvient à garder entre les protagonistes de la relation une « distance proximale » telle que définie par Paquelin (2011, p. 566) :

Se situer ni trop loin ni trop près d’autrui, mais dans un espace-temps social qui délimite et contient la zone d’activités participative des sujets qui correspond à ce que les acteurs sont en capacité de réaliser à la fois individuellement et collectivement pour répondre à un besoin.

Garder la bonne distance proximale, c’est garder une flexibilité temporelle dans le rythme des interactions car « chacun avance à son rythme et les tempi différents peuvent déclencher de l’instabilité, des malentendus, des non-dits… » (Charrier et Lerner-Sei, 2011, p. 423). Lorsque cet équilibre proximal est trouvé, la présence ainsi créée permet au lien social d’exister autrement qu’en validant l’ici et le maintenant. De fait, nous pensons que l’évolution du sens de la notion de distance se traduit, comme le dit Peraya, (2014, p. 8) par « un nouveau paradigme, celui de la présence dans la distance ».

Construction d’apprentissages

En didactique des langues, les interactions en ligne produites par les sujets d’une formation concernent le champ de l’apprentissage des langues médiatisé par les technologies (ALMT), ou assisté par ordinateur (CALL)5.

Dans cet article, nous nous référons plus précisément aux travaux de recherche de la Communication médiatisée par Ordinateur (CMO)6, qui se focalisent sur « l’utilisation d’ordinateurs mis en réseau à des fins de communication » (Guichon, 2012, p. 150).

Les outils de la CMO qui sont mis à disposition pour l’apprentissage et la communication de nos stagiaires vont permettre de tisser le lien social à distance, car comme le souligne Peraya (2008, p. 3) « tout acte pédagogique, à l’instar de tout acte de communication, comporte un important aspect relationnel ». Autrement dit, la communication sert à l’apprentissage et réciproquement du fait du double statut de la langue, dont nous parlons ci-après.

La communication médiatisée permet aux apprenants d’échanger quand et où ils le souhaitent étant donné l’éclatement des unités spatio-temporelles généré par les distances physique et temporelle dont nous parlions antérieurement. Dans le cadre formatif, le fait de communiquer aide à construire l’acte social qui permet aussi une coconstruction des connaissances.

Prenons l’exemple des échanges sociaux intervenant entre apprenants dans le cadre de l’apprentissage d’une L2. Dans ce cas, « les échanges collaboratifs sont l’objet d’apprentissage » (Rivens Mompean, 2013, p. 185) puisque les interactions produites par les apprenants peuvent se transformer en ressources authentiques d’apprentissage. Cet exemple illustre le double statut de la langue étrangère, qui apparaît comme objet et moyen d’apprentissage.

Pour ce qui se réfère à notre objet d’étude, les enseignants de langue ont la possibilité de s’entraider et de communiquer sur leur travail, leur expérience et leurs pratiques. Lorsque le lien social s’établit entre eux, il permet de construire une communauté virtuelle qui peut être considérée comme un lieu d’apprentissage (Henri et Pudelko, 2003), où la mise en commun des pratiques participe à co-construire les connaissances des acteurs du groupe.

Le socioconstructivisme de Vygotsky dont la théorie se réfère à la psychologie du développement humain nous apprend que l’homme est un être social dès la naissance et qu’il ne se construit qu’à travers les interactions sociales qu’il peut entretenir avec son environnement (Vygotsky, cité par Ivic, 1994, vol. IV, p. 281) :

Les relations de l’enfant avec la réalité sont dès le début des relations sociales. Dans ce sens, on pourrait dire du nourrisson qu’il est un être social au plus haut degré.

Ainsi, l’enfant se développe parce qu’il est en contact avec les adultes, ce qui l’aide à construire en commun lors d’activités partagées.

Vygotsky montre que le processus d’intériorisation de l’apprentissage (l’interpsychique) se construit par l’individu lors d’interactions sociales : le passage de l’interpsychique vers l’intrapsychique permet au sujet de transformer le langage, outil de la relation sociale, en outil d’organisation psychique intérieure et donc de faire apparaître le langage privé, la pensée verbale, la mémoire (Ivic, 1994). Le développement cognitif résulte de l’apprentissage qui se produit lors d’interactions sociales selon un modèle de relation entre trois éléments : individu-tâche-alter (Roux, 2002).

Nos enseignants en langues engagés dans une formation hybride au long cours sont accompagnés par un tuteur et invités à interagir avec lui et leurs pairs via leur messagerie électronique ou un forum de discussion d’une plateforme pédagogique Moodle. Ainsi la communication socio-cognitive va permettre des échanges symétriques (entre non-experts) et/ou dissymétriques (entre non-experts et experts) et accompagner l’apprenant dans son cheminement cognitif propre.

Contexte d’apprentissage

Le contexte culturel, ici le contexte d’apprentissage, met en relation des intervenants de la même famille professionnelle mais aux statuts dissymétriques : apprenants non titulaires et tuteurs-enseignants titulaires. La communication pédagogique qui va s’instaurer au sein du contexte détermine le genre de discours qui sera adopté par les intervenants lors des échanges.

En effet, selon Mangenot (2008), la communication pédagogique possède ses propres usages, ses genres de discours, qui viennent d’autres domaines. Il est donc possible de prévoir certains des choix discursifs qui seront effectués par les intervenants dans ce contexte précis, du moins au démarrage de la formation, ce qui aide à concevoir le scénario de communication et à choisir les outils de communication. Ces choix discursifs peuvent concerner le mode d’échanges ou le registre du discours ainsi que les thèmes abordés (Ladmiral et Lipiansky, 1989).

Comment construire le lien social en FAD ?

Dans le contexte pédagogique qui nous occupe, le lien social se construit à travers les interactions sociales (une mise en discours), lors des rencontres en présentiel ou grâce aux outils de la CMO en modalité distantielle. La CMO a une double fonction d’instrument social et d’apprentissage. Voyons comment ces outils participent à atteindre les objectifs du cohabiter et du coagir (Puren, 2002).

Les rôles des TIC

En FAD, les TIC jouent un rôle ambivalent. D’un côté, elles facilitent le rapprochement des sujets entre eux, et de l’autre, elles peuvent aussi représenter un frein à la création du lien social.

Au niveau méso du dispositif, on cherche à pallier l’éclatement spatio-temporel créé par les distances physique, temporelle et pédagogique via des outils TIC de plus en plus variés et performants et à créer un « espace d’exposition discursive » (Develotte, 2006) propice aux interactions. Pour ce faire, les dispositifs proposent des modes de communication adaptés aux outils choisis par le concepteur dont voici quelques exemples :

  • Le mode one-to-one : échange individuel avec un locuteur/un interlocuteur (courriel, visioconférence).
  • Le mode one-to-many : échange participatif avec un locuteur/plusieurs interlocuteurs (forum de discussion, clavardage).
  • Le mode many-to-many : échange collectif avec plusieurs locuteurs/plusieurs interlocuteurs (wikis, visioconférence, forum).

La temporalité peut être en synchronie et/ou en asynchronie et les modalités écrite et/ou orale, audio/vidéo sont envisageables.

Ces choix tiennent compte des critères d’affordance technologique au sens de Gibson (1977), c’est-à-dire de la faisabilité à relier d’un côté les moyens offerts par l’artefact et de l’autre les possibilités qu’ont les sujets de les utiliser. Tenir compte de la notion d’affordance aide à choisir le bon outil selon le contexte pédagogique et le public visé. En outre, la théorie de la genèse instrumentale de Rabardel (1995), qui considère les possibilités de construction du processus d’appropriation de l’artefact par le sujet (l’instrumentalisation) et l’usage qu’il peut en faire (l’instrumentation), aide à définir le type de pratiques associées à tel ou tel outil et dans quel but. En effet, l’instrument n’est pas transparent et entraîne des modifications dans les manières de faire (Cretin-Pirolli et Cottier, 2009).

Au niveau micro des apprenants, les cultures d’usage7 au sens de Thorne (2003) sont propres à chaque acteur. En conséquence, les schèmes d’utilisation de l’outil comme son appropriation varient en fonction de l’individu (Rabardel, 1995 ; Guichon, 2012) mais peuvent aussi être influencés par des éléments extérieurs. À titre d’exemple, un contexte personnel motivant, un contexte professionnel valorisant la pratique instrumentée par les TIC peuvent influencer l’appropriation et valider – ou non – la relation homme-machine.

Par contre, des représentations négatives des outils par les apprenants font émerger des problèmes de face, d’image de soi et de liberté de parole dans un espace communicatif contraint (Herring, 2004 ; Marcoccia, 2001, 2004) qui peuvent interférer avec la participation active, laissant la place à ce que Wenger (1998) nomme la participation périphérique et marginale.

D’autre part, nous savons que les registres de langues interagissent avec le média (Kern, 2006) et qu’ils modifient la communication, car l’environnement technologique « préformate le format et le contenu des échanges » (Develotte, 2006). On observe le phénomène de « double contrainte » au sens de Rivens Mompean (2013, p. 193) qui empêche la spontanéité de l’échange et incite l’apprenant à adopter un langage formel associé au contexte d’apprentissage plutôt qu’un langage informel associé à l’outil (blog, forum…).

L’ingénierie pédagogique

En FAD, l’ingénierie pédagogique a pour visée de relier chaque entité du dispositif de façon à ce qu’elles forment un tout efficace en fonction des objectifs recherchés par la formation. Nous nous limiterons ici aux trois entités présentes au sein de notre dispositif hybride qui participent à faire exister le lien social.

Le contrat pédagogique est l’élément phare du dispositif, il décrit les tâches à effectuer par les apprenants, explique les buts à atteindre et définit la « cohérence » du projet global. Il est conseillé que le contrat pédagogique soit suffisamment détaillé de façon à articuler les logiques pédagogique et informatique (Bourdet, 2014), ce qui peut paraître trop « encadrant » et alors freiner les interactions spontanées (Loizidou, 2013).

Le scénario de communication doit inciter les interlocuteurs à interagir ensemble. Pour ce faire, il définit les moyens de faire communiquer les acteurs de la formation : rôle et place des acteurs, moment, durée, contenu, espaces et modalités des communications ainsi que les paramètres d’utilisation des outils de la CMO (Tricot et al., 2003 ; Mangenot, 2008). Le scénario prévoit des échanges en ligne qui sont susceptibles de se produire (Dejean et Mangenot, 2006) et propose des activités sociales sous diverses formes en fonction des artefacts choisis par le groupe (Nissen, 2006). Il aide à trouver la distance proximale (Paquelin, 2011) et détermine la médiation relationnelle entre les sujets (Charlier et al., 2006 ; Marcoccia, 2001). Le scénario favorise ce que Paquelin (2011, p. 574) nomme « la proximité organisationnelle » qui met en scène l’interaction entre apprenants et tuteurs, « structurant ainsi les échanges et les activités » (ibid.). Au sein du dispositif de formation analysé, cette proximité organisationnelle peut se traduire par la présence de ressources matérielles (mise à disposition d’outils TIC, de supports pédagogiques…) et cognitives (présence et aide de tuteurs), ainsi que par la coordination (médiation au long cours, diversité des modalités d’échanges : synchrones, asynchrones). Ces éléments vont contribuer à initier, à maintenir la communication entre les acteurs du dispositif et de cette façon aider à ce que le scénario de communication puisse fonctionner.

À la lumière de la théorie socioconstructiviste, la proximité organisationnelle peut aussi inciter les apprenants d’une même formation, bénéficiant de ressources communes et d’une coordination efficace, à s’engager dans une communauté de pratiques et s’impliquer dans un travail collaboratif. En effet, le choix, la variété, la pertinence des ressources matérielles, la qualité de la coordination (personnalité, efficacité, réactivité, souplesse, disponibilité…) sont des éléments qui peuvent aider les apprenants à s’investir dans la poursuite d’un objectif commun.

La création d’une communauté de pratiques au sens de Wenger, (1998) favorise le lien social par l’engagement mutuel, l’entreprise conjointe et le répertoire partagé (op. cit., p. 73). Nous transposons ces dimensions au contexte formatif du dispositif médiatisé à distance avec l’engagement mutuel qui amène les apprenants à agir dans le but d’accomplir des tâches ensemble en partageant des compétences, en s’entraidant… Cet engagement peut prendre la forme d’interactions sociales en ligne favorisant la construction des savoirs entre apprenants et tuteurs (Hoadley, 2012). Notons que cet engagement mutuel implique non seulement une coexistence harmonieuse tout comme des conflits et des désaccords. L’entreprise conjointe, c’est la formation suivie par le groupe d’apprenants et qui les lie « à faire ensemble ». Enfin le répertoire partagé renvoie à la façon dont la communauté a réussi à faire et à apprendre ensemble, à cohabiter et coexister. Il peut s’agir du choix des artefacts pour communiquer, du type de discours utilisé, des problèmes rencontrés… Le répertoire partagé aide à sonder l’efficacité du contrat pédagogique et du scénario de communication en mettant en évidence les traces de l’engagement mutuel laissées par les acteurs du dispositif de formation.

Le lien social en contexte d’expérimentation

Méthodologie

Présentation du dispositif

Notre dispositif hybride propose de former des enseignants du secondaire de langues vivantes étrangères non titulaires en poste et répartis sur tout le territoire du département guyanais. L’essentiel de la formation s’est déroulée via des modalités distantielles. Le dispositif analysé a duré deux ans à raison de sept mois par an, d’octobre à avril. Les enseignants se répartissent en deux groupes différents de 12 stagiaires la première année et de 16 la seconde. Afin d’aider ces enseignants stagiaires8 à mieux préparer leurs séances, séquences et progressions annuelles pédagogiques9, le contrat pédagogique prévoit la réalisation de trois productions à des dates fixées par planning défini et leur envoi par voie numérique à leur correcteur. Les stagiaires disposaient de ressources diverses déposées sur la plateforme pédagogique (diaporama du cours de didactique, aide méthodologique, conseils de présentation des productions, ressources pédagogiques numériques, liens…) Ces tâches ont été effectuées durant la phase distantielle de la formation, durant laquelle les stagiaires ont été invités à échanger entre eux et avec leur tuteur selon le scénario de communication incitatif mais non injonctif. L’idée est ici de s’entraider, de partager conseils et idées et de rompre l’isolement. Trois sondages en ligne, planifiés peu après les trois dates de devoirs à rendre, ont également été proposés au groupe. La phase présentielle était constituée de deux rencontres d’une journée chacune, intervenant en début et fin de formation. La rencontre qui ouvre la formation a permis de faire connaissance, de présenter la formation et les tâches à effectuer ainsi que les outils TIC (courriel académique et plateforme), de lier contact entre les stagiaires par le biais de discussions sur les pratiques du métier, sur les expériences de chacun… Les stagiaires ont également été invités à se présenter sur le forum de discussion afin de se familiariser avec l’outil, surtout pour les novices. Pour la rencontre de clôture, un travail collaboratif de rétrospection ainsi que des bilans oraux et écrits sous forme d’entretiens semi-directifs et de questionnaire ont été effectués.

Méthodologie de recherche

Afin d’identifier les traces de présence du lien social au sein du groupe des 28 stagiaires10 engagés dans une formation hybride, nous avons réalisé une étude quantitative et qualitative11 de leur participation sociale en modalité distantielle à travers leurs discours en ligne écrits asynchrones sur forum et courriel académique. Ce corpus de données fut croisé avec les échanges écrits des stagiaires recueillis via le courriel académique et sur la plateforme lors de la première rencontre en présentiel où il était question de se présenter aux autres stagiaires, et en fin de formation à l’aide d’un questionnaire dont les réponses affinent les résultats de l’étude. Le questionnaire de fin de formation comporte quatre parties :

  • Partie 1 : Renseignements personnels sur les sujets (cursus, parcours et projet professionnels) : questions présentées sous forme de questions à choix multiples et questions ouvertes ;
  • Partie 2 : Informations sur les outils TICE (appropriation, usage, difficultés, avis sur les outils offerts par la formation…) : questions ouvertes et fermées, questions utilisant les échelles de Likert de type : « tout à fait d’accord » – « pas du tout d’accord » ;
  • Partie 3 : Appréciations de la formation : questions ouvertes et fermées, échelles de Likert : « tout à fait satisfaisant » – « pas du tout satisfaisant » ;
  • Partie 4 : L’apport de la formation (amélioration de l’organisation pédagogique, travail en autonomie, effets sur les pratiques d’enseignement, création du lien social entre collègues enseignants…) : questions ouvertes et fermées, QCM et échelles de Likert.

L’analyse quantitative prend en compte le nombre de productions rendues par stagiaire sur la durée de la formation ainsi que le nombre de discussions de forum et de courriels déposés et envoyés par les stagiaires. L’analyse qualitative s’intéresse aux discours des stagiaires qui permettent d’observer les processus d’appartenance communautaire au sens de Wenger (1998) qui aident le lien social à se tisser.

L’utilisation des TIC en contexte d’apprentissage

Au niveau quantitatif, le premier résultat qui émerge de nos données montre que 61 % des stagiaires se sont engagés à la réalisation des tâches de productions pédagogiques écrites qui leur étaient confiées. Ce résultat correspond au nombre de devoirs12 rendus en ligne via les outils TIC sur les deux ans de la durée de formation (2013-2015) et nous indique que les stagiaires se sont correctement approprié les outils mis en place pour l’envoi de leurs devoirs, ce qui n’allait pas de soi surtout pour l’envoi des fichiers via la plateforme Moodle, inconnue de 30 % des stagiaires.

Pour ce qui est du corpus des messages, après observation directe des prises de parole en ligne selon l’outil choisi, les stagiaires ont adressé 85 messages via le forum de discussion, et 163 courriels furent comptabilisés. Nous précisons que le corpus analysé ne tient compte que des messages envoyés par les stagiaires et non par les tuteurs.

L’écart entre les intentions positives d’usage du forum de discussion exprimées oralement par les stagiaires en début de formation lors de la première rencontre en présentiel et leur participation effective en phase distantielle dénote un moindre degré d’appropriation de l’outil (Rabardel, 1995). Pourtant, lors du questionnaire final, c’est l’item : « échanger entre collègues » qui fut choisi par 85 % des stagiaires interrogés sur leur motivation à participer aux échanges du forum. De plus, 45 % des stagiaires n’ont jamais cherché à établir le contact en allant sur le forum de discussion, et se sont contentés de répondre aux messages lancés par le tuteur.

Le questionnaire final révèle que les échanges en face à face sont privilégiés par 57 % d’entre eux, les raisons majeures de la non-participation à la communication en ligne via le forum sont le manque de temps, la surcharge de travail et le discours rendu public. Enfin, il s’avère que les modes one-to-many et many-to-many n’ont pas été privilégiés par les stagiaires qui leur ont préféré le courriel en mode one-to-one. Afin de catégoriser les types de discours des stagiaires et de montrer quel fut l’outil privilégié par eux pour communiquer à distance, nous nous sommes inspirées de la typologie de Nissen (2011) qui catégorise les rôles du tuteur en formation hybride. Il nous a semblé pertinent de transposer cette typologie à l’étude des types de discours selon les outils de notre formation hybride. Nous avons comptabilisé le nombre de messages écrits par les stagiaires sur forum de discussion et courriel en analysant les historiques du forum et des courriels professionnels. Nous sous sommes ensuite penchées sur le contenu des messages afin de déterminer les différents types de discours d’après la typologie de Nissen (op.cit.).

Tableau 2. Typologie des thèmes de discussions proposés en FAD à partir des catégories de Nissen (2011).

Types de discours Macro type Exemples de contenu Nbre forum Nbre courriel Total
Social Motivationnel Socioaffectif Se présenter. Souhaits. S’excuser. Échanger sur le métier. Questions d’ordre personnel. 25 42 67
Cognitif et Langagier Métacognitif Pédagogique Discuter autour d’une question pédagogique. 23 31 54
Évaluatif Évaluatif Expliquer sa démarche didactique. Justifier ses choix pédagogiques. Réaliser un complément de travail. Commenter les corrections. 0 26 26
Organisationnel Informationnel Méthodologique Organisationnel Questions sur les échéances du planning et les consignes. Savoir préparer son travail. Trouver une information sur le site interlangues académique. 29 47 76
Soutien technique Soutien technique Comment se connecter à la plateforme. Créer/se connecter à la messagerie académique. Questions sur les consignes d’envoi de fichier joint. 8 17 25
Total général 85 163 248

Nous remarquons qu’un lien social assez fort s’est établi entre les participants du dispositif avec 27 % des messages (67 messages) de type socioaffectif, quel que soit l’outil. Dans ce contexte de communication précis, les stagiaires ont cherché à pallier la distance spatiale créée par la formation et selon les réponses obtenues en partie quatre du questionnaire, à « échanger entre collègues » sur des « expériences professionnelles enrichissantes » tout en saisissant l’opportunité de « se rapprocher entre enseignants de LVE » (pour 66,7 % des stagiaires). Dans ce dernier cas, les distances physique et temporelle et la CMO ont facilité les échanges en permettant une liberté et une souplesse qui ne sont pas toujours possibles en établissement et en face à face, ce qui a motivé pour quelques-uns le souhait de maintenir le forum de discussion « au-delà de la formation afin de poursuivre les échanges ». En revanche, 26 % des stagiaires n’ont pas participé à la communication numérique, ce qui ne signifie pas pour autant que le lien social communautaire ait été perdu pour eux ; la participation périphérique ou marginale au sens de Wenger (1998) devient une pratique : je ne participe pas, mais je reste membre de la communauté de pratiques en lisant les messages et en collaborant aux travaux en ligne. Il y a ici une liberté de choix de ces participants qui ont pu trouver leur propre équilibre socioaffectif et sociocognitif au sein de la FAD, sans glisser vers l’abandon total. Comme cela a été dit par cette stagiaire sur le forum en fin d’année scolaire, psychologiquement, l’outil est là, et même si on ne l’utilise pas, il participe au rapprochement de la communauté virtuelle face à l’isolement dû au métier :

Désolée, j’aurais voulu être plus présente… (…). Il est très agréable d’être en contact permanent avec les collègues, de savoir qu’on peut échanger à n’importe quel moment, sans contrainte horaire, de minimiser l’isolement auquel nous sommes de plus en plus confrontés dans notre quotidien de professeurs, malheureusement… FS313.

Cependant, ces participations moins actives représentent un danger de rupture de lien social lorsqu’elles sont nombreuses, surtout dans le cas du forum de discussions où l’absence d’interactions des uns est visible par tous (Lamy, 2006). On peut craindre le mimétisme des participants les moins motivés qui engendrerait les silences, voire les abandons comme ce fut le cas pour 7,5 % des stagiaires qui n’ont pas rendu les devoirs et n’ont pas communiqué à distance mais qui furent présents au moins à une des deux rencontres en présentiel. De la même façon, l’émulation des premiers échanges produite par l’effet de groupe de la première rencontre en présentiel qui incite et encourage la parole virtuelle peut se ternir au fil du temps en cas d’échanges trop rares en distantiel. Le lien doit rester présent, ce qui induit de la part du tuteur un savant dosage de relances du discours, ni trop peu, ni trop souvent, d’autant que pour des stagiaires en poste accaparés par leurs tâches professionnelles quotidiennes, l’échange en ligne régulier demande un investissement en temps qui est parfois trop pesant en dépit de la motivation :

(…) Juste un regret, j’ai été prise par le temps… FS7 », « Je m’excuse tout d’abord car je n’ai pas vraiment participé comme il le fallait… j’étais prise par le temps FS9.

D’après les retours sur questionnaire renseigné par les stagiaires lors de la dernière rencontre en présentiel, nous constatons que l’outil n’est pas neutre et change le rapport au discours. Pour ce qui est du forum, les avis sont tranchés et peuvent en partie s’expliquer par la découverte de l’outil pour 30 % des stagiaires : « profitable », « compliqué et pesant », « très agréable », « pas apprécié », « pratique et facile d’accès ». Mais il semblerait que le contexte socioculturel des stagiaires et leur culture d’usage aient fait évoluer négativement les représentations positives de l’outil des premiers échanges. Durant les deux premiers mois de la formation, 37,5 % des échanges en ligne se sont effectués via le forum mais ce pourcentage a décliné par la suite. Le manque de temps et la contrainte de se connecter plus régulièrement, alors que la moyenne est établie à 3 fois par semaine, furent ressentis comme pesant à 28 %. Le fait que le forum soit un espace ouvert à tous mais interne au cadre professionnel et que les interactions en ligne soient publiques, « moins discrètes vis-à-vis de l’institution » et « faussement libres », a généré la crainte d’être lu et peut-être jugé (35 %). Les discours sur forum professionnel ont de ce fait été jugés artificiels car empreints d’une réserve dans le contenu et la forme qu’exige le cadre professionnel, même en relation symétrique (28 %). 41 % des discussions sur le forum furent lancées par les stagiaires, ce qui est peu. Le reste des discussions fut initié par le tuteur, mais n’obtiennent pas toutes des réponses. Nous pouvons penser que les stagiaires ont hésité à poser des questions publiques d’ordre pédagogique qui pouvaient les exposer de façon trop transparente. Ainsi les stagiaires ont utilisé cet artefact lorsqu’il s’est agi de ne pas trop se dévoiler personnellement, lors des discours organisationnel et/ou cognitif. Il apparaît que les avantages de la mise en ligne diffèrent selon le point de vue : l’apprenant, sans moyen de contrôle face au devenir de ses propres traces, peut éprouver méfiance et/ou frustration alors que le chercheur voit comme un avantage le fait d’accéder aux traces des discours pour ses travaux de recherche.

Dans le cas de relations dissymétriques entre tuteurs et stagiaires, le courriel professionnel ou/et le forum furent utilisés par les stagiaires pour rendre leurs devoirs à la correction. Pour engager le discours évaluatif, c’est le mode one-to-one et le courriel professionnel qui fut privilégié, écartant de ce fait les problèmes de face qui peuvent représenter une menace à la création du lien cognitif et socioaffectif (Marcoccia, 2001, 2004). Dans une démarche d’adaptation à ces choix, le tuteur a lui aussi utilisé cet outil pour renvoyer les devoirs corrigés, ce qui est un exemple de « bonne » distance proximale à garder entre acteurs de la FAD (Paquelin, 2011). Dans le cas de notre formation hybride, il fut nécessaire de maintenir les échanges quel que soit l’outil choisi par les stagiaires, ainsi le courriel professionnel a pris le relais lorsque le forum fut moins actif et vice-versa. Une tâche importante du tuteur consiste à opérer un va-et-vient entre le prescrit des scénarios pédagogique et de communication afin de respecter les habitudes numériques et les affordances des acteurs (Gibson, 1977), dans le cas contraire, on risque de rompre le lien socioaffectif sur la durée et de provoquer silences et abandons (Loizidou, 2013).

La médiatisation des discours

La communication médiatisée asynchrone qui permet l’interaction humaine au sein de la FAD rompt l’isolement et joue un rôle socioaffectif important. Dans le cas de notre expérimentation, le scénario de communication repose en grande partie sur l’utilisation du forum de discussion et du mail professionnel véhiculant les discours écrits entre les acteurs. Nous adoptons ici une approche qualitative qui étudie les discours dans leur forme et contenu afin de trouver les traces du lien social.

Du fait du décalage temporel, le langage écrit se montre plus réfléchi, plus soigné dans le choix des mots et/ou plus créatif grâce aux emphases (ponctuation forte, interjections), traces d’oralité surtout dans une situation asynchrone où l’on cherche à compenser le manque de communication en face à face (Herring, 2004 ; Marcoccia, 2004).

Dès les premiers échanges dédiés aux présentations via forum de discussion, le signe d’un répertoire partagé au sens de Wenger (1998) ou du « compter pour » selon Paugam (2008) transparait dans les salutations en langue cible enseignée qui fut utilisée spontanément par les professeurs de langue (58 %) « Hi! », « Hello! », « Hola ! », « Boa tarde pessoa !! », « Hola colegas ! », « Goedemorgen ». Il y a là le signe d’appartenance identitaire à la communauté des enseignants de langue par la reconnaissance de la discipline commune. À travers ces « signatures », le stagiaire se présente comme un spécialiste de la langue cible enseignée, et non comme un simple stagiaire en formation. Le registre se veut courant, voire familier « Ben non… », « Voilà ! », « Je suis prof de…. », « dacodac ! ». Le ton est amical, dynamique et enjoué :

– Je suis FS2, Professeure de portugais au lycée X de L. Il est très intéressant d’avoir un espace comme celui-ci afin de partager et de se connaître !
– Tout à fait d’accord, collègue FS2 !
– Bonjour, je suis FS6, content de partager et d’apprendre avec vous.
– Merci Moodle !

L’occurrence du mot : « partage », les signes d’identification au groupe : « dadodac », « tout à fait d’accord », ainsi que les verbes « se connaître », « apprendre » désignent une volonté de cohésion sociale propice à la création d’une communauté de pratiques. Le tuteur adopte une approche qui tend à atténuer le rapport dissymétrique tuteur-apprenant par un discours fédérateur et en signant de son prénom : « Bonjour tout le monde… J’enseigne une LVE (anglais) tout comme vous en lycée… FT1 ». En termes d’adresse en relation dissymétrique, c’est le vouvoiement qui domine en début de formation mais au fil du temps, les stagiaires nomment le tuteur par son prénom et le tutoient ce qui dénote une proximité socioaffective :

– Bonsoir CT1, j’ai un problème d’adresse e-mail avec CT2, peux-tu m’aider stp ? Merci !
– Bonsoir, j’ai réussi à envoyer les fichiers à CT2. Merci pour ta réactivité. SC7.

Ce changement en termes d’adresse diffère en fonction de l’individu qui peut passer par des phases transitoires d’hésitation entre un mode de discours relâché ou normatif qui fait état d’une double contrainte telle que décrite par Rivens Mompean (2013). Cela se traduit par des évitements subtils, conscients ou non, à choisir le tutoiement ou le vouvoiement : « Bonjour CT1 ! En pièce jointe, mon travail… Bonne réception… à très bientôt ! ». On voit bien ici l’importance et l’impact du mot (Freud, 1978). Une fois que le tutoiement est instauré entre tuteur et stagiaires, le registre de langue reste neutre, parfois familier mais cela est plus rare. Le ton est poli, respectueux et reconnaissant, surtout professionnel dans le fond et la forme des messages qui sont rapides et efficaces, de l’ordre de 3 à 4 phrases en moyenne. « Merci bien… », «  à bientôt… », « je te remercie grandement… », « merci pour ton aide ! »

Observons à présent quelques résultats quantitatifs croisés tirés du questionnaire et relatifs à la relation stagiaire tuteurs one-to-one. Cette relation de proximité qui s’est installée tout au long de la formation via le courriel a permis de cimenter le lien social de façon intime et individuelle, un peu à l’image d’un cours privé en ligne, et de développer les échanges cognitifs et métacognitifs. Les échanges ont été perçus par les stagiaires comme un atout majeur de la FAD parce qu’ils leur ont permis « d’être accompagnés toute l’année » (66,5 %), « d’apprendre des autres » (44,5 %) et « d’obtenir une aide discrète » (22,5 %) tout en gardant la possibilité « d’échanger quand on le souhaite » (33,5 %). Une réflexion métacognitive a pu se produire avec pour 72 % des stagiaires, la possibilité « d’analyser leur faiblesse » et « de prendre/reprendre confiance en eux » (66,5 %). Cette relation one-to-one de proximité a conforté et rassuré certains qui se sont sentis plus confiants vis-à-vis de la communauté, et donc plus à même d’échanger avec leurs pairs.

Au niveau qualitatif, nous voyons que la CMO ne réduit pas les échanges à des discours distants et impersonnels mais qu’elle permet d’effacer les rigidités de situations professionnelles plus formelles comme ce fut le cas ici :

Bonsoir Mme CT1 (…) Vous pouvez m’appeler CS4, si vous le souhaitez, cela ne me gêne pas du tout et c’est un peu moins formel, qu’en pensez-vous ?
« Avec plaisir CS4 ! Appelez-moi aussi par mon prénom, ce sera bien plus convivial.

Le choix du mot « formel » exprime le souhait de la part du stagiaire de passer outre les codes langagiers implicites afin d’interagir de façon informelle avec son tuteur. Les exemples suivants confirment que le lien socioaffectif s’est installé à travers les remerciements chaleureux et reconnaissants de ces stagiaires envers leur tuteur :

– Bonjour CT1. Je te remercie de ton aide et de ta disponibilité. J’ai bien pris note de tes conseils, surtout au niveau des évaluations. Un grand merci pour ton professionnalisme. À bientôt ! CS7
– Bonjour chère CT1 Je te remercie de tes conseils et des tes encouragements. Ce fut vraiment un plaisir de travailler avec toi ! Bonne semaine. CS9.

La médiatisation des discours peut aussi totalement freiner les échanges comme nous l’avons vu avec le cas du forum qui n’a pas engagé les stagiaires dans une participation active, importante et régulière, alors que l’artefact ne semblait pas au premier abord poser le moindre problème à nos stagiaires. Ceci nous interpelle quant aux choix des outils en formation hybride et à leur diversité. En effet, dans le cas de notre dispositif hybride, le maintien du lien social à distance aurait été plus fragile sans le courriel professionnel qui a joué le rôle « d’outil de secours » face au forum moins utilisé. En revanche, une fois que le lien social est établi au sein du dispositif, il agit comme agent motivationnel, garant de l’apprentissage à distance et créateur de dynamique pédagogique. Le lien social ne se dévoile pas toujours à travers le discours et peut prendre des formes moins palpables (participations marginales, lectures des messages du forum sans participation, présence psychologique rassurante de la communauté grâce à l’outil), nous avons vu en effet qu’il peut se tisser de diverses façons qui participent toujours à la construction de l’individu.

Conclusion

Si l’on revient à la typologie évoquée préalablement, distinguant le mode one-to-one (échange individuel avec un locuteur/un interlocuteur via courriel, visioconférence), le mode one-to-many (échange participatif avec un locuteur/plusieurs interlocuteurs via forum de discussion, courriel ou clavardage) et le mode many-to-many (échange collectif avec plusieurs locuteurs/plusieurs interlocuteurs via wikis, visioconférence ou forum), on constate que seuls les deux premiers modes ont été mis en œuvre dans notre dispositif et qu’il a fallu trouver un équilibre entre ceux-ci. Le mode one-to-one a permis de prendre le relais lorsque les modes collectifs ne suffisaient plus.

Les modes utilisés ici sont asynchrones et se pose donc la question d’ajouter ou non des éléments synchrones au dispositif. Dans le cas présent, ce sont les séances en présentiel (introduction et conclusion du cours) qui ont permis de le faire. Il pourrait être intéressant de proposer des rendez-vous synchrones en cours de formation, ce qui permettrait sans doute de maintenir une forme de lien social fort. Toutefois, les modalités techniques d’organisation ne doivent pas peser et être contreproductives lors de la mise en place et il n’a pas été envisageable de le faire. Cela reste une piste à étudier à l’avenir, d’autant plus que les outils de visioconférence sont devenus plus facilement accessibles.

Nous pouvons également constater que nous avons réussi à créer du lien social en ligne, même si les échanges pourraient être plus nombreux et plus réguliers. En effet, sans ce dispositif, les stagiaires seraient restés isolés, du fait de leur isolement géographique et de leur statut professionnel. Le contexte dans lequel le dispositif se met en place est un élément indispensable à prendre en compte pour l’évaluer. Il n’y a pas « un » bon dispositif mais des dispositifs contextuels à penser. Même si les outils technologiques utilisés semblent peu innovants (forum et courriel), c’est l’architecture globale du dispositif qui permet d’en mesurer la pertinence ainsi que l’appropriation qui en est faite par les stagiaires. Il convient donc de faire se correspondre des affordances, des contextes et surtout de les construire dans un scénario global cohérent qui permet de le rendre opérationnel.

Pour conclure, nous pouvons affirmer que créer le lien social à distance représente un défi en FAD parce qu’il dépend des contextes culturel et technologique, des enjeux de chacun, des artefacts proposés et de leur diversité ainsi que des médiations humaine et technologique. De surcroît, il est en même temps un moyen et une fin : lorsqu’il est présent, il apparaît comme le résultat d’une osmose entre tous ces paramètres fluctuants et parfois incontrôlables du dispositif qui, en s’associant et en se complétant, génèrent une « dynamique pédagogique » dont le lien social est le conducteur. Par contre, lorsque les paramètres du dispositif médiatisé à distance ne sont pas tous validés par les acteurs, le lien social peut se rompre et laisser place aux manques de participation, voire aux abandons.

1 Un dispositif hybride se caractérise par la présence de dimensions innovantes liées à la mise en distance, il suppose l’utilisation d’un

2 Cette formation hybride s’inscrit dans le Plan académique de Formation (PAF) de la Guyane. Les plans académiques de formation sont élaborés au

3 La modalité distantielle est de 80 %, la modalité présentielle est de 20 %.

4 En italiques dans le texte.

5 CALL : Computer-Assisted language learning/Apprentissage des langues assisté par ordinateur.

6 La CMO est un sous-ensemble de la Communication médiée par les Technologies (CMT).

7 On entend par cultures d’usage les représentations qu’un individu se fait d’un outil, et les effets de ces représentations sur les échanges avec

8  Pour plus de facilité, nous nommerons désormais les enseignants stagiaires qui participent à cette formation les « stagiaires ».

9 Une séance, séquence et progression d’un cours de langues de niveau A2 à B1+ au choix correspondant aux niveaux d’enseignement des stagiaires de la

10 Les 28 stagiaires en langues vivantes étrangères sont en poste dans le secondaire (collège, lycée et lycée professionnel).

11 Les détails de cette étude sont mentionnés dans la thèse de doctorat en cours.

12 Chaque stagiaire devait rendre trois devoirs (une séance, une séquence et une progression pédagogiques) via la plateforme Moodle ou le courriel

13 Les acteurs du dispositif sont désignés par des codes afin de respecter l’anonymat des personnes.

Les tuteurs de la formation sont T1, T2. Les stagiaires sont S1, S2, S3, suivant l’ordre alphabétique. Les stagiaires dont les propos sont repris sur

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Notes

1 Un dispositif hybride se caractérise par la présence de dimensions innovantes liées à la mise en distance, il suppose l’utilisation d’un environnement technopédagogique qui exige des formes complexes de médiatisation et de médiation, (Charlier et al., 2006). Nous utiliserons les termes : formation hybride, dispositif hybride ou dispositif médiatisé à distance pour nommer notre formation hybride.

2 Cette formation hybride s’inscrit dans le Plan académique de Formation (PAF) de la Guyane. Les plans académiques de formation sont élaborés au niveau local dans une perspective d’accompagnement au plus près de l’ensemble du personnel. Les priorités nationales pour la formation y sont déclinées en fonction des spécificités de chaque académie, (Eduscol, 11 janvier 2016).

3 La modalité distantielle est de 80 %, la modalité présentielle est de 20 %.

4 En italiques dans le texte.

5 CALL : Computer-Assisted language learning/Apprentissage des langues assisté par ordinateur.

6 La CMO est un sous-ensemble de la Communication médiée par les Technologies (CMT).

7 On entend par cultures d’usage les représentations qu’un individu se fait d’un outil, et les effets de ces représentations sur les échanges avec autrui. (Thorne, 2003).

8  Pour plus de facilité, nous nommerons désormais les enseignants stagiaires qui participent à cette formation les « stagiaires ».

9 Une séance, séquence et progression d’un cours de langues de niveau A2 à B1+ au choix correspondant aux niveaux d’enseignement des stagiaires de la formation hybride.

10 Les 28 stagiaires en langues vivantes étrangères sont en poste dans le secondaire (collège, lycée et lycée professionnel).

11 Les détails de cette étude sont mentionnés dans la thèse de doctorat en cours.

12 Chaque stagiaire devait rendre trois devoirs (une séance, une séquence et une progression pédagogiques) via la plateforme Moodle ou le courriel professionnel.

13 Les acteurs du dispositif sont désignés par des codes afin de respecter l’anonymat des personnes.

Les tuteurs de la formation sont T1, T2. Les stagiaires sont S1, S2, S3, suivant l’ordre alphabétique. Les stagiaires dont les propos sont repris sur forum se présentent sous le code ForumStagiaire suivi de leur numéro : FS1, FS2… Les propos du tuteur tirés du forum se présentent sous le code ForumTuteur1 : FT1. Les stagiaires et le tuteur dont les propos proviennent du courriel académique apparaissent comme : CourrielStagiaire1 : CS1 ou CourrielTuteur1 : CT1.

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Référence électronique

Manuella JACOB et Annick RIVENS MOMPEAN, « Construire le lien social à distance », K@iros [En ligne], 3 | 2019, mis en ligne le 28 mars 2019, consulté le 20 avril 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/kairos/index.php?id=163

Auteurs

Manuella JACOB

Savoirs, Textes, Langage, Université de Lille

Annick RIVENS MOMPEAN

Savoirs, Textes, Langage, Université de Lille

Droits d'auteur

Creative Commons Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)