Ô Seigneur, j’ai accepté mon destin
En ces lieux funestes et tragiques
Où mes frères périssent toujours,
Par les mains de leurs propres frères :
Amis ou ennemis ? appelés esclaves.

Ô Seigneur, je ne puis me soustraire
À ma colère qui est immense.
En ces jours mauvais et mortels.
Vous nous avez épargnés,
D’autres frères et moi, de cette tragédie.
Mais pourquoi pas tous, bon Seigneur ?

Ô Seigneur, j’ai accepté mon destin
Comme j’ai accepté ma souffrance.
Avec des coups, des gifles sur mon visage
Avec des injures en plein cœur
Avec toutes ces armes miraculeuses qui ont cassé ma figure
Sur des terres estropiées
Dans ces pays qui troquent la chair humaine
La chair noire africaine.

Ô Seigneur, voyez-vous donc tous ces jeunes enfants aller,
S’en aller vers un même mystère, vers un même bonheur
Et misère. Dans une même idée, une même destinée.
Espérant rejoindre les terres occidentales.

Ô Seigneur, la traversée. Sur notre traversée
Vous nous avez manqué d’eau et du lait purifié
Du ciel, et vous nous avez envoyé de la chaleur interminable,
De la misère décadente. Et de tout
En ces cités battues dans la souffrance désertique.

Seigneur, ô bon seigneur !
Parmi tous mes pleurs, dans mon deuil amer,
Dans mon âme déchirée.
Ô seigneur, je me soumets à votre volonté.

Au nom du Seigneur,
Par ses eaux dormantes, par ses vagues tenaces et fermes,
Par toutes ses énigmes dont je ne sais quoi,
Nous étions meurtris de faim de fatigue et de soif.

Ô toi mère. Mystérieuse et mer singulière
Mer,
Nous étions seuls face à toi ; face à toi pendant cent ans
Et deux ans. Dans un bateau sans nom, ni écriteau.
Où nous naviguâmes à pleine lune
Sur les bords de la petite Méditerranée.

Mer patiente, tenace et dormante1.