Vase media/mass media : les fonctions communicationnelles des vases grecs hier et aujourd’hui

DOI : 10.52497/kairos.774

Résumés

Résumé : Le vase grec bénéficie aujourd’hui d’un regain d’intérêt. Lequel justifie qu’on le questionne : en quoi les images peintes sur les vases ont-elles été – et sont-elles encore – un support de communication ? Quelles étaient leurs fonctions dans l’Antiquité ? Les images recensées sur la panse des vases sont-elles identifiées (et même identifiables) par des hommes du xxie siècle ? Il convient de s’interroger sur les réactions des visiteurs candides ou avertis qui fréquentent aujourd’hui les musées. Et, plus précisément, d’interroger cette surprenante modernité avec les instruments d’analyse proposés par les SIC : des enquêtes qualitatives avec commentaires de photographies des thèmes représentés sur les céramiques.

Abstract: The Greek vase takes today the benefit of a renewed interest. How were the pictures on the Greek vases a communication medium yesterday and today? What was their function in the Antiquity? Are the pictures listed on the bulge of the vases identified (and even identifiable) by people of the XXIrstcentury? It is not forbidden to wonder about the motivations of these artless or experienced visitors. And more precisely, to question this surprising modernity with the instruments of analysis offered by the sciences of information and communication.

Index

Mots-clés

communication, image, réception, media

Keywords

communication, picture, reception, media

Plan

Texte

À l’évidence, le vase grec bénéficie d’un regain d’intérêt. Autrefois confiné dans les cabinets de curiosité, il s’empoussiérait discrètement derrière des vitrines Louis XVI. Il trône désormais sur les consoles Starck, à la devanture des antiquaires de renom, il sert de vide-poche dans l’antichambre de tel grand couturier, fait la une des catalogues de l’hôtel Drouot ou devient un accessoire de mode1. Les expositions avec monographies Euphronios, le peintre de Berlin, Exékias, la collection Campana en 2019, Le Vase qui parle dispositif numérique de médiation imaginé par l’Université de Lille, attirent collectionneurs, amateurs ou simples curieux. Il est intéressant de s’interroger sur les réactions de ces visiteurs candides ou avertis. Et, plus précisément, d’interroger cette surprenante modernité avec les instruments d’analyse proposés par les SIC.

Figure 1 : Les motifs des vases grecs ornent les ongles et les objets du quotidien.

Image

De gauche à droite : manucure attique, mules Este offial, boucles d’oreilles, clés USB, foulard Hermès aux motifs de vases grecs.

Soit, se demander : en quoi les images sur les vases grecs ont-elles été et sont-elles un support et un outil de communication ? Comment ces collections d’objets de fouilles, BD de la vie antique, deviennent-elles un corpus exploratoire pour retrouver des traces de communication assumée dans la Grèce antique ? C’est-à-dire quelles étaient les diverses fonctions des images sur ces vases ? Étaient-elles seulement pensées pour l’exportation afin de diffuser une image positive de la cité ou remplissaient-elles le rôle sociétal que leur attribue Clément d’Alexandrie à l’aube de l’ère chrétienne ? Le message – s’il était volontaire – des peintres athéniens est-il encore perceptible de nos jours ?

Figure 2 : Les vases grecs ont inspiré les créateurs de mode.

Image

Corsage en satin de soie jaune, décor peint, années 1920.

CCØ Paris Musées/Palais Galliera, Musée de la Mode de la Ville de Paris.

  •  Pour répondre à l’ensemble de ces questions, nous étudions dans une première partie un corpus d’images représentées sur ces récipients d’usage. Nous faisons aussi référence à des textes de spécialistes pour comprendre les fonctions de l’image dans l’Antiquité. Nous définissons une typologie conforme non à leur usage domestique, mais à leur iconographie, à partir d’un corpus disponible sur les bases Joconde et Atlas, la Beazley archive ou dans les ouvrages mentionnés dans la bibliographie. L’observation repose sur quinze modèles attiques à figures noires et rouges. Nous limitons notre étude à la période archaïque et classique (du vie, ve, ive siècles av. J.-C.). Nous nous situons dans une perspective empirique qui devrait questionner le savoir-faire des peintres pour communiquer sur la vie de la cité, ses croyances, les mœurs d’une société. Au bout du compte, déjà, un savoir-faire bien exporté au-delà de la Grèce continentale.
  •  Dans une seconde partie, et à partir de ses fonctions d’autrefois, la volonté communicationnelle des Grecs anciens se retrouve-t-elle dans les discours de réception de l’homme du xxie siècle ? Les images recensées sur la panse des vases sont-elles identifiées – et même identifiables – par nos contemporains ?

Pour tenter de répondre à cette question, nous avons interrogé 30 visiteurs2 au Musée du Louvre à Paris en leur présentant des photos de notre typologie. Ils devaient répondre à des questions et décrire ou s’attarder, s’ils le souhaitaient sur les vases qui correspondaient le plus aux aléas de la distance culturelle ou qui les inspiraient particulièrement.

À l’issue de cette enquête, nous formulons l’hypothèse que les représentations restent d’une grande modernité et ouvrent sur des questions contemporaines comme nous avions pu en juger lors d’une enquête exploratoire. Dans cette étude l’ensemble des échantillons voyait le vase comme un « support », un « outil », voire même un « médium » de communication pour les Grecs anciens : Le médium (la scène historiée du vase) s’y définit comme un canal de transmission, dont la vocation première est de faire circuler un message qui soit préexiste, soit existe indépendamment du média choisi. Les médias de masse (les vases grecs ?) serviraient avant tout à diffuser et intensifier les messages par le canal qu’ils représentent (Baetens, 2014, p. 45) : la diffusion massive de la céramique historiée via les échanges commerciaux permet la propagation de la culture hellénique dans tout le monde antique.

Le vase comme support de communication polysémique

Il est avant tout fondamental d’interroger la fonction des images à travers les différents usages des vases. La littérature, en général, abonde en publications sur les vases attiques. Si ces dernières sont le fait de spécialistes combinant la maîtrise de la langue, de l’histoire, de l’histoire de l’art et de l’analyse des images, aucune n’aborde la céramique sous l’angle des SIC. Il nous faudra d’abord établir un état des lieux avant d’envisager la signification des images des vases porteurs d’un point de vue communicationnel. Simple récipient ? Objet d’art ou support d’un message ? Plantons le décor…

On fait nôtre la thèse de l’historien de l’art Erwin Panofsky : est considérée comme œuvre d’art tout objet qui a été créé dans l’intention d’être perçu comme esthétique, marquant ainsi une volonté communicationnelle. Ce qui implique de notre part une analyse de l’environnement de la production du corpus considéré.

Vases et production attique : état des lieux de l’histoire de la céramique

L’art de la céramique a atteint son apogée en Grèce ancienne à Athènes (vie-ive siècles av. J.-C.), à une époque où la production de vases en terre cuite relève d’une activité artisanale. Tenons pour acquis que, dans le cas présent, la distinction entre artisan et artiste n’est pas pertinente ; en grec ancien, tekhné (τέχνη) confond « art » et « technique ». Seul le « faire » est signifiant.

À cette époque, les Grecs développent des techniques de cuisson sophistiquées et maîtrisent plusieurs types de décors. Notons d’ailleurs que l’expression « vases peints » est abusive, puisque la plupart des décors ne sont pas produits par l’application de pigments, mais sont le fruit d’une réaction chimique lors de la cuisson. Il s’agit d’une production presque intégralement industrielle, ce qui explique la découverte de milliers de vases en terre cuite : vaisselle commune non décorée ou vaisselle de luxe aux décors précieux commercialisée dans l’ensemble du monde antique.

Ces vases jouent d’abord le rôle de contenant de denrées alimentaires. En fonction de leur usage – transport des denrées ou service de la boisson – les Grecs en élaborent des formes variées, en terre cuite et en métal : amphores, pélikès, hydries. D’autres sont réservés à la conservation des parfums à usage funéraire : aryballe, alabastre. Si la plupart de ces vases sont destinés à l’usage privé pour les événements importants – noces, banquets, funérailles, hommages aux défunts –, quelques-uns seulement répondent à des commandes officielles.

La technique de la figure noire est née à Corinthe dès le viisiècle av. J.-C. Les silhouettes sont en figures noires et les détails incisés pour faire apparaître l’argile rouge. Dès 630 av. J.-C., Athènes excelle dans cette ornementation et fait la conquête des marchés du monde grec. Les vases sont notamment retrouvés massivement dans les tombes de nobles étrusques. « Le Céramique » à Athènes désigne un quartier particulier qui abrite l’activité des artisans et un cimetière.

Le style de la figure rouge apparaît ensuite à Athènes vers 530-520 av. J.-C. Il constitue rapidement l’opus magnum de la production attique qui s’impose comme seule grande école à la période classique. Sur le noir se détachent des figures réservées dans le rouge de l’argile. Les détails peints ne sont plus incisés. Cette technique libère le style des artistes. Néanmoins, ces ateliers sont détruits durant l’occupation d’Athènes par les Perses, en 480-479 av. J.-C., pendant les guerres médiques, puis immédiatement reconstruits.

Ces vases sont remarquables par la subtilité de leurs décors et les images peintes qu’ils dévoilent et qui offrent une approche originale des pratiques sociales, de l’idéal de la Grèce antique, et permettent de pénétrer au cœur même de la civilisation grecque, au même titre que les textes d’auteurs anciens.

La question qui peut se poser alors est la suivante : quelles opinions les clients qui reçoivent ces images se font-ils de la cité grecque et des Grecs en général ? Il est difficile de répondre, « ils doivent avoir une idée très naïve et très flatteuse du citoyen grec représenté dans des actes civiques et héroïques ou en tant que banqueteurs souvent nus à un banquet opulent » (Darthou, 1999, p. 53).

Par ces images, le citoyen grec exhibe sa conception du monde et ses valeurs. Ce qui nous permet de définir les multiples fonctions communicationnelles de ces « récipients-Tupperware de luxe » avant l’heure.

Le vase, objet communicant ?

Il nous faut d’emblée poser cette question, que Bernard Darras tient pour déconcertante, mais bien possible : les objets communiquent-ils ?

Sa thèse centrale repose sur l’affirmation que les produits de la culture matérielle ne sont pas des objets passifs, mais « des médiateurs de croyances, de représentations, d’habitudes et d’agences » (Darras, 2010, p. 4).

Formulée autrement, la question pourrait être : « Objets inanimés avez-vous donc une âme… et une mission ? ».

Ce qui amène à penser que ces vases auraient de facto dans l’Antiquité une fonction de communication transactionnelle – interpersonnelle, économique, politique, culturelle, transcendantale, interculturelle, sociale et morale.

Rappelons que les vases ont des fonctions communicationnelles en tant qu’objets de transaction et les représentations sur les vases en tant que signes. L’absence de témoignages ne nous permet pas de dissocier l’un de l’autre s’agissant de la période antique.

Le vase favorise-t-il la communication interpersonnelle ?

Dans la Grèce antique, parmi les formes de sociabilité, les symposiums, banquets organisés dans les demeures privées, resserrent des liens interpersonnels et permettent de mettre en scène sa fortune, ses réseaux politiques et sa propre personne (Dubouloz, 2016, p. 13). Le vase, prétexte à libations est un moyen d’échanger au cours de ces repas et son iconographie délie les langues. Rappelons que le symposion est une institution culturelle à Athènes, associée à la consolidation de groupes sociaux et durant laquelle il est d’usage de boire et de discourir. Les participants prennent part à des plaisirs divers : vin, conversation, performances musicales, jeux, sexe. (Olsen, 2017, p. 2) À titre d’exemple, Le Banquet de Platon (vers 380 av. J.-C.) montre une réunion de personnes bien éduquées discourant sur l’action d’Éros, dieu de l’amour, au cours de ce fameux symposion. Les convives célèbrent par la philosophie un Éros symbole de l’amour de la sagesse.

Figure 3 : Scène de banquets.

Image

Peintre d’Euaion, coupe à figures rouges, vers 460 - 450 avant J.-C.

Athènes, Collection Campana 186, © RMN/H. Lewandowski.

Le Banquet de son contemporain Xénophon (entre 390 et 370 av. J.-C.) expose des aspects plus concrets. Un Syracusain, un métèque, organisateur de spectacles vient accompagné d’un jeune garçon et d’une fille distraire les participants avec des jeux acrobatiques. Deux acteurs représentent les noces d’Ariane et du dieu Dionysos. La scène prend rapidement un tour érotique.

Sur les vases utilisés dans ces agapes, surtout les cratères et les coupes, on peut voir les figures picturales de l’ensemble de ces thèmes cultuels et culturels chers aux Athéniens, qu’ils soient tirés de mythes et rites religieux ou de diverses pratiques sociales, dont celles dédiées à l’érotisme. Lorsque le buveur tient un kylix, coupe peu profonde, dans ses mains et qu’il en boit le contenu, il dévoile l’image provocante d’une danseuse. Les historiens ont souligné l’objectivation des femmes représentées sur la vaisselle de banquet, en reliant la consommation de ces images par les participants masculins avec leur appréciation des danseuses se produisant devant leurs yeux. Ce kylix fait de la danseuse soliste un objet érotique à la disposition du plaisir masculin, fut-il dissimulé puis révélé de manière amusante à chaque fois que la coupe est remplie et vidée (Olsen, 2017, p. 6). In fine, lors du banquet, les convives regardent et commentent les scènes reproduites sur les vases, ce qui alimente les conversations. En effet, sur les représentations picturales des coupes et autres vases, on voit les convives du symposion élever chacun la main qui tient la coupe à boire. Ce geste ostentatoire n’est pas uniquement dessiné par le peintre pour montrer un convive se désaltérant, mais aussi pour laisser supposer que les images du récipient ont fait l’objet de paroles, discussions, plaisanteries, etc. Les dialogues littéraires de Platon et Xénophon illustrent de manière noble les activités pendant le symposion, un lieu d’échanges interpersonnel. Un outil de lien social : horizontal entre convives amis – la participation élective selon Serge Paugam (Paugam, 2009, p. 75) – et vertical dans le sens où ces hommes partagent des valeurs communes cultuelles (célébration d’Éros et Dionysos) et culturelles (la pratique du dialogue ou, si l’on préfère, selon la définition socratique des conversations littéraires, la dialectique).

Le vase, outil de… marketing et de branding ?

Le vase serait-il donc un support de communication commerciale pour les ateliers, les potiers, les peintres au même titre qu’un flyer, une affiche publicitaire ou une photo Instagram ? La prospérité des ateliers identifiables à leur registre iconographique, où travaillent ensemble des artisans (citoyens, métèques, esclaves), permet aux peintres d’acquérir un succès en commandes. Il convient de rappeler que le « statut personnel » est défini juridiquement à Athènes. Il existe deux catégories : les hommes libres et les esclaves. Parmi les hommes libres, deux catégories encore : les citoyens et les métèques, ces derniers étant admis à leur demande, dans des conditions bien précises, à résider et à travailler dans la cité. Cette diversité sociale crée du lien social au sein des ateliers. Une des composantes du lien social, défini par Serge Paugam est la participation organique, les relations de travail et les échanges marchands. Ce dispositif communicationnel opère entre les peintres et les potiers au sein du quartier du « Céramique » et aussi dans les relations commerciales avec les marchands étrangers (Paugam, 2009, p. 75).

Ainsi la communication en buzz sur la qualité de la production des images permet-elle l’identification des ateliers et du producteur, ce qui augmente ainsi sa notoriété dans sa spécialité artisanale à travers le monde antique.

La production du Céramique est en effet caractérisée par sa qualité artistique, les innovations techniques (vases bilingues : une face en figures noires, l’autre en figures rouges) et l’adaptation aux desiderata des clients. Pour tel chercheur, « le succès commercial enrichit « l’acteur » dont le statut économique et social s’est modifié à l’intérieur de la Cité, lui permettant d’audacieuses dédicaces témoignant de la considération qu’il a de lui-même » (Villanueva Puig, p. 19).

Les producteurs répondent néanmoins aux trois grands objectifs d’un plan de communication : notoriété, image, chiffre d’affaires. En retour, par l’acquisition de ces vases précieux, le commanditaire, le récepteur communiquent sur leur opulence. En contrepoint, l’archéologue Didier Viviers attribue plusieurs rôles à la signature (Viviers, 2004, p. 154). C’est une démarche anticipée la plupart du temps : la signature est souvent peinte avant cuisson. Elle serait une marque de fierté artisanale, confortée parfois par la mention du statut civique de l’artisan, elle serait une marque d’atelier à fonction commerciale, dans un double souci de publicité et de repérage de la production d’un atelier spécifique. L’historien John Boardman avance l’hypothèse suivante : la signature marquerait l’échange de nature commerciale, lié à une distribution programmée (Boardman, 2001, p. 34). Ainsi existait-il des commandes avec paiement anticipé dans l’Antiquité ? Les modes de rémunération de cette céramique ont été résumés ailleurs : paie journalière, contrat (Feyel, 1998). Il faut alors interpréter les œuvres comme le résultat d’une relation plus étroite entre clients et artisans. Le déplacement de l’interprétation de la signature du producteur vers le mode d’acquisition repose alors sur la question du prestige. Ce ne serait pas tant le nom du signataire, mais la signature qui offrirait un surplus de prestige à l’objet. Le client en est le principal bénéficiaire. Nous sommes bien dans le champ des SIC et… le client est roi !

La fonction économique du vase est donc avérée même s’il est difficile de retracer avec exactitude le mode de communication entre le client lointain et le « faiseur de vases », en dépit de très probables intermédiaires. « À Athènes se développe une rhétorique de la communication avec sa logique, ses techniques dans la recherche d’objectifs précis » que de récents travaux ont dégagés. Les artisans répondaient à la « nécessité économique de vendre et de satisfaire les souhaits de ces acheteurs étrangers » (Villanueva Puig, p. 11), qu’ils soient clients barbares, mixhellènes ou attiques. Certains chercheurs pensent que les fêtes, les croyances, les coutumes du client sont mises en images par les peintres afin de « lui plaire et de conquérir le marché » (de la Genière, 2004, p. 11). D’autres jugent que cela permet au client étranger d’acquérir des images grecques « précieuses et valorisantes pour son propriétaire au statut social élevé » (Williams, 2013, p. 53.). Pour cet auteur, « la recherche du profit (kerdos) est un des moteurs du potier et du peintre du Céramique. Ils souhaitent anticiper les besoins des acheteurs potentiels et répondre à des commandes précises (Williams, 2013, p. 48.)

Le vase est un outil de communication politique et de propagande

Peut-on dire que les images de vases servent la politique de la cité ? Peut-on risquer cette hypothèse : ces images sont un outil de propagande au service de la puissance politique d’Athènes :

[Alors] à Athènes se développe une rhétorique de la communication avec sa logique ses techniques. […] Ces images sur les vases ne constituent pas des reportages sur la vie quotidienne mais résultent de choix opérés dans la réalité dictée par les contraintes de la forme du support et les impératifs techniques. En outre ces constructions volontaires sont révélatrices de l’image que la Cité se doit de donner d’elle-même par la représentation de moments ou de situations où se sont laissés voir ses propres valeurs, son idéal (Villanueva Puig, 2014, p. 8).

S’agissant des manifestations de la propagande dans l’art, les avis sont partagés. Jacques Ellul pense qu’elle est exceptionnelle dans les démocraties grecques, parce qu’il s’agit de sociétés réduites à un petit nombre de citoyens. Elle se traduit à l’époque des tyrans, entre le viiie et le visiècle, par des travaux d’embellissement de la Cité et les représentations en rondes bosses des dignitaires dont il nous reste des copies d’époque romaine (Ellul, 1961). Vincent Azoulay voit dans les représentations de Thésée le symbole de la domination d’Athènes sur les autres cités et l’utilisation de l’œuvre d’art comme vecteur manifeste d’une politique (Azoulay, 2016, p. 50). Il est difficile de statuer sur cette question sans témoignages ou textes épigraphiques probants à l’appui. La volonté de communiquer reste, certes, évidente mais elle ne se résume pas à n’être qu’une propagande politique ostentatoire : après tout, la cité en Grèce ne contrôle pas la production de vases. Rien à voir avec les totalitarismes aux visées hégémoniques des xxe et xxie siècles. Toutes les cités grecques sont jalouses de leur autonomie. À deux reprises (ve siècle d’abord, puis ive siècle ensuite), l’empire maritime athénien, limité au secteur géographique de la mer Égée, a bien mal fini.

Pour autant, le client faisait-il de l’image la même lecture ? Des courants idéologiques et politiques pénétraient-ils les ateliers du Céramique ? Ces questions se posent à propos des vases, mais l’érudition des exégètes n’excéderait-elle pas celle des peintres des vases antiques ? 

Le vase est-il un outil de communication patrimoniale et interculturelle ?

La variété des thèmes soulignés dans la typologie proposée plus avant dans le texte montre à quel point l’iconographie de la Céramique constitue un riche témoignage des mœurs et usages de l’époque et de maints aspects de la vie des hommes de l’Antiquité.

En quoi le vase est-il porteur de « l’agir communicationnel » des Grecs anciens ? Nombreux sont les auteurs qui ont compris les enjeux des représentations picturales et de la diffusion massive des vases dans la transmission patrimoniale de la culture hellénique. Les travaux de Jean-Pierre Vernant sont à l’origine d’une anthropologie historique des images. Celles-ci sont l’expression de l’activité mentale de l’homme par les formes et fonctions qu’elles revêtent (Vernant, 1985, p. 324). Les images grecques apparaissent sur les supports les plus divers, dont la céramique. L’imagerie est utilisée dans des contextes variés tant dans la vie sociale que pour les besoins économiques et les actes religieux. Selon le contexte d’utilisation, l’imagerie de cette vaisselle diffère : les vases de banquet offrent une image de l’identité masculine dominante, les aspects religieux sont abordés par le biais des rituels de passage (mariage, funérailles), du sacrifice ou des mythes (Lissarrague, 199, p. 9). Dans ces rituels, par le truchement des vases, dans un processus de communication transcendantale, les humains communiquent avec des entités qui sont différentes, « invisibles » : les dieux, les morts (Deschodt, 2011).

Pour savoir si les vases grecs constituaient un outil de communication interculturelle, il serait bon de restituer la production dans l’ordre chronologique et de placer le succès de l’exportation de chaque cité productrice à la place qui est la sienne. La colonisation grecque, qui se manifeste dès le viiie siècle avant J.-C., a commencé par l’établissement d’avant-postes en Italie du Sud, Sicile, Campanie, dans le pourtour de la mer Noire, etc. Malgré l’absence de colonies athéniennes sur le pourtour de la Méditerranée, les potiers athéniens ont concurrencé victorieusement les anciens producteurs sur leurs propres marchés. C’est la qualité des vases athéniens ou attiques qui a su s’imposer, alors que les anciennes cités colonisatrices ne pouvaient plus rivaliser avec cette production d’exception. Les rapports métropoles/colonies sont étroits : matériels, religieux, culturels. On pourrait d’ailleurs voir là l’expression d’une forme de communication interculturelle, de facteur d’intégration qui renforcerait la composante de participation organique du lien social. Elle mobilise des ressources propres à des cultures différentes (ou partagées – ici c’est le cas des métèques qui sont souvent des Grecs d’autres cités), où l’activité des individus devient interculturelle à partir du moment où ils négocient des codes, des rites et des connaissances, à partir de ces cultures (Frames, 2008, p. 11). En fait, l’acheteur étranger et client des potiers peintres, par l’intermédiaire des bateaux chargés de la cargaison, réclamait les beaux vases attiques non seulement pour leur qualité esthétique, mais encore parce qu’ils exprimaient par leurs figurations un patrimoine culturel commun au polythéisme et à la vie en cité généralisés sur le pourtour méditerranéen : les mythes et rituels religieux, les pratiques sociales, etc.

N’oublions pas que les Étrusques, en relation avec les cités grecques d’Italie, importaient ces vases pour leur beauté et pour les placer dans les tombes, sous forme de matériel funéraire pour la survie dans l’au-delà. Un très grand nombre de vases grecs précieux ont été d’ailleurs retrouvés dans les tombes étrusques (le sens communicationnel – de facto le mode de réception – du vase change alors puisque son usage en Étrurie est exclusivement funéraire). Le polythéisme antique accepte toutes les passerelles d’un dieu à l’autre, d’un mythe à l’autre. Certes les potiers et peintres de vases devaient vendre pour vivre, mais ils travaillaient sans plan de production établi à l’avance : à la commande de particuliers, de marchands pour échanger, etc. Il nous semble que le succès de leurs vases vient d’un patrimoine culturel commun que l’image permet de perpétuer et de partager. Les mythes, la vie sociale sont illustrés et plaisent à l’acheteur qui s’y réfère et maintient vivant ce patrimoine. 

Athènes n’a pas colonisé comme les autres cités grecques. Mais, elle attire des artisans de cités surtout égéennes, hommes désireux de travailler sur son territoire ; elle leur confère, on l’a vu, le statut de métèque, favorisant ainsi une forme de communication interculturelle, au sein d’ateliers composés de travailleurs de statuts personnels différents. Le patrimoine culturel immatériel de toute la Grèce (mythes, poèmes épiques ou lyriques) trouve une traduction sur les vases, matériel facile à exporter et échanger. C’est très exactement le statut d’une communication patrimoniale. Communication d’un « patrimoine culturel [qui] est, dans son sens le plus large, à la fois un produit et un processus qui fournit aux sociétés un ensemble de ressources héritées du passé, créées dans le présent et mises à disposition pour le bénéfice des générations futures3. »

Communication sociale et morale

Pour Damet, dans son article « l’infamille » (Damet, 2011), les violences familiales sont montrées sans filtre sur la céramique entre « monstration et occultation ». Les peintres choisissent « certains motifs et mythèmes conflictuels connus du public » et représentent les violences parentales « notamment les violences maternelles volontaires (Médée, Philomèle et Procnè, Clytemnestre) et les violences paternelles marquées par la folie infanticide (Héraklès, Lycurgue). » Une scène du peintre Macron représente Procné tuant son fils Itys. Elle le servira à son père, Térée, lors d’un repas…

Les vases sur lesquelles figurent la plupart de ces scènes tragiques sont utilisés lors des banquets destinés à un public masculin. L’objectif de ces images serait de mettre en garde les hommes contre le « danger que peut représenter une femme pouvant, virilement, devenir criminelle et sacrificatrice, si dépossédée de ses prérogatives et de son honneur de mère-épouse, le seul rôle que la société grecque consentait à lui attribuer (Damet, 2011, p. 300).

Figure 4 : Philomèle, Procnè et Itys.

Image

Coupe attique à figures rouges

Paris, Louvre G 147, ARV² 472/211, Macron, vers 490-480 av. J.-C.

Le vase peut-il toujours être support de communication au xxie siècle ?

La question est audacieuse : si la dimension communicationnelle des vases de jadis est bien avérée, la réception à l’identique est-elle toujours possible et réaliste de nos jours ?

La difficulté de lecture et de compréhension des scènes représentées sur les céramiques grecques par le public est à l’origine du Vase qui parle, dispositif numérique de médiation culturelle imaginé par l’Université de Lille en 2012 (Hugot, Westeel 2014).

Il s’agissait de reproduire en très grand format un vase grec conservé au Palais des Beaux-arts de Lille et de le faire parler.

L’objet antique choisi, un vase tripode archaïque, est exposé dans le musée, mais se trouve mal éclairé, exposé contre un mur, ne montrant qu’une seule de ses faces. Présenté ainsi, le vase original pouvait laisser indifférents les visiteurs.

Par l’agrandissement x17 du vase antique, les concepteurs du Vase qui parle4 affirment la présence de l’objet dans un rapport surdimensionné et invitaient le public à s’intéresser aux personnages représentés, agrandis pour parvenir à échelle humaine.

Dans cette expérience interactive, les visiteurs munis d’un pointeur et d’un casque audio, interrogeaient le vase qui devenait lui-même un personnage racontant qui il est, décrivant les trois scènes qui l’ornent, donnant la parole aux personnages représentés5. Pour Arnaud Waels, designer développeur de ce dispositif : « Cette possibilité de découverte de l’objet favorise des usages individuels et collectifs qui seront évalués et surtout un nouveau rapport à l’objet archéologique conservé au musée6 ». Cet avatar à grande échelle – X 17 comme déjà écrit – propose évidemment au public, à tous les visiteurs contemporains, d’interroger les personnages, mais aussi de s’y identifier, de s’y confronter, ou bien encore de dialoguer avec l’objet et, pourquoi pas, avec son histoire.

Ici, ce projet, au-delà de sa mission scientifique, participe totalement à la visibilité de la recherche vers la société : le vase est ici au cœur d’une nouvelle méthode de communication permettant une appropriation innovante des savoirs attiques.

Le projet, en mode interactif, permet au visiteur d’aller là où la partie de l’œuvre l’intéresse. Il devient acteur ; le Vase qui parle prend alors tout son sens communicationnel, dans le contexte muséal, à côté de l’objet original, comme une mise en abyme.

Le vase devient alors intelligible pour tout un chacun. Finalement, et comme le suggère Isabelle Westeel, « le vase grec s’exprime pour être mis en valeur, communiquer sur ses figures dessinées et transmettre des savoirs » (Hugot, Westeel, 2014).

En suivant cette piste, dans le cadre de notre étude, pour une meilleure compréhension des scènes reproduites sur les vases, nous avons présenté des photographies de format A4, en couleur d’une sélection de scènes en plan rapproché. Pour l’expérimentation, nous avons construit la typologie suivante à partir de la base Joconde et Atlas. Nous avons ensuite soumis ces 15 planches à 30 visiteurs du département des antiquités et des salles Campana au Musée du Louvre pendant 4 jours du 5 au 9 octobre 2019.

Typologie et procédures

Mon argumentaire s’appuie sur les illustrations suivantes.

Mythique

Figure 5 : Achille et Penthésilée.

Image

Amphore, Exéchias, N° d’inventaire : 1836,0224 .127 (530-525 av. J.-C. British Museum).

Photo © The British Museum, Londres, Dist. RMN-Grand Palais/The Trustees of the British Museum.

Religieux et administratif

Figure 6 : Sacrifice d’un jeune sanglier et inscription kalos.

Image

Coupe attique à figures rouges, v. 510–500 av. J.-C. Louvre, n° G 112.

Crédit photo : ©Jastrow.

Figure 7 : Cortège de mariage attique.

Image

Pyxis tripode à figures noires, vers 530 - 520 avant J.-C. Athènes.MNB 508.

© Musée du Louvre. Photo RMN/H. Lewandowski.

Politique et religieux

Figure 8 : Scène de théâtre.

Image

Peintre du BM F 63 (ive siècle av. J.-C.), cratère, Cote cliché : 96-000761, N° d’inventaire : K404, Paris, Musée du Louvre.

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Gérard Blot.

Militaire

Figure 9 : Départ du guerrier.

Image

Manière du Peintre de Princeton, amphore à figures noires, vers 550 - 540 avant J.-C., Athènes, Collection Campana, 1861, F12, Louvre.

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski.

Évènementiel

Figure 10 : Athlètes.

Image

Peintre de Méléagre, coupe à figures rouges, vers 400-375 av. J.-C. Athènes, G 639, Collection Durand, 1825.

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski.

Économique

Figure 11 : Pesée et emmagasinage du silphium avec Arcésilas II.

Image

Coupe (560 av. J.-C, BnF), note de l’image : NQ-B-001638, n° inventaire : VASE 189 De Ridder189, inv.65.4899 et inv.52bis.2707.

Photo © Marie-Lan Nguyen/Wikimedia Commons/CC-BY 2.5.

Figure 12 : Cueillette de fruits (olives ?)

Image

Vers 500-490 av. J.-C. Olpe à figures noires.

Photo ©RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/ Hervé Lewandowski.

Figure 13 : Forgeron martelant dans sa forge.

Image

Groupe de Proto-Panaitios, cote cliché : 04-504509, N° d’inventaire : 1980.7, vers 510-500 avant J.-C.

Photo © BPK, Berlin, Dist. RMN-Grand Palais/Johannes Laurentius.

Vie quotidienne

Figure 14 : Femmes à la fontaine.

Image

Hydrie à figures noires, vers 510 avant J.-C., Athènes.

© 1993 RMN/Hervé Lewandowski.

Figure 15 : Musicienne se rhabillant sous les yeux de son client.

Image

Coupe, Euphronios, v. 490 av. J.-C., British Museum., GR 1836.2-24.25 (Cat. Vases E 44).

Photographie : ©Jastrow (2006). Source : Wikimedia.

Figure 16 : Maîtresse et sa domestique filant la laine.

Image

Vers 460-450 av. J.-C.

Photo © BPK, Berlin, Dist. RMN-Grand Palais/Ingrid Geske-Heiden.

Érotique

Figure 17 : Scènes de courtoisie.

Image

Hydrie, peintre du Louvre F51, cote cliché : 05-520471, N° d’inventaire : F5, viè siècle av. J.-C, Musée du Louvre).

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski.

Figure 18 : Scène de cour amoureuse.

Image

Skyphos, Numéro d’inventaire : A479, vers 540 av. J.-C.

Crédit : Photo ©RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/les frères Chuzeville.

Figure 19 : Scène érotique

Image

Coupe attique, 510-500 av. J.-C., Musée du Louvre, cote du cliché : 89-003874, N° d’inventaire : G13.

Photo © Hubert Josse, Paris, Musée du Louvre.

Nous avons établi une typologie qui ne tient pas compte de critères liés à l’histoire de l’art, mais à la fonction communicationnelle induite par les images. Ainsi, par le biais d’une analyse de contenu iconographique, nous avons identifié différents thèmes :

  • mythique7 : Épopée du cycle troyen ;
  • religion : scène de banquets divins, scène de sacrifices, scène funéraire, Panathénées et bacchanale, représentation des dieux ;
  • administration : sacrifice, mariage ;
  • politique : en Grèce, le théâtre est une composante de la vie civique et religieuse et de facto peut se situer également dans la rubrique précédente ;
  • militaire : scène de guerre, armement des guerriers ;
  • événementiel : épreuves sportives ;
  • vie quotidienne : scènes de genre, communication sur le style de vie (le mariage selon les scènes choisies a aussi un sens religieux ou politique ou social), la mode, la séduction, les banquets profanes ou symposion – fêtes avec des chants et musiques ;
  • économie : représentation de toutes les activités commerciales et de négoce – scène de marché, pesée du silphium + activités artisanales (potiers, etc.) et rurales (scène de vendanges) ;
  • érotique : scène de prostitution, de pédérastie.

Procédure d’investigation

Nous ne disposons pas d’études de réception qui aient pour objet un corpus archéologique comme outil d’enquête en sciences humaines. Il ne s’agit pas ici d’aborder le vase en tant qu’image à analyser ou à interpréter pour elle-même, comme c’est le cas en arts plastiques et en histoire de l’art, et encore moins d’identifier la personnalité du peintre de vase en utilisant les outils de la psychologie, mais d’en évaluer la pertinence dans le champ de la communication.

Nous avons soumis notre typologie à 15 visiteurs désignés par H : « H comme hall, », à l’entrée de l’aile Sully abritant le département des antiquités grecques, étrusques et romaines du Musée du Louvre et à 15 autres visiteurs désignés par C, « C comme Campana », dans le pavillon Sully, au premier étage, dans les salles de la collection Campana8 acquise par l’empereur Napoléon III en 1861.

L’enquête a été réalisée en octobre 2019 en « face à face », auprès d’un échantillon diversifié constitué de touristes français et de Parisiens non diplômés, Bac + 3, Bac + 5 et Docteurs. L’enquête s’est déroulée pendant les vacances de la Toussaint 2019 durant 4 jours. Quid des profils ? Nous avons choisi un échantillon diversifié (niveaux d’études différents en proportions égales), fondé sur la bonne volonté des répondants.

La collection Campana ne présente pas l’ensemble des items de notre typologie. C’est délibérément que nous avons aussi exclu les entretiens qualitatifs de convenance en micro-trottoir hors du Musée du Louvre pour, dans un premier temps, interroger une population de visiteurs des salles antiques sensibilisée, en principe, aux objets d’art.

Il s’agissait, pour les personnes interrogées de s’attarder, si elles le souhaitaient, sur les vases qui les inspiraient particulièrement, et de répondre à la question : que représente la scène ?

Nous avons proposé les visuels représentant la scène sur le vase agrandi, en reprenant à notre compte les réserves de Laurent Gervereau : « Requalifier impose de délimiter territoires et outils. Entre un tableau et la reproduction d’un tableau, l’objet est totalement dissemblable, les réceptions aussi » (Gervereau, p. 21). Toutefois nous considérons que les photographies des images présentées aux visiteurs n’affectent pas leur forme et leur nature médiatique.

Nous voulions vérifier si les visiteurs pouvaient identifier les différentes situations de communication : autrement dit, le vase grec relève-t-il uniquement de considérations esthétiques ou est-il considéré comme un support de communication sociologique ?

Réception de l’iconographie : des débats contemporains

Il convenait de s’interroger sur la réception aujourd’hui de ces images séculaires. Réception, qui contre toute attente, débouche sur des problématiques et des préoccupations banales et totalement actuelles.

Le « message » des peintres athéniens est-il encore perceptible de nos jours ?

Pour certains historiens, les artisans n’y trouvaient qu’un but lucratif, il n’y avait pas là de volonté intellectuelle de transmission (Berranger Auserve9).

Pour d’autres, les artisans apprenaient à lire l’Iliade et participaient sans le vouloir à la transmission de la culture10 (Deschodt).

S’agissant de la question des œuvres et de leurs interprétations, Privat nous rappelle que Nathalie Heinich plaide pour une approche pragmatique qui, d’une part, analyse « non pas ce qui fait, ce que valent ou ce que signifient les œuvres d’art mais ce qu’elles font », et qui, d’autre part, les « observe en situation », non pas en soi (Privat, 2013, p. 96).

Comment peut-on envisager alors la réception et l’interprétation de ces images sur les panses des céramiques ? Au-delà des diverses approches que nous pourrions utiliser – médiologique, herméneutique, par exemple –, il nous apparaît peu opportun de placer les œuvres dans leur contexte historique pour comprendre ce qu’elles signifiaient. Ce qui compte à nos yeux, c’est bien leur interprétation et leur réception aujourd’hui. Nous pouvons vérifier l’ensemble des hypothèses qui suivent : considérons que le destinataire du vase partageait la même culture que l’imagier (la capacité d’identification des thèmes). Le client, le commanditaire et l’artisan émargeaient au même univers référentiel. Ils se comprenaient sans avoir recours, comme un visiteur aujourd’hui, à « une série d’opérations complexes qui nécessite un apprentissage et laisse une part d’inconnu » (Villanueva Puig, p. 16).

Du côté des visiteurs : Dès lors, comment nos visiteurs interprètent-ils ces signes ?

Quel sens l’iconographie des vases communique-t-elle à un spectateur contemporain non initié ? Existe-t-il un décalage entre la perception actuelle et le sens originel des images ? Autrement dit, comment une communication ancienne (le vase et son iconographie) parle-t-elle aux spectateurs du xxie siècle ? Comment un objet d’art est-il appréhendé dans son actualité ?

Le contexte de la situation de communication est évidemment différent : à l’époque, les Grecs vivent parmi leurs vases ; aujourd’hui, les céramiques sont patrimonialisées et exposées derrière les vitrines des musées. N’oublions pas qu’un objet de musée se construit : « Il existe maints objets où un code a été inscrit dès la conception, d’autres où il a été ajouté ; dans ces cas, l’objet est un support, un livre d’images. Mais aucun objet n’exprime en lui-même, par ses seules caractéristiques physiques, autre chose qu’une volumétrie, une texture, des couleurs » (Clément, 1983, p. 37). C’est le regard constitué à partir d’une réflexion personnelle, d’une idée, d’un discours qui fait l’objet de musée. Est-ce le cas de nos visiteurs ?

Autre remarque, certaines interprétations de la part des répondants – place de la femme, statut de l’éphèbe, rôle de l’homosexualité – sont sujettes à caution, ignorants qu’ils sont du fonctionnement de la société grecque d’alors.

Les résultats sont les suivants : l’ensemble des deux échantillons voit le vase comme un « support », un « outil », voire même un « medium » de communication pour les Grecs.

L’ensemble des répondants qui sortent des salles Campana (groupe C) sont des spécialistes des céramiques ou connaissent bien l’art grec.

Les répondants du hall (groupe H) sont moins, voire peu érudits. Mais quel que soit leur groupe culturel, CSP, âge, C et H, ils mettent en perspective l’image sur le vase et les problématiques contemporaines, les sujets de société.

Les répondants des salles Campana (groupe C) identifient tous les thèmes des vases avec toutes leurs significations symboliques dans la vie sociale des Grecs : mythiques, religieux, politiques, militaires, événementiels, vie quotidienne, économique, érotique.

Ceux du hall du Louvre (groupe H) reconnaissent approximativement le sujet traité sur les vases, mais ont du mal à interpréter la pesée du silphium, la scène de sacrifice, de théâtre, la scène de séduction.

À noter également que le groupe C déclare que le vase est aussi et surtout pensé pour le commerce, mais il voit aussi une volonté délibérée de la part des artisans de communiquer sur la vie de la cité par le biais de leur répertoire iconographique.

Les répondants C reconnaissent les items de notre typologie, mais certains remplacent communication « historique » par « mythologique ». On peut donc faire l’hypothèse qu’ils pensent ainsi que les Grecs croyaient en leurs mythes. Ce qui est loin d’être un avis unanimement partagé par nombre d’historiens, qui envisagent plutôt les « situations complexes où le mythe remplit une fonction sociale sans être tout à fait pris au sérieux pour lui-même » (Berranger-Auserve) (Veyne, 1985, p. 163).

Des résultats surprenants : la passion encore d’actualité !

Nous avons montré une image présentant Achille et Penthésilée. Alors que nous attendions des remarques sur le style d’Exékias, le traitement de la scène ou encore des considérations esthétiques, les répondants nous ramènent à des considérations triviales. Ainsi, nous avons pu vérifier les hypothèses de Michel Meyer pour lequel la passion est d’actualité :

Issue des Grecs, qui n’ont cessé de méditer sur la passion, nombre de nos contemporains la voient comme l’alternative à une vie quotidienne par trop réglée. Antidote peut-être fantasmatique d’une société de masse à laquelle chacun pense pouvoir échapper, la passion est devenue l’espérance secrète de beaucoup d’entre nous (Meyer, 2007, p. 13).

Figure 5 : Achille et Penthésilée.

Image

Amphore, Exéchias, N° d’inventaire : 1836,0224 .127 (530-525 av. J.-C. British Museum)

Photo © The British Museum, Londres, Dist. RMN-Grand Palais/The Trustees of the British Museum.

Cette scène est-elle sibylline pour l’ensemble des deux groupes ?

Sans doute, puisque le groupe H, constitué de personnes non spécialistes n’identifie pas la scène mythologique.

Alors que le groupe C reconnaît facilement le célèbre vase réalisé par Exékias, une amphore du British Museum représentant Achille et Penthésilée. L’un d’entre eux nous recommande de lire le commentaire de Malraux dans L’Univers des formes :

Achille se penche vers l’amazone Penthésilée qui se redresse vers lui. Et de fait, suggère sans doute un sentiment voilé, l’amour dont Achille fut frappé au moment même où il transperçait la reine des Amazones, Penthésilée (Malraux in Charbonneaux, p. 102).

La plupart des verbatims des groupes C et H évoquent une thématique psychosociale bien d’actualité : « C’est le syndrome de Stockholm » ; « Cela me rappelle les relations bourreau victime ; c’est la mode des pervers manipulateurs. Depuis Nazare-Aga et Les Manipulateurs sont parmi nous et Mon Roi, le film de Maïwen, nous sommes cernés. ». « C’est comme dans l’émission de téléréalité Mariés au premier regard. » ; « Cela me rappelle Bourdieu dans La domination masculine quand il définit l’amour comme une « trêve miraculeuse où la domination semble dominée » (Bourdieu, 1998, p. 117-118) ; « Les femmes frappées de bovarysme ont toujours eu besoin de souffrir pour tomber amoureuses ». En cela les répondants corroborent les remarques des psychosociologues :

Il semble que les émotions fortes et les activations physiologiques soient des facteurs favorisant la réceptivité au lien sentimental et amoureux (Guegen, 2014, P. 5).

En conclusion, les observations – qu’elles correspondent à lieux communs ou soient plus érudites – relèvent du registre psychologique ou sociologique et non de l’ordre du registre esthétique.

Sommes-nous instrumentalisés par les princes qui nous gouvernent au xxie siècle ?

Lorsque nous proposons l’image d’un monarque prélevant l’impôt de ses sujets, là encore les réflexions peuvent surprendre. Le message du peintre qui n’avait qu’un rôle référentiel informatif selon Jakobson (immortaliser une scène quotidienne) devient prétexte à polémique dans les deux groupes (Jakobson, 1963, p. 216). Il s’agit de la Pesée du silphium (plante médicinale et condimentaire) : les répondants C et H classent la scène dans la thématique économique de la typologie. Ils ne semblent pas connaître cette denrée, mais envisagent tous une scène à caractère économique : « C’est la remise des impôts à un chef » ; « une livraison de céréales ». L’un d’entre eux cite Hérodote :

Cyrène reçoit des cités grecques de l’huile, du vin, des céramiques. Elle leur envoie du blé et le sylphion11.

Figure 11 : Pesée et emmagasinage du silphium avec Arcésilas II.

Image

Coupe (560 av. J.-C, BnF), note de l’image : NQ-B-001638, n° inventaire : VASE 189 De Ridder189, inv.65.4899 et inv.52bis.2707.

Photo © Marie-Lan Nguyen/Wikimedia Commons/CC-BY 2.5.

Il s’agit de la pesée d’une denrée en présence du roi d’Arcésilas. Les répondants évoquent à l’envi la période contemporaine : « Cela n’a pas changé depuis et avec nos impôts », « Même si on essaie de nous dire le contraire, Macron et les autres sont des princes, des monarques absolus », « Les médias nous montrent combien nos gouvernants sont malhonnêtes, les scandales abondent », « Même l’émission politique Ambition intime nous présente les candidats à l’élection présidentielle avec une démagogie absolue ».

En conclusion, nous pouvons dire que l’ensemble des répondants (C + H) ramène la scène aux abus du pouvoir politique largement exposés et médiatisés de nos jours. L’image se transforme en outil polémique au xxie siècle.

Entre haute et basse culture : la lutte des classes

Figure 8 : Scène de théâtre.

Image

Peintre du BM F 63 (ive siècle av. J.-C.), cratère, Cote cliché : 96-000761, N° d’inventaire : K404, Paris, Musée du Louvre.

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Gérard Blot.

Nous présentons une scène de théâtre issue de notre typologie pour vérifier le niveau de connaissance des différents groupes. Les répondants C classent la scène dans la thématique politique de la typologie mais hésitent avec la thématique religieuse :

Le théâtre à Athènes comme dans toute la Grèce est bien une cérémonie religieuse dédiée à Dionysos.

Les C identifient une scène de tragédie et complètent leur réflexion : « Le théâtre est organisé aussi de façon à instaurer un support pour la communication avec les dieux, une communication transcendantale » ; « Le théâtre d’Euripide remet en question la valeur des attitudes des dieux et de leurs actions sur les hommes et leur condition » ; « Le public crie, siffle et applaudit durant les comédies et hurle d’horreur pendant les tragédies. » Le groupe C est manifestement familiarisé avec cette thématique mais digresse sur des considérations générales : « Le public d’aujourd’hui est encore moins civilisé. Il n’y a qu’à voir les tribunes des matchs et les hooligans… » ; les C abordent aussi l’aspect social : « La façon dont les citoyens se placent dans le théâtre correspond à l’organisation de la cité ». À partir de quoi d’aucuns brodent et expliquent que le théâtre engagé existe encore à notre époque, mais qu’aujourd’hui il n’y a plus de hiérarchie sociale. Certains ajoutent : « Les publics empêchés ne se rendent pas dans les lieux de culture, malgré l’existence des maisons de quartiers. » ; « Ce type de spectacle était très intellectuel et réservé à une élite, tout comme aujourd’hui, c’est pour la haute culture bourdieusienne ».

Les répondants du Hall classent l’image du vase dans la catégorie « vie quotidienne ». Ils expliquent : « Les spectateurs de marque sont au premier rang et les places sont attribuées en fonction des catégories sociales mais c’est encore le cas au xxisiècle. » « Comme dans la Grèce antique, autrefois à la Comédie française les gens du peuple étaient relégués au poulailler et hurlaient pendant les spectacles. » ; « Les sujets étaient très élitistes dans l’Antiquité, comme maintenant au festival d’Avignon qui est le règne des bobos. Les gens non cultivés ne peuvent pas adhérer. »

Ainsi les répondants C et H s’en tiennent-ils à des théories élaborées dans les années mille neuf cent soixante pour expliquer les fortes inégalités d’accès à la culture et aujourd’hui remises en cause.

L’émergence de nouveaux rituels religieux au xxie siècle

Figure 6 : Sacrifice d’un jeune sanglier et inscription kalos.

Image

Coupe attique à figures rouges, v. 510–500 av. J.-C. Louvre, n° G 112.

Crédit photo : ©Jastrow.

Une scène de sacrifice d’un sanglier est dévoilée à nos différents publics. Les répondants C et H classent la scène dans la thématique religieuse de la typologie et l’identifient sans difficulté. Ils déclarent savoir que les pratiques sacrificielles sont courantes et très codifiées et servent à honorer les dieux. Les Campana développent leur maîtrise du sujet :

Les différentes parties de l’animal sont réparties selon une hiérarchie sociale déterminée : les os pour les dieux ; le sang et les abats – la part d’honneur – pour les prêtres et les magistrats ; les chairs et le muscle étaient attribués aux hommes.

80 % des répondants pensent que le sacrifice en général a une fonction uniquement religieuse. Alors que les historiens affirment que, selon le moment choisi représenté (ici, la découpe), il a aussi une fonction politique.

Les répondants spécialistes et non spécialistes évoquent d’autres rituels religieux : la nourriture casher et hallal dans les écoles. Ils en profitent pour faire dévier l’entretien sur les débats sociétaux contemporains. Leurs propos sont parfois tranchés et semblent corrélés à leurs situations professionnelles et à leurs opinions politiques. On peut alors avancer une hypothèse conforme aux observations de Willem Doise relatives à la représentation sociale différenciée derrière lesquelles les répondants se réfugient : les représentations sociales sont des phénomènes complexes, agissant dans la vie sociale et composées d’éléments divers longtemps étudiés de façon isolée : attitudes, opinions, croyances, valeurs, idéologies (Doise, 1985, p. 45). In fine, la scène n’est pas commentée sur le plan stylistique mais demeure prétexte à polémiques.

Communication autour de la sexualité : la confrontation du bien et du mal

Figure 17 : Scènes de courtoisie.

Image

Hydrie, peintre du Louvre F51, cote cliché : 05-520471, N° d’inventaire : F5, viè siècle av. J.-C, Musée du Louvre).

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski.

Les répondants H et C sont ensuite mis en présence d’une scène qualifiée de « scène de courtoisie » par les muséographes du Louvre. H et C vont se retrouver confrontés à leurs limites morales et à des questions éthiques. Conformément aux recherches du philosophe Norbert Campagna qui s’interroge sur les critères permettant d’opérer une distinction morale entre les actes sexuels, on peut se demander si le consentement des participants suffit. Doit-on exiger que ce consentement repose sur un sentiment amoureux ? Le droit pénal est-il seul garant de ces critères qui distinguent les actes sexuels légaux de ceux interdits ? (Campagna, 2010, p. 156). En effet, des pratiques parfois recommandées dans l’Antiquité, tolérées à l’époque moderne sont aujourd’hui sanctionnées. Confrontés à ces normes, comment vont réagir nos échantillons ?

Les répondants des salles Campana classent la scène dans la thématique « vie quotidienne ». Ils identifient le sujet : « Le skyphos du peintre d’Amasis représente une scène de conversation amoureuse riche en symboles, qui illustre la pratique sociale de la pédérastie. » ; « Le processus éducatif par le biais de la pédérastie (« paidea ») est la combinaison d’une relation pédagogique et d’une relation érotique qui lient l’adulte au jeune Grec. » Le groupe C déclare savoir que « la séduction consiste en un don par le partenaire âgé » ; « La relation érotique codifiée entre adultes et adolescents joue un rôle social éducatif. » Autre verbatim : « Il s’agit d’une hétaïre, une courtisane, représentée en blanc qui reçoit une fleur et une poule. Les autres couples masculins sont composés d’un homme barbu, l’éraste, offrant un présent à un éromène. » Pour un C : « La femme monnaie des services sexuels dont elle vit. Une femme libre au sens de non-esclave. Pour une esclave prostituée, on paie le maître qui loue le corps de son esclave, on ne fait pas de cadeaux à l’esclave. » Pour un autre C : « Périclès se rendait dans la maison de son hétaïre Aspasie, une femme métèque, sa femme légitime restant à la maison. Il ne devait pas venir les mains vides. À sa mort, Aspasie s’est fait entretenir par un autre homme politique de la même tendance politique que son ancien amant. » Les C laissent une impression d’érudition et évoquent les pratiques sexuelles avec une grande décontraction.

L’analyse de contenu du discours de l’échantillon Campana révèle le « caractère naturel » de ces pratiques aujourd’hui prohibées et l’absence de malaise de la part des répondants. La presque totalité regrette toutefois que les boutiques de souvenirs à Athènes « vendent surtout ce type de scènes : statuettes ithyphalliques, ouvrages sur la sexualité antique, donnant ainsi à voir, à l’aune d’une interprétation moderne, une vision stéréotypée des pratiques sexuelles grecques ».

Les répondants H pensent à une scène de communication commerciale et d’échanges marchands. Ce qui n’est faux qu’en apparence, puisqu’il s’agit là d’« achat de faveurs » dans le glossaire des historiens d’art.

Nouvelle image : scène de séduction

Nous dévoilons une seconde image présentant une conversation amoureuse entre hommes pour vérifier si le groupe H (qui n’avait pas identifié le sens de la scène de courtoisie) trouve finalement le sens de la première scène.

Figure 18 : Scène de cour amoureuse.

Image

Skyphos, Numéro d’inventaire : A479, vers 540 av. J.-C.

Crédit : Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/les frères Chuzeville.

Pour ce groupe H non spécialiste, cette représentation est un « sujet sensible », car elle porte sur un thème à connotation polémique aux frontières du risque, de la crise et de l’acceptabilité sociale. Au bout du compte, l’ensemble des répondants comprend le connoté de la première scène de courtoisie (sans gestuelle érotique avérée) grâce au dénoté de la seconde image (de cour amoureuse) à caractère sexuel : « Ah mais alors la scène d’avant c’est une scène de drague sexuelle ! » L’échantillon H semble gêné et nous notons l’importance du paraverbal et du non verbal (raclement de gorge, ton de la voix abaissé, trichotillomanie, geste d’autocontact, croisement des bras qui traduisent une fermeture…).

La grande majorité exprime son désaccord et pointe du doigt l’aspect malsain : « cocasse » ; « porno » ; « choquant » ; « pas imaginable » ; « décadent » ; « pédophile » ; « gênant » ; « c’est de l’art mais ça craint ». Ainsi, le traitement du témoignage a conduit le public « à examiner et confronter ses propres valeurs (bien/mal) » (Idjéraoui-Ravez, 2008), c’est-à-dire leurs critères de jugements normatifs sur les pratiques sexuelles représentées.

Nouvelle image : Scène érotique

Figure 19 : Scène érotique.

Image

Coupe attique, 510-500 av. J.-C., collection Campana, Musée du Louvre, cote du cliché : 89-003874, N° d’inventaire : G13.

Photo © Hubert Josse, Paris, Musée du Louvre.

Nous présentons enfin une dernière image ainsi enregistrée dans la base Joconde du Louvre : « scène érotique, collection Campana ». L’objectif est d’évaluer le seuil de tolérance à « l’érotisme » et de mesurer l’intensité des réactions des répondants. Sur cette nouvelle iconographie, pour l’échantillon C :

Je pense qu’il s’agit d’une scène homosexuelle (trois adultes ?) ou pédératisque (deux adultes et un jeune ?). L’image ne permet pas d’évaluer clairement l’âge des personnages. Les C ne semblent pas gênés.

Les H restent franchement plus mal à l’aise. Le dispositif communicationnel est bien opérant. Pourquoi une telle attitude devant des reproductions d’images grecques à figures rouges, alors qu’il ne s’agit pas de photos de Playboy ?

Dans un climat de banalisation de la pornographie, cette réaction peut surprendre : il s’agit d’œuvres d’art, la statuaire antique exalte le corps nu et la pratique de la pédérastie dans l’Antiquité est connue, quel que soit le groupe culturel interrogé. S’il y a « érotisation du regard par la diffusion des images artistiques, archétype de l’imagerie érotique européenne, faite pour le plaisir des yeux, l’exposition dans des musées publics gomme aujourd’hui les destinations initiales de ces œuvres » (Bertrand, 2008, p. 39).

Désormais, les représentations à connotation sexuelle abondent dans l’espace public, le meilleur exemple restant le « porno chic » dont la publicité fait son miel. La société contemporaine est surexposée aux images sexuées. Que ressentent donc les citoyens face à ce phénomène ? « Si donc il ne faut pas confondre la pudeur et la honte, elles sont cependant liées l’une à l’autre, en ceci que seul le pudique peut éprouver de la honte. Le passage de la pudeur à la honte est possible ! Et l’événement qui provoque ce passage n’est rien d’autre que le regard d’autrui. « L’homme ne rougit de rien quand il est seul » (Fiat, 2007, p. 23).

Dans le cas qui nous occupe, le contexte de la communication joue à plein : les répondants du groupe H qui se sentaient gênés étaient accompagnés par leur conjoint ou par de jeunes enfants qui ne regardaient pourtant pas le visuel. Les répondants évoquent la prostitution en Thaïlande et digressent rapidement sur ce problème de société – le tourisme sexuel.

Les peintures érotiques sur les vases étaient créées exclusivement pour agrémenter les symposions, elles n’étaient pas destinées à une exposition quotidienne. Si tant est qu’il agrémente quoi que ce soit, ce type de vases constitue l’équivalent contemporain des films pornographiques, sans qu’on puisse parler d’une exposition offerte à tous et partout. Ainsi les répondants feraient preuve de ce que l’on pourrait appeler le sens commun, qui « contrairement à une conception élitiste, n’est aucunement de l’ordre de l’ignorance ou de la pensée illogique ou erronée. Il s’agit en fait d’un savoir riche, d’une pensée structurée, d’un genre de science populaire » (Moscovici, 1992, p. 5).

Communication institutionnelle : légalisation de la prostitution ?

Figure 7 : Cortège de mariage attique.

Image

Pyxis tripode à figures noires, vers 530 - 520 avant J.-C. Athènes. MNB 508.

© Musée du Louvre. Photo RMN/H. Lewandowski.

Enfin, pour étudier la réception des images ordonnancées dans la catégorie « vie quotidienne » de notre typologie, nous présentons une planche représentant un cortège de mariage. Les visiteurs des salles Campana classent bien la scène dans la thématique vie quotidienne. Pour 80 % des répondants C, le mariage a une fonction religieuse et sociale. Ils oublient la composante politique. Cela s’explique puisqu’ils ne s’attachent qu’à la scène présentée sur la photographie. Le mariage est un thème de prédilection des imagiers : ils nous rapportent les préparatifs de la mariée ou la procession qui conduit la fiancée dans la maison de son futur époux. Les C commentent la place de la femme : « Dans l’épopée homérique, la femme jouit d’un statut privilégié : elle est la maîtresse du domaine foncier, détient les clés du trésor, s’occupe des rites d’hospitalité, dirige le personnel » ; « Avec l’avènement de la démocratie, la femme est exclue de la participation politique. Elle est mineure juridiquement, reste en marge des décisions politiques. Pourtant, elle garde un rôle fondamental dans la transmission de la citoyenneté, surtout après 451, date à partir de laquelle le futur citoyen doit être obligatoirement né de mère et de père athéniens. »

Les répondants Hall classent la scène ci-dessous dans l’item religieux. Ils identifient « un cortège, une cérémonie, un enterrement, une fête ».

La moitié des répondants C et H remarque que la femme n’a eu le droit de vote qu’en 1947 en France, d’autres affirment que cela amène forcément à évoquer la question de l’identité nationale. Quelqu’un rappelle le sort réservé au problème de la légitimité de la nationalité allemande soulevé par les nazis. Un autre ne manque pas d’introduire la référence aux condamnés bénéficiaires d’une double nationalité. C’est bien ce en quoi l’image est prétexte à l’ouverture de débats sur les questions brûlantes de l’actualité la plus immédiate.

Figure 15 : Musicienne se rhabillant sous les yeux de son client.

Image

Coupe, Euphronios, v. 490 av. J.-C., British Museum., GR 1836.2-24.25 (Cat. Vases E 44)..

Photographie : ©Jastrow (2006). Source : Wikimedia.

Nous dévoilons aux deux groupes une autre image, une musicienne se rhabillant, pour vérifier notre hypothèse selon laquelle le groupe H, non averti, n’y verrait qu’une scène conjugale ou d’échoppe, alors que les groupes des salles Campana reconnaîtraient ce thème classique dans la culture antique. Les C l’identifient comme une scène de prostitution. « Dans les faits, la femme mariée, l’épouse garde la maison, engendre les enfants. » ; « De son côté, la concubine (la palaké) peut être une citoyenne, une femme libre ou une esclave. Elle n’appartient pas à l’oikos (patrimoine) de l’homme ; l’hétaïre monnaie ses faveurs et demeure seule à circuler librement dans la cité. »

Pour les répondants C, « la prostitution est une activité légale. Il existe des maisons de plaisir ». À propos de la place de la femme dans la société grecque, l’ensemble des C évoque immédiatement la prostitution : « Cela serait mieux de rouvrir les maisons closes » ; « Les nouvelles mesures relatives à la prostitution sont dignes de Tartuffe » ; « La société française est hypocrite » ; « Les Grecs avaient raison : c’est une chose nécessaire à légaliser ». L’un des répondants C cite le Pseudo Démosthène12 :

Nous avons les courtisanes en vue du plaisir, les concubines pour nous fournir les soins journaliers, les épouses pour qu’elles donnent des enfants légitimes et soient les gardiennes fidèles de notre intérieur.

Les répondants H admettent ne pas reconnaître la scène.

Que pouvons-nous conclure et affirmer ?

Nous avons constaté dans l’analyse des réponses apportées par les visiteurs que les images des vases sont prétextes à évoquer l’actualité, les questions plus ou moins sensibles ou polémiques qui agitent la société française contemporaine.

Certains visiteurs hellénistes interrogés sont très au fait de la vie du monde grec antique. Cela n’empêche en rien les visiteurs-béotiens de fournir des remarques pertinentes.

Les répondants mettent en perspective les scènes des vases, l’actualité, et leurs préoccupations. Cette attitude montre le pouvoir d’évocation significatif des images des vases malgré la distance temporelle.

Les scènes sont bien identifiées par les répondants C, visiteurs avertis à l’exception des situations complexes comme les sujets sensibles ou rituels sacrés. S’agissant des Grecs anciens, « le destinataire sans lequel on ne peut envisager la production d’images partage la même culture que l’imagier. Le client, le commanditaire et l’artisan participent du même univers référent. Ils se comprennent directement sans la nécessité de recourir, comme c’est le cas pour nous aujourd’hui, à une série d’opérations complexes qui nécessitent un apprentissage et laissent une part d’inconnu » (Villanueva, 2014, p. 16).

Le groupe des visiteurs H identifie approximativement les différentes thématiques communicationnelles, mais s’en tient aux stéréotypes contemporains et au degré de généralité d’une opinion indistincte.

C’est le cas aussi du groupe C lorsqu’il dérive sur l’actualité et les problèmes de la société aujourd’hui.

Le vase comme média ?

Lorsqu’on demande aux répondants de définir non la fonction des vases mais le message sur les vases, les verbatims sont explicites13. Pour ceux qui sont familiarisés avec l’histoire grecque, « les vases grecs restent les seuls témoins de ce que devait être la « grande peinture » en Attique. S’ils sont des objets usuels et non des tableaux, leur décor est en rapport avec leur usage. Ils n’en demeurent pas moins des supports de communication – voire des médias. » ; « Les peintres s’inspirent de la vie quotidienne : entraînement sportif, cortège, banquet nuptial, activité féminine au gynécée, rituel religieux… De nombreuses scènes de la vie quotidienne nous sont ainsi connues et ces images constituent pour les historiens et les sociologues une documentation précieuse » ; « Si l’on parle de médium, le peintre ne peut se confondre avec un photographe puisqu’il opère des choix, mais il les mixe : il emprunte des éléments à la réalité et les mêle parfois à des ornements imaginaires. » 

Cette iconographie se présente alors comme un langage (et qui dit langage dit communication) dont il faut apprendre la syntaxe. Ces images ne sont pas des tableaux indépendants mais ils assument les rôles des documents journalistiques – des reportages – sur la vie quotidienne dans la cité d’Athènes entre le viè et le ivè siècle avant J.-C. »

C’est bien cette perspective de travail qui a guidé notre recherche de terrain, lorsque les répondants se sont posé la question du statut « médiatique » des vases. L’iconographie des vases est porteuse de sens, et les transforme en un « média ». Ces objets usuels, supports d’informations sociologiques, sont considérés comme « médias » aujourd’hui même s’ils sont pensés à une époque où le terme (sinon la fonction) n’existe pas. Voici quelles ont été nos problématiques.

Au Ve siècle, l’information se réduisait à des récits rapportés par les érudits. Ils seront traduits en latin à l’époque romaine, recopiés par les moines dans les scriptoria, pour échouer aujourd’hui entre nos mains.

Dès cette époque, l’art n’est-il pas un « média », au sens où on l’entend aujourd’hui, puisqu’accessible au plus grand nombre dans l’espace public, les lieux de culte et la décoration ? N’est-on pas légitimé à voir dans l’art un outil d’enseignement, d’information et de communication pour les Grecs ?

L’ensemble des deux échantillons considère le vase comme un « support », un « outil », voire même un « médium » de communication pour les Grecs grâce aux images représentées. « Les édifices romans sont des bibles illustrées, le vase est une sorte de journal, témoignage des us et coutumes, des mythes, des rites des Grecs anciens. » « Les scènes sur les vases sont des BD antiques ». « C’est un média qui communique sur les « marques » – la notoriété des potiers – sur la fortune des commanditaires ». « C’est un média qui parle certes du quartier du Céramique mais surtout qui raconte la richesse culturelle de la civilisation grecque ».

C’est donc à dessein que nous avons demandé aux répondants de préciser le terme de « média », qu’ils utilisent dans son sens le plus usuel, celui de « moyen de diffusion de l’information », suivant en cela tel historien d’art qui affirme que « l’art plastique s’avère être le support vassal et concret de la religion14 »(Bucaille, 2003). « Ces vases média sont des mass-média avant l’heure, ils font œuvre de documents, de propagande, placés qu’ils sont au service du prosélytisme d’Athènes, au même titre que les rares récits de la vie religieuse et quotidienne de la cité sous Périclès », explique un professeur d’art plastique interrogé dans la salle Campana. Les vases sont des BD avant l’heure. Si l’on en croit la définition des médias par Éric Dacheux, nos vases seraient des médias caractérisés, à la fois comme supports de communication dotés de particularités techniques spécifiques (le vase-multicadre), une production assimilable à une industrie culturelle (la première dans l’Antiquité) et une médiation singulière entre un public (les clients des potiers) et des auteurs (les artisans-peintres) – « une mise en images et en textes d’un récit proposant une narration segmentée […]. Les scènes sur les vases en frise procurent un plaisir lié à leur double nature artistique et médiatique » (Éric Dacheux, p. 12). Ainsi, les répondants confortent-ils cette observation :

Dans les processus réels de communication culturelle, nul ne peut prétendre dire : « J’ai transmis ma pensée ». De manière générale, on peut dire que si nous transmettons quelque chose de précis aux autres, il est difficile de savoir quoi. De plus, si nous le pouvons, c’est sur un fond de participation à une production de sens incessante et collective que nous ne contrôlons pas. (Jeanneret, 2002).

Conclusion

Toutes les études sur la « représentation » (iconique ou autre) soulèvent des questions plus générales : que disent-elles ? Que disent les vases grecs sur la société grecque ? Par ailleurs, on sait depuis longtemps qu’une « représentation » est à la fois une image et l’image que l’on a de cette image, ce que l’on va voir, de quelle façon et pourquoi.

Les lignes qui précèdent tendent bien à démontrer que les scènes peintes sur les vases à l’époque sont le miroir fidèle des forces à l’œuvre dans une société, à un moment donné de son histoire. Elles reflètent avec une certaine précision la mentalité dominante pour au moins deux raisons :

L’imagerie des vases est le résultat d’une entreprise certes individuelle, mais également collective ; elle est donc protégée contre le maniement arbitraire du matériau dont les peintres disposent, le caractère codé de la production/fabrication du vase neutralisant toute tendance individualiste.

Les vases sont conçus pour les masses, quand bien même celles-ci sont-elles limitées en nombre. Puisqu’il s’agit de satisfaire le désir des masses, les vases sont révélateurs des désirs de ces mêmes masses.

À ce titre, les réactions du public contemporain lors de notre étude garantissent un reflet tout aussi fiable du climat mental de la société contemporaine.

Les représentations qui s’offrent à nous sont révélatrices de l’imaginaire athénien.

Néanmoins l’image n’est pas le reflet fidèle d’une réalité sociale, elle résulte d’une mise en scène, d’un montage d’éléments pertinents choisis par le peintre. Ses constructions sur l’espace du vase véhiculent des valeurs et transcrivent des idées : à travers ses représentations la société se voit et se donne à voir (Darthou, 1999).

Question : pourquoi les Grecs ont-ils fait du vase de terre cuite un support privilégié pour diffuser leur imagerie ? Pour y répondre, Charles Dugas a évoqué l’absence de papier dans le monde antique. Cette explication n’emporte pas la conviction.

Aujourd’hui, on explique plus volontiers le développement du vase grec par des raisons d’ordre sociologique : il aurait eu valeur de marqueur social. En effet, il était perçu comme un objet de prestige. Il est avéré que son acquéreur aspirait symboliquement – par son acquisition – à un statut social d’exception. Pourquoi revêtir des récipients fonctionnels d’un décor sans fonctionnalité qui, pour un artisan aguerri, réclamait du temps, augmentant ainsi considérablement le coût de fabrication ? Quelle était la valeur respective du vase nu et de sa version décorée ? « Le ratio du nombre de tessons avec et sans ornementations prouve que la différence devait être d’importance ». À ces divers titres, le vase mérite une investigation avec les outils proposés par les SIC ; on pourrait tout autant procéder identiquement avec la sculpture, les bas-reliefs, etc. Il est d’ailleurs frappant d’observer combien les auteurs de La Cité des images, dans leur désir de faire parler les vases, n’ont « pas hésité à mutiler l’objet auquel ils se réfèrent, puisqu’on ne voit que les détails des vases et non pas le vase dans son ensemble » (Didier Martin, 1992, p. 367). Ils se sont intéressés à l’imaginaire social de la Grèce classique. Il découle de leur travail que le rapport du spectateur à l’iconographie céramique doit être distingué non par son usage, mais par la façon dont on l’aborde. Le spectateur athénien ne se déplace pas à l’intérieur d’un espace figuré, il est mis en présence d’objets qui circulent, d’images qu’il perçoit et qu’il peut associer à d’autres. Le vase porteur d’images est omniprésent dans la cité grecque, surtout à Athènes, cité des images : par le truchement d’une céramique prodigieusement variée, elle se donne elle-même en spectacle et met en scène son propre imaginaire. Pour d’autres, « la céramique a servi à véhiculer l’idée d’une primauté athénienne dans le domaine des techniques et du savoir-faire. Son succès même a contribué, on le sait, à l’identité de la cité » (Verbanck-Pierard, 2014, p. 35).

Quoi qu’il en soit, la céramique grecque a toute légitimité pour devenir un objet d’étude autrement qu’en termes d’esthétique, puisqu’elle accède au statut d’outil de citoyenneté et que l’artisan part à la conquête de l’espace démocratique en présentant, entre autres, des informations relatives à la vie dans la Grèce antique, à l’histoire des institutions, à des situations de communication spécifiques. Les vases enrichissent les données archéologiques et sont un précieux témoignage des contacts établis par les Grecs et de la diffusion de la culture hellène à différentes époques. Ils deviennent à ce titre des outils de communication patrimoniale. Les auteurs s’entendent en tout cas sur le fait que le vase est un peu plus qu’une source d’information, car il suscite un feedback de la part du récepteur en raison de la richesse des thèmes qu’il aborde, parfois même des sujets « sensibles », en tout cas aux yeux de nos contemporains.

Nos répondants ont profité des images pour évoquer des thèmes de société et digresser sur les phénomènes qui agitent les sociétés modernes : sexisme, religion, place de la femme, sexualité. Par définition, la communication pose la question de l’autre. Elle implique une relation par le biais de laquelle les êtres humains cherchent à partager, séduire et convaincre. Les récepteurs peuvent « négocier, filtrer, hiérarchiser, refuser ou accepter » les messages. Si les vases grecs restent les seuls témoins de ce que devait être la « grande peinture » en Attique, il n’en reste pas moins que l’iconographie de ces objets d’art leur confère leur statut de puissant outil (voire de média) de communication. Grâce à l’interprétation actuelle des représentations iconiques sur les vases, nous avons vérifié si les visiteurs pouvaient identifier les différentes situations de communication : pour les répondants, le vase grec ne relève pas uniquement de considérations esthétiques mais il est considéré comme un support de communication, un média à part entière.

Toutefois, cette discussion sur les notions de média, médium, mass media ne doit pas être laissée aux visiteurs interrogés au Musée du Louvre mais assumée in fine grâce à la mise en perspective des lectures et des enquêtes de terrain. Conformément aux observations de Marshall McLuhan, le média est le véhicule d’une information : le vase en l’occurrence, comme du papier ou un écran, alors que médium c’est l’outil qui permet de produire le langage sur ce même véhicule : la peinture représentant des scènes historiées sur le vase comme la voix, l’écriture, la vidéo…

Les auteurs nous confortent en ce sens : le vase est un média ; son décor est un médium ; son usage fut un média de masse.

Le vase s’inscrit donc toujours dans une temporalité qui lui est propre, selon les époques, les mœurs, les conventions, etc.

Nous pouvons nous interroger : quand bien même les vases grecs demeureront dans le temps, nul doute que la communication, elle, ne cessera d’évoluer. Les vases pourront alors s’inscrire dans ces évolutions, inexorablement… et resteront toujours des « sujets d’actualité ».

1 Voir le site https://breakrulesnotnails.wordpress.com/tag/ancient-greek-pottery/ [consulté le 3-05-2019].

2 Voir le paragraphe intitulé « procédure d’investigation » dans cet article.

3 Indicateurs Unesco pour la culture et le développement [En ligne] URL : https://fr.unesco.org, p. 1, [consulté le 10 juillet 2021].

4 Conception éditoriale : Christophe Hugot, Giorgos Sanidas. Évaluation : Michèle Gellereau, Juliette Dalbavie, Laboratoire Geriico, Lille3.

5 Exposé au musée Saint-Raymond de Toulouse en 2016, l’objet n’était pas présenté sous cette forme interactive mais à l’aide d’enceintes qui

6 https://www.club-innovation-culture.fr/le-vase-qui-parle-un-dispositif-numerique-de-mediation-innovant-et-itinerant/[consulté le 21-01-2019].

7 Nous avons adopté le terme mythologie et non celui d’histoire. En effet, pour Danièle Berranger-Auserve, les Grecs ne croyaient pas en leur Panthéon

8 Notre iconographie ne provient pas entièrement de cette collection mais nous souhaitions contextualiser l’enquête pour bien comprendre la situation

9 Berranger-Auserve Danièle, entretien du 13 juillet 2016.

10 Deschodt Gaëlle, entretien du 4 octobre 2016.

11 Histoire (livre IV),ve siècle av. J.-C.

12 Pseudo Démosthène, Contre Nééra, 118.

13 L’analyse de contenu révèle qu’une proportion de 80 % relève de la fonction « usuelle et objet d’art » alors qu’une proportion de 70 % peut être

14 Richard Bucaille, ethnologue, entretien du 14-12-2003.

Bibliographie

Baetens, Jan (2014), « Le médium n’est pas soluble dans les médias de masse », Hermès, La Revue, vol. 3, n° 70, p. 40-45 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.3917/herm.070.0040 [consulté le 27-09-2021].

Bertrand, Régis (2008), « La nudité entre culture, religion et société », Rives nord-méditerranéennes, n° 30, [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/rives.2283 [consulté le 27-09-2021].

Beyaert-Geslin, Anne (2008), « De la texture à la matière », Protée, vol. 36, n° 2 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.7202/019026ar [consulté le 27-09-2021].

Boardman, John (2001), The history of Greek vases: potters, painters and pictures, Londres, Thames & Hudson.

Bouineau, Jacques (dir.) (2016), Antiquité, art et politique, Paris, L’Harmattan.

Bourdieu, Pierre (1998). La domination masculine, Paris, Seuil, 134 p.

Bucaille, Richard, Malaurie, Laurent, Piccand, Nathalie (2003), L’art plastique, une forme habitée par une idée, Plasticiens du Puy-de-Dôme, catalogue de l’exposition, Clermont-Ferrand, Conseil général du Puy-de-Dôme.

Campagna, Norbert (2010), « Nature ou dignité : quel critère pour l’éthique sexuelle ? », Revue d’éthique et de théologie morale, n° 261, p. 155-184. DOI : https://doi.org/10.3917/retm.261.0155.

Clément, Bernard, Barbier-Bouvet, Jean-François, Ambroise, Georges [et al.] (1983). Histoires d’expo, Paris, Centre Georges Pompidou.

Dacheux, Éric (2009), La bande dessinée, Art reconnu et média méconnu, Hermès, La Revue, vol. 2, n° 54 [En ligne] URL : https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2009-2.htm.

Dambrun, Michaël, Guimond Serge et Michinov Nicolas (2003), « Les composantes automatiques et contrôlées des préjugés ethniques », Revue internationale de psychologie sociale, t XVI, n° 1 ; p. 71-96.

Damet, Aurélie (2011) « “L’infamille”. Les violences familiales sur la céramique classique entre monstration et occultation », Images re-vues, n 9 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/imagesrevues.1606 [consulté le 28 septembre 2020].

Darras, Bernard et Belkhamsa, Sarah (dir.) (2010), Objet et communication, Paris, L’Harmattan/MEI.

Darthou, Sonia, Strawczynsky, Nina, Frère, Dominique (1999), Du vase à l’image : le monde des Grecs et des Étrusques d’après les collections d’Auvergne, Clermont-Ferrand, CRDP.

Davallon, Jean (1999), L’exposition à l’œuvre. Stratégie de communication et médiation symbolique, Paris, L’Harmattan.

Dayan, Daniel (1992), « Les mystères de la réception », Le Débat, no 71, 1992, p. 141-157.

Deschodt, Gaëlle (2011), « Modes de figurations des dieux en Grèce ancienne. Le cas du sacrifice », Images Re-vues, n°8 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/imagesrevues.502.

De la Genière, Juliette (dir.) (2006), Les clients de la céramique grecque. Actes du colloque de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, Paris, Académie des inscriptions et belles-lettres.

De la Genière, Juliette (2013), « Vases des Lénéennes. Cent ans après », Revue des Études grecques, t. 236, fascicule 1, p. 21-48 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.3406/reg.2013.8115.

Doise, Willem (1985), « Les représentations sociales : définition d’un concept », Connexions, n° 45, p. 243-253.

Dugas, Charles (1924). La Céramique grecque, Paris, Payot.

Frame, Alexander (2008) “Repenser l’interculturel en communication, Performance culturelle et construction des identités au sein d’une association européenne”, thèse de doctorat soutenue à l’Université de Bourgogne, sous la direction de Jean-Jacques Boutaud [En ligne] URL : https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00441656.

Fiat, Éric (2007). « Pudeur et intimité », Gérontologie et société, vol. 30, n° 122 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.3917/gs.122.0023.

Gervereau, Laurent (2003), Histoire du visuel au xxsiècle, Paris, Seuil.

Guégen, Nicolas (2014), Psychologie de la séduction, Paris, Dunod.

Heinich, Nathalie (2001), La sociologie de l’art, Paris, La Découverte.

Hölscher, Tonio (2015), La vie des images grecques. Sociétés de statues, rôles des artistes et notions esthétiques dans l’art grec ancien, Paris, Hazan.

Hugot, Christophe et Westeel, Isabelle (dir.), Le vase qui parle. Un dispositif numérique de médiation pour le patrimoine culturel, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2014.

Idjéraoui-Ravez, Linda (2008), « Quelle réception pour quelle médiation du témoignage ? », Questions de communication, no13, p. 289-302 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/questionsdecommunication.1846.

Jacob, Christian (1985) « Paul Veyne, Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes ? Essai sur l’imagination constituante », Revue de l’histoire des religions, tome 202, n° 2 [En ligne] URL : https://www.persee.fr/doc/rhr_0035-1423_1985_num_202_2_2748.

Jakobson, Roman (1963), Les fondations du langage. Essais de linguistique générale, Paris, Éditions de Minuit, 1963 (t.1) [rééd. 2003], chapitre XI, p. 213-222.

Jeanneret, Yves (2002), « Communication, transmission, un couple orageux », Revue Sciences Humaines hors-série [En ligne] URL : www.scienceshumaines.com/communication-transmission-un-couple-orageux_fr_12512.html [consulté le 11-11-2016].

Lissarrague, François (1999), Vases grecs. Les Athéniens et leurs Images, Paris, Hazan.

Lissarrague, François, Bérard, Claude et Bron, Christiane (2020), La Cité des images. Religion et société en Grèce antique, Paris, Klinksieck.

Malraux, André (1968), in Charbonneaux Jean., Martin Rolland et Villard François, Grèce archaïque, Paris, Gallimard.

Martens, Didier (1992), Une esthétique de la transgression, le vase grec : de la fin de l’époque géométrique au début de l’époque classique, Thèse Doctorat en Archéologie et histoire de l’art, Bruxelles, Académie Royale de Belgique.

Meyer, Michel (2007), « Introduction », in Michel Meyer (dir.), Le Philosophe et les passions. Esquisse d’une histoire de la nature humaine, Paris, Presses universitaires de France, 2007, p. 13-21 [En ligne] URL : https://www.cairn.info/le-philosophe-et-les-passions--9782130564423-page-13.htm.

Meyer, Morgan, Molyneux-Hodgson, Susan (2011), « Communautés épistémiques » : une notion utile pour théoriser les collectifs en sciences ? », Terrains & travaux vol. 1, n° 18, p. 141-154 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.3917/tt.018.0141.

Moles, Abraham A. (1969), « Objet et communication », Communications, volume 13, p. 1-21 [En ligne] URL : https://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_1969_num_13_1_1183.

Moscovici, Serge (2000), Psychologie sociale des relations à autrui, Paris, Nathan.

Privat, Jean-Marie (2002), « Nathalie Heinich, La sociologie de l’art », Questions de communication, no2 [En ligne] URL : http://questionsdecommunication.revues.org/7295.

Salomé, Marie-Rose (1980), Code pour l’analyse des représentations figurées sur les vases grecs. Analyse documentaire et calcul en archéologie, Paris, Éditions du Centre national de la recherche scientifique, 1980.

Saint-Amand, Denis (2016), « Étudier la pornographie », COnTEXTES, Notes de lecture, [En ligne], URL : http://contextes.revues.org/5885 [consulté : 17-8-2016].

Serrano, Yenny (2010), « Dominique Wolton, Informer n’est pas communiquer », Questions de communication, n17 [En ligne] DOI : https:/doi.org/10.4000/questionsdecommunication.254 [consulté le 5-8-2016].

Verbanck-Piérard, Annie (2014), « Sous les yeux d’Athéna et des Athéniens : vases, techniques et statut de l’artisan à l’Acropole » in Dossier : Des vases pour les Athéniens. vie-ive siècles avant notre ère, Paris-Athènes, Éditions de l’EHESS-Daedalus [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/books.editionsehess.3122 [consulté le 5-8-2016].

Vernant, Jean-Pierre (1996), Mythe et Pensée chez les Grecs. Étude de psychologie historique, Paris, Éditions La Découverte.

Villanueva-Puig, Marie-Christine (1992), Images de la vie quotidienne en Grèce dans l’Antiquité, Paris, Hachette, 1992.

Viviers, Didier, (2007), « Signer une œuvre en Grèce ancienne : pourquoi ? Pour qui ? », in J. de la Genière (éd.), Cahiers du Corpus Vasorum Antiquorum 1. Les clients de la céramique grecque. Actes du colloque de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Paris, 30‑31 janvier 2004, Paris, De Boccard, p. 141-154.

Notes

1 Voir le site https://breakrulesnotnails.wordpress.com/tag/ancient-greek-pottery/ [consulté le 3-05-2019].

2 Voir le paragraphe intitulé « procédure d’investigation » dans cet article.

3 Indicateurs Unesco pour la culture et le développement [En ligne] URL : https://fr.unesco.org, p. 1, [consulté le 10 juillet 2021].

4 Conception éditoriale : Christophe Hugot, Giorgos Sanidas. Évaluation : Michèle Gellereau, Juliette Dalbavie, Laboratoire Geriico, Lille3.

5 Exposé au musée Saint-Raymond de Toulouse en 2016, l’objet n’était pas présenté sous cette forme interactive mais à l’aide d’enceintes qui diffusaient le discours du vase et des personnages en continu.

6 https://www.club-innovation-culture.fr/le-vase-qui-parle-un-dispositif-numerique-de-mediation-innovant-et-itinerant/ [consulté le 21-01-2019].

7 Nous avons adopté le terme mythologie et non celui d’histoire. En effet, pour Danièle Berranger-Auserve, les Grecs ne croyaient pas en leur Panthéon. À partir de Hérodote, à la fin du vie siècle av. J.-C., on distingue ce qui relève de la mythologie et de l’histoire.

8 Notre iconographie ne provient pas entièrement de cette collection mais nous souhaitions contextualiser l’enquête pour bien comprendre la situation de la communication : vase – récepteur/visiteur.

9 Berranger-Auserve Danièle, entretien du 13 juillet 2016.

10 Deschodt Gaëlle, entretien du 4 octobre 2016.

11 Histoire (livre IV), ve siècle av. J.-C.

12 Pseudo Démosthène, Contre Nééra, 118.

13 L’analyse de contenu révèle qu’une proportion de 80 % relève de la fonction « usuelle et objet d’art » alors qu’une proportion de 70 % peut être identifiée comme un support de communication, tandis qu’une proportion de 60 % relève des médias avant l’heure au même titre que la BD.

14 Richard Bucaille, ethnologue, entretien du 14-12-2003.

Illustrations

Figure 1 : Les motifs des vases grecs ornent les ongles et les objets du quotidien.

Figure 1 : Les motifs des vases grecs ornent les ongles et les objets du quotidien.

De gauche à droite : manucure attique, mules Este offial, boucles d’oreilles, clés USB, foulard Hermès aux motifs de vases grecs.

Figure 2 : Les vases grecs ont inspiré les créateurs de mode.

Figure 2 : Les vases grecs ont inspiré les créateurs de mode.

Corsage en satin de soie jaune, décor peint, années 1920.

CCØ Paris Musées/Palais Galliera, Musée de la Mode de la Ville de Paris.

Figure 3 : Scène de banquets.

Figure 3 : Scène de banquets.

Peintre d’Euaion, coupe à figures rouges, vers 460 - 450 avant J.-C.

Athènes, Collection Campana 186, © RMN/H. Lewandowski.

Figure 4 : Philomèle, Procnè et Itys.

Figure 4 : Philomèle, Procnè et Itys.

Coupe attique à figures rouges

Paris, Louvre G 147, ARV² 472/211, Macron, vers 490-480 av. J.-C.

Figure 5 : Achille et Penthésilée.

Figure 5 : Achille et Penthésilée.

Amphore, Exéchias, N° d’inventaire : 1836,0224 .127 (530-525 av. J.-C. British Museum).

Photo © The British Museum, Londres, Dist. RMN-Grand Palais/The Trustees of the British Museum.

Figure 6 : Sacrifice d’un jeune sanglier et inscription kalos.

Figure 6 : Sacrifice d’un jeune sanglier et inscription kalos.

Coupe attique à figures rouges, v. 510–500 av. J.-C. Louvre, n° G 112.

Crédit photo : ©Jastrow.

Figure 7 : Cortège de mariage attique.

Figure 7 : Cortège de mariage attique.

Pyxis tripode à figures noires, vers 530 - 520 avant J.-C. Athènes.MNB 508.

© Musée du Louvre. Photo RMN/H. Lewandowski.

Figure 8 : Scène de théâtre.

Figure 8 : Scène de théâtre.

Peintre du BM F 63 (ive siècle av. J.-C.), cratère, Cote cliché : 96-000761, N° d’inventaire : K404, Paris, Musée du Louvre.

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Gérard Blot.

Figure 9 : Départ du guerrier.

Figure 9 : Départ du guerrier.

Manière du Peintre de Princeton, amphore à figures noires, vers 550 - 540 avant J.-C., Athènes, Collection Campana, 1861, F12, Louvre.

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski.

Figure 10 : Athlètes.

Figure 10 : Athlètes.

Peintre de Méléagre, coupe à figures rouges, vers 400-375 av. J.-C. Athènes, G 639, Collection Durand, 1825.

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski.

Figure 11 : Pesée et emmagasinage du silphium avec Arcésilas II.

Figure 11 : Pesée et emmagasinage du silphium avec Arcésilas II.

Coupe (560 av. J.-C, BnF), note de l’image : NQ-B-001638, n° inventaire : VASE 189 De Ridder189, inv.65.4899 et inv.52bis.2707.

Photo © Marie-Lan Nguyen/Wikimedia Commons/CC-BY 2.5.

Figure 12 : Cueillette de fruits (olives ?)

Figure 12 : Cueillette de fruits (olives ?)

Vers 500-490 av. J.-C. Olpe à figures noires.

Photo ©RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/ Hervé Lewandowski.

Figure 13 : Forgeron martelant dans sa forge.

Figure 13 : Forgeron martelant dans sa forge.

Groupe de Proto-Panaitios, cote cliché : 04-504509, N° d’inventaire : 1980.7, vers 510-500 avant J.-C.

Photo © BPK, Berlin, Dist. RMN-Grand Palais/Johannes Laurentius.

Figure 14 : Femmes à la fontaine.

Figure 14 : Femmes à la fontaine.

Hydrie à figures noires, vers 510 avant J.-C., Athènes.

© 1993 RMN/Hervé Lewandowski.

Figure 15 : Musicienne se rhabillant sous les yeux de son client.

Figure 15 : Musicienne se rhabillant sous les yeux de son client.

Coupe, Euphronios, v. 490 av. J.-C., British Museum., GR 1836.2-24.25 (Cat. Vases E 44).

Photographie : ©Jastrow (2006). Source : Wikimedia.

Figure 16 : Maîtresse et sa domestique filant la laine.

Figure 16 : Maîtresse et sa domestique filant la laine.

Vers 460-450 av. J.-C.

Photo © BPK, Berlin, Dist. RMN-Grand Palais/Ingrid Geske-Heiden.

Figure 17 : Scènes de courtoisie.

Figure 17 : Scènes de courtoisie.

Hydrie, peintre du Louvre F51, cote cliché : 05-520471, N° d’inventaire : F5, viè siècle av. J.-C, Musée du Louvre).

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski.

Figure 18 : Scène de cour amoureuse.

Figure 18 : Scène de cour amoureuse.

Skyphos, Numéro d’inventaire : A479, vers 540 av. J.-C.

Crédit : Photo ©RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/les frères Chuzeville.

Figure 19 : Scène érotique

Figure 19 : Scène érotique

Coupe attique, 510-500 av. J.-C., Musée du Louvre, cote du cliché : 89-003874, N° d’inventaire : G13.

Photo © Hubert Josse, Paris, Musée du Louvre.

Figure 5 : Achille et Penthésilée.

Figure 5 : Achille et Penthésilée.

Amphore, Exéchias, N° d’inventaire : 1836,0224 .127 (530-525 av. J.-C. British Museum)

Photo © The British Museum, Londres, Dist. RMN-Grand Palais/The Trustees of the British Museum.

Figure 11 : Pesée et emmagasinage du silphium avec Arcésilas II.

Figure 11 : Pesée et emmagasinage du silphium avec Arcésilas II.

Coupe (560 av. J.-C, BnF), note de l’image : NQ-B-001638, n° inventaire : VASE 189 De Ridder189, inv.65.4899 et inv.52bis.2707.

Photo © Marie-Lan Nguyen/Wikimedia Commons/CC-BY 2.5.

Figure 8 : Scène de théâtre.

Figure 8 : Scène de théâtre.

Peintre du BM F 63 (ive siècle av. J.-C.), cratère, Cote cliché : 96-000761, N° d’inventaire : K404, Paris, Musée du Louvre.

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Gérard Blot.

Figure 6 : Sacrifice d’un jeune sanglier et inscription kalos.

Figure 6 : Sacrifice d’un jeune sanglier et inscription kalos.

Coupe attique à figures rouges, v. 510–500 av. J.-C. Louvre, n° G 112.

Crédit photo : ©Jastrow.

Figure 17 : Scènes de courtoisie.

Figure 17 : Scènes de courtoisie.

Hydrie, peintre du Louvre F51, cote cliché : 05-520471, N° d’inventaire : F5, viè siècle av. J.-C, Musée du Louvre).

Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski.

Figure 18 : Scène de cour amoureuse.

Figure 18 : Scène de cour amoureuse.

Skyphos, Numéro d’inventaire : A479, vers 540 av. J.-C.

Crédit : Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)/les frères Chuzeville.

Figure 19 : Scène érotique.

Figure 19 : Scène érotique.

Coupe attique, 510-500 av. J.-C., collection Campana, Musée du Louvre, cote du cliché : 89-003874, N° d’inventaire : G13.

Photo © Hubert Josse, Paris, Musée du Louvre.

Figure 7 : Cortège de mariage attique.

Figure 7 : Cortège de mariage attique.

Pyxis tripode à figures noires, vers 530 - 520 avant J.-C. Athènes. MNB 508.

© Musée du Louvre. Photo RMN/H. Lewandowski.

Figure 15 : Musicienne se rhabillant sous les yeux de son client.

Figure 15 : Musicienne se rhabillant sous les yeux de son client.

Coupe, Euphronios, v. 490 av. J.-C., British Museum., GR 1836.2-24.25 (Cat. Vases E 44)..

Photographie : ©Jastrow (2006). Source : Wikimedia.

Citer cet article

Référence électronique

Agnès BERNARD, « Vase media/mass media : les fonctions communicationnelles des vases grecs hier et aujourd’hui », K@iros [En ligne], 6 | 2022, mis en ligne le 11 octobre 2022, consulté le 23 avril 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/kairos/index.php?id=774

Auteur

Agnès BERNARD

Communications et sociétés, Université Clermont Auvergne

Articles du même auteur

Droits d'auteur

Creative Commons Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)