Naufragés dans la ville : vertige et « indésirabilité »

DOI : 10.52497/sociopoetiques.2467

Résumés

Cet article se focalise sur l’étude de la vulnérabilité spatiale, du droit à la ville et de l’itinérance dans deux romans : Stardust de Léonora Miano et Tiohtiá:ke [Montréal] de l’écrivain innu Michel Jean. Ces œuvres témoignent des trajectoires dramatiques de migrants africains à Paris et de SDF autochtones à Montréal. Dans une approche interdisciplinaire, l’analyse aborde différentes problématiques telles que l’éthique du care et le rapport entre violence et colonialisme. À travers ces récits, l’article interroge les formes de marginalisation urbaine et les dynamiques d’exclusion, tout en mettant en lumière les résistances et les solidarités qui émergent dans les interstices de la ville. Il propose une lecture croisée de ces deux textes pour penser les enjeux contemporains liés à l’espace, à la mémoire et à la justice sociale.

This article examines spatial vulnerability, the right to the city, and homelessness in two novels: Stardust by Léonora Miano and Tiohtiá:ke [Montréal] by Innu writer Michel Jean. These works bear witness to the dramatic trajectories of African migrants in Paris and Indigenous homeless people in Montreal. An interdisciplinary approach has been chosen to address several issues, such as the ethic of care and the relationship between violence and colonialism. Through these narratives, the article explores forms of urban marginalisation and dynamics of exclusion, while shedding light on the resistances and solidarities that emerge in the interstices of the city. It offers a comparative reading of both texts to reflect on contemporary issues related to space, memory, and social justice.

Index

Mots-clés

espace public, marginalité, itinérance, autochtones, migration, Paris, CHRS, Montréal, square Cabot

Keywords

public spaces, marginality, homelessness, Indigenous people, migrations, Paris, CHRS, Montreal, Cabot Square.

Plan

Texte

Les écritures francophones de la migration et de l’exil traduisent des représentations, des émotions, des rêves, des projets d’avenir ainsi que des frustrations issues de l’anéantissement de leurs « horizons d’attente1 ». Certains récits mettent en scène cet effondrement qui a lieu après l’exil, dans les pays de (non-)accueil, en particulier en contexte urbain.

La ville peut en effet être vécue et perçue comme un espace d’hospitalité ou d’hostilité, comme un parcours d’acculturation ou comme une expérience de ce que les philosophes Judith Butler et Frédéric Worms (2021) ont appelé « l’invivable2 », qui empêche la reconnaissance et fait émerger un sentiment d’indignité. Le regard de l’Autre peut rendre le migrant et l’exilé invisibles ou « indésirables3 ».

Il nous semble intéressant d’aborder, dans une perspective transdisciplinaire et comparative, l’étude de deux romans, Stardust4 (2022), de l’écrivaine d’origine camerounaise Léonora Miano, inspiré par son expérience d’accueil dans un centre d’hébergement et de réinsertion sociale – CHRS – du 19arrondissement de Paris, et Tiohtiá:ke [Montréal]5 (2021), de l’écrivain amérindien innu Michel Jean. Ces romans dépeignent deux villes, deux continents, deux tentatives différentes d’ancrage urbain après deux trajets de migration différents : celle d’une jeune mère originaire d’Afrique subsaharienne à Paris et celle d’un jeune Innu banni par sa communauté, échouant à Montréal et rejoignant la communauté des Autochtones SDF (sans domicile fixe). Mais ces deux romans ont en commun d’articuler l’écriture littéraire au témoignage et l’expérience migratoire aux questions sociales contemporaines de la vulnérabilité et de la relation entre responsabilité et fragilité, que le philosophe Paul Ricœur avait développée dans une conférence en 19926.

La problématique de « l’encampement » y est présente aussi. Dans l’avant-propos de Stardust, Léonora Miano, devenue une auteure reconnue ayant publié une vingtaine d’ouvrages (en tant que romancière, essayiste et dramaturge), avoue que ce roman, qui « relate un moment marquant de [m]sa vie, […] [lorsqu’elle était] une jeune mère de vingt-trois ans, sans domicile ni titre de séjour7 », a été publié plus de vingt ans après son écriture, car elle tenait à « ne pas être la SDF qui écrit des livres8 ». L’univers des SDF – dont des « pochards […], des soûlards, comme on dit au Cameroun9 » – y surgit comme une image qui la hante et lui rappelle « le fossé […]. La peur du déclassement. La terreur qu’inspire l’exclusion sociale10 ».

Dans le roman de Michel Jean, dont le titre Tiohtiá:ke adopte le nom mohawk de la ville de Montréal, l’espace et la plupart des personnages mis en scène dans la diégèse font partie de ce qu’on appelle au Québec « l’itinérance ». En effet, Michel Jean, qui tient à sensibiliser ses lecteurs aux enjeux autochtones et dont le roman le plus reconnu, Kukum (2019), raconte l’histoire de sa communauté à travers le regard de son aïeule, se focalise ici sur le monde des autochtones sans-abri de Montréal qui, tout en étant des êtres fracassés, essaient de reconstituer dans cette ville l’esprit de communauté qui fait partie de leur identité et de leurs traditions.

Ville et vulnérabilité

Le degré de fragilité dans l’espace urbain ressenti par le personnage de Louise, alter ego de Léonora Miano dans Stardust, et celui qui touche Élie Mestenapeo, le héros de Tiohtiá:ke, à son arrivée à Montréal, ne sont pas équivalents. Chez Louise, le fait d’avoir quitté sa chambre de la cité universitaire où l’ambassade du Cameroun l’avait logée et d’avoir suivi un homme qu’elle aimait et qui ensuite n’a pas été capable d’assumer ses responsabilités comme père de l’enfant qu’ils ont engendrée, Bliss, l’a contrainte à errer, à loger dans un « hôtel miteux11 » où elle se sentait menacée, comme jeune femme sans ressources, par le « regard lubrique12 » de l’hôtelier, qui traduit sa « voracité. Celle du vautour ayant flairé l’odeur de la charogne13 ». Elle est consciente qu’elle n’a pas d’autre issue que de « mendier. Supplier l’assistante sociale […] L’implorer de trouver une place en maison maternelle14 », pour elle et son enfant. Elle accepte ainsi de devenir une « assistée » et ressent l’anxiété inhérente à l’insécurité et à l’instabilité qu’elle vit, mais se bat pour que ce changement soit temporaire et lutte pour reprendre le contrôle sur sa vie et celle de sa fille. Elle s’accroche à un certain niveau d’insertion sociale, d’adaptation à un milieu qui lui permet de faire des démarches et de sortir de l’impasse où elle aurait pu sombrer. Elle comprend qu’il lui faut appréhender des « règles15 », déchiffrer des sigles et des acronymes (RMI16, PMI17, CES18 CHRS19), et qu’elle doit essayer de « réfléchir, de comprendre20 », de « préserver sa conscience d’elle-même. Ne pas être simplement un cas social. Rester quelqu’un21. »

Chez Élie, originaire de la région québécoise de la Côte-Nord (sur la rive nord de l’estuaire du fleuve Saint-Laurent) et « qui n’a jamais vu une grande ville22 », le sentiment d’étrangeté ressenti au moment où il arrive à Montréal atteint ses sens (« le souffle brûlant de la ville l’enserre23 ») et son esprit, et il éprouve une réaction de rejet : « Montréal [lui] semble à la fois effrayante et décevante24 ». À la peur associée à la difficulté d’y trouver des repères s’ajoute la perception de la ville comme un espace où se juxtaposent l’anonymat et l’indifférence : « une infinie succession de bâtiments anonymes, de rues sales et de visages indifférents à ce qui les entoure25 ». Il vit ainsi un processus de « désinsertion sociale26 » qui, d’après la sociologue Shirley Roy, est issu des ruptures qui se produisent dans trois espaces, l’espace économique, l’espace relationnel et l’espace symbolique. L’absence de revenus et de logement, l’absence de réseau relationnel comprenant la famille et les amis et le manque d’outils et de compétences permettant de reconnaître les symboles, les normes et les valeurs partagés par l’ensemble des membres de la société urbaine constituent des facteurs d’exclusion.

Les éléments de la ville de Montréal qu’il perçoit comme agressifs – dont un « bruit, omniprésent, comme une sorte de bourdonnement qui semble émaner des rues, des trottoirs, des bâtiments […], le cœur de la ville qui bat27 » – se superposent, dans la vie d’Élie, à des blessures profondes ayant érodé son esprit avant son arrivée en ville. La présence de la violence dans son vécu familial et l’accusation d’avoir tué son père ont entraîné la prison, selon le système judiciaire des « Blancs28 », et le bannissement à vie, selon le système judiciaire de sa communauté innue, ce qui comporte la destruction des composantes essentielles de son identité. C’est donc un être déboussolé et déraciné qui échoue à Montréal.

Contrairement au personnage de Louise, qui, tout en étant perméable au « climat anxiogène29 » qu’elle perçoit autour d’elle, prend une posture de résistance, chez Élie, ce qui l’emporte, initialement, c’est l’acceptation voire la soumission à la situation d’itinérance. Louise a deux piliers qui la poussent à ne pas abandonner la lutte et à « affronter la vie30 » : sa grand-mère, sa « Mbambe31 », à laquelle elle s’adresse dans des lettres et qui l’appelle « poussière d’étoiles32 » (« stardust »), et son enfant, Bliss. Toutes les deux agissent chez elle comme une source de résilience.

Chez Élie, la figure la plus importante de son enfance à Nutashkuan a été « mushum Raymond33 », son grand-père, qui lui a transmis l’affection et le savoir, qui l’emmenait dans le bois, et avec qui Élie avait « appris à découvrir la vie dans le territoire34 », mais qui meurt lorsqu’Élie n’a que dix ans. Le legs de ses parents, la violence et la honte, s’est révélé destructeur. Ce sera la solidarité d’autres itinérants autochtones qui réussira à éviter son glissement vers l’exclusion. Ceux et celles qui l’appelleront « frère » réussiront aussi à l’aider à se reconstruire comme être humain.

La vulnérabilité et l’itinérance sont dépeintes dans les deux romans comme un problème social et comme un problème individuel. Chez Louise, le départ du Cameroun avait été déterminé par sa constatation de ne pas être considérée par les gens « comme une des leurs35 », par sa prise de conscience de sa « singularité36 », par le sentiment d’être « [u]ne funambule sans appartenance territoriale37 » et, parallèlement, par son « rêve38 » de « [p]artir. […]. S’en aller. Vers l’immensité. Déserts de plénitude. Océans de liberté. Ne pas avoir à tenir son rang. Choisir son identité39. » La maternité, le soin de son enfant et son parcours en France l’amènent à une représentation d’elle-même qui oscille entre son attachement à un projet incluant sa réinscription à l’université pour passer sa maîtrise (« D’abord le séminaire. Ensuite, la recherche et le mémoire. Elle pense travailler sur James Baldwin et sur les sixties40. ») et la perception d’être « un déchet41 », « [u]n détritus42 ». Miano adhère ici à la métaphore proposée par le sociologue Zygmunt Bauman43, associant dans une même perspective le cycle de traitement des déchets produits par le monde capitaliste et la gestion socio-destructive des individus en surplus qui en découle.

Dans Tiohtiá:ke, les parcours des personnages, hommes et femmes, Amérindiens et Inuits, « poussés en marge de la société44 » et qui partagent la vie d’Élie, sont différents mais ils présentent certains traits communs, particulièrement des blessures profondes. Les paroles de celui que l’on appelle Geronimo, un Cri d’Eeyou Istchee, soulignent la tension entre d’une part la multiplicité de facteurs qui amènent à la marginalité et à l’exclusion et, d’autre part, le travail et l’effort individuel, appuyés par d’autres, pour émerger et se réinsérer dans la société : « Si beaucoup de chemins conduisent à la rue, un seul permet d’en sortir45. » Les vies des personnages tels que les sœurs jumelles inuites Mary et Tracy, originaires du Nunavik (Grand Nord), sont marquées par l’inceste et le crack, elles se sont prostituées pour pouvoir payer leur drogue, et la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) a placé en adoption deux enfants de Mary. Elles cessent la drogue et réduisent la consommation d’alcool, mais elles ne renoncent pas à la vie dans la rue. La fille de Mary, Lisbeth, devenue médecin, qui s’est rapprochée de sa mère, pense qu’elles y trouvent « une forme de liberté qui leur rappelle peut-être la vie dans le Nord46 ».

La ville est dépeinte dans les deux romans comme un lieu qui témoigne des inégalités sociales et comme un espace où des groupes minoritaires ou marginalisés manifestent le « droit à la ville47 », l’appropriation collective et inclusive de la ville, problématique qui s’est imposée, au xxie siècle, comme un concept clé, autant dans l’univers académique que dans les mouvements issus de la société civile. Léonora Miano et Michel Jean y abordent la « constitution d’un chez-soi48 » et la problématique de l’habitabilité et de la co-habitabilité à Paris et à Montréal, de l’habiter comme « exister49 » (Maldiney), comme « être-présent-au-monde-et-à-autrui50 » (Heidegger), des rapports entre l’identité et l’habiter comme « moteur de transformation du je et lieu de prise de conscience de la vulnérabilité de l’être humain, ainsi que de la complexité des cultures et de leur communication51 ».

Les espaces urbains de la vulnérabilité et de l’itinérance : CHRS, square Cabot

Les deux romans dépeignent divers degrés de vulnérabilité et d’itinérance allant de la situation de sans-abri à l’« instabilité résidentielle52 ». Dans Stardust, le personnage de Louise regarde avec crainte la situation qu’elle perçoit comme la plus grave, celle des « hommes rassemblés dans le square […] [qui] ont le visage de ceux qui n’ont plus personne depuis bien des années53 ». Ils représentent « le fossé […], l’abysse54 ». Consciente de sa fragilité, Louise s’interdit de ressentir de l’« empathie55 » envers eux et de « comprendre pourquoi ces hommes en sont là. De s’interroger sur leur vie d’avant la chute. Quand ils étaient des époux et des pères. Des salariés ordinaires56. » Elle les fuit et entreprend un « parcours de réinsertion57 », qui commence au « Bureau d’action sociale58 », où une assistante sociale lui propose d’aller tout d’abord à un centre d’hébergement et de réinsertion sociale59 qui se trouve dans la rue de Crimée, et d’envisager ce séjour comme une première étape et une voie pour être candidate à une « maison maternelle60 ».

Sur le chemin du CHRS, dans la rue de Crimée, le regard de Louise repère d’autres situations d’instabilité résidentielle comme « des immeubles insalubres, habités par des régiments de Zaïrois sans papiers. Des galériens, comme on dit61 ». Et en arrivant au CHRS, des éléments architecturaux – dont « un vasistas rectangulaire encastré dans une énorme porte que l’on dirait d’acier trempé62 » et les « barreaux63 » aux fenêtres – ainsi que des éléments du discours – dont l’allusion à l’heure du « couvre-feu64 » – sont les premiers signes d’un système normatif. Elle découvre ensuite la promiscuité et l’absence d’intimité ainsi que la « souffrance65 » des femmes « [d]e tous âges. De toutes races66 ». Dès le début, elle observe : « Elle a tout de suite vu. […] Il n’a fallu qu’un court laps de temps pour sentir le poids de la souffrance qui s’entassait là67. » En écoutant « les femmes de Crimée68 » raconter leur vie, Louise comprend « la véritable nature de l’exclusion. Solitude. Abandon. Violence. Amours mal placées…69 ». Elle comprend aussi que l’administration perçoit ces femmes comme « des passagères, […] des embarquées pour une drôle de croisière à durée indéterminée, à l’issue incertaine70 » :

Crimée n’est pas là pour comprendre. Il a ses impératifs. Que les passagères ne restent pas trop longtemps. Qu’elles ne reviennent pas trop souvent. Crimée gère – c’est comme ça qu’on dit – l’urgence. Il ne peut réaliser que des opérations simples : retrait et placement des enfants, virement des femmes en maison de repos, en hôtel social, en hôtel meublé, en retour à la case départ le plus souvent71.

L’expérience quotidienne de Louise au CHRS l’amène à conclure que « [c]e lieu n’est pas dédié à la reconstruction. […] On ne s’installe pas à Crimée. Ce n’est pas un chez soi72 ». Elle décide de « se tourner vers l’avenir. Y croire73 », de sauvegarder son équilibre psychologique car elle sent que son vécu dans ce lieu, qu’elle qualifie de « fosse commune74 », d’« étouffoir75 » et de « cage aux poules plumées par le destin76 », provoque chez elle des doutes sur sa capacité de faire quelque chose de valable et de beau : « Crimée a peut-être déjà phagocyté les possibles77. » Et parallèlement, elle se focalise sur ses chances de passer à une autre étape de la « réinsertion », dans une maison maternelle. Elle sait « qu’on l’estime plus apte que d’autres à la réinsertion78 », à cause de ses études universitaires et de son attitude, car elle s’efforce d’être calme, de ne pas exprimer de critiques, ayant remarqué que « Crimée n’est pas en faveur de la liberté d’expression. Le verbe y est traqué, analysé, consigné dans des dossiers79 ». Elle garde ses distances et elle se dit qu’« [e]lle ne se noiera pas dans l’eau trouble et houleuse de Crimée80 ».

Dès qu’on lui annonce qu’il y aurait peut-être une place dans une maison maternelle, un foyer appartenant à l’Armée du salut, Louise sait qu’elle devra supporter toutes les contraintes, « subir des interrogatoires partout. Monter des dossiers. Se faire enregistrer. Évaluer. Ficher. Remettre à sa place, souvent81 », qu’il faudra « pleurnicher. Se faire prendre en pitié82 ». Elle « n’aime pas qu’on la rabaisse, qu’on l’infantilise83 », mais le jour du rendez-vous dans la maison maternelle pour passer « le grand oral84 », elle rencontre celles qui se présentent comme « vos éducatrices référentes85 » et doit exposer le récit de sa vie devant les « réinsératrices » : « Les moindres détails. Il leur faut tout. […] À poil. C’est le prix.86 »

La clausule de Stardust annonce une nouvelle étape, celle qui doit aboutir à « la réalisation de soi87 ». Louise exprime sa volonté de résister, de se battre. Elle sait que la maison maternelle n’est que le début d’une longue route : « Les stations du parcours de réinsertion sont nombreuses88 », mais elle sent que « [m]ême la mort ne l’effraiera pas autant que la perspective de retourner89 » au CHRS.

Contrairement au CHRS, où Louise constate qu’« [i]l n’y a pas de sororité chez les écartées90 », le personnage d’Élie trouve, dans le square Cabot de Montréal, où il est bien accueilli, une ambiance de fraternité. Dans ce petit parc dominé en son centre par une grande sculpture de bronze de l’explorateur italien Jean Cabot91, contemporain de Christophe Colomb, et qui apparaît à Élie « comme un îlot de verdure au cœur de la ville où de grands arbres dispersent leur parfum boisé92 », des Innus, des Atikamekw, des Cris et des Inuits non seulement partagent un espace de « savoir-survivre93 » mais investissent activement cet espace et montrent un attachement au lieu qu’ils envisagent comme un « chez-soi » où habiter, comme un chez-soi identificatoire. La « popote roulante de Jimmy le Nakota94 », qui offre le repas du soir, y rassemble des habitués, des gens s’exprimant « en cri, en atikamekw, en innu, en algonkin, en inuktitut95 », et lorsque Mary Nappatuk, une des jumelles inuites, meurt, sa fille Lisbeth décide d’enterrer une partie de ses cendres dans le square, qu’elle aimait beaucoup, et répandre le reste dans l’Arctique. La cérémonie d’adieux et d’hommage a lieu au square : « Tous ceux qui ont connu Mary sont là, réunis une dernière fois autour d’elle. Cris, Atikamekw, Anishinabe, Innus, Inuits, Mikmaks, Mohawks, ils sont une centaine à prier chacun dans sa langue96. » Ces pratiques sociales traduisent une certaine forme d’appartenance, un désir d’« entre-soi » et le maintien d’une identité sociale. L’analyse de l’évolution du personnage d’Élie montre comment cette « appropriation97 » d’un espace public joue un rôle important dans la construction de soi. Quand il ne vit plus dans la rue, « le square Cabot [continue à être] l’endroit où il se sent encore le plus chez lui dans cette ville98 ».

C’est la communauté autochtone du square Cabot qui va aider Élie à se reconstruire, une communauté qui est perçue et vécue comme une « famille99 », une communauté prête à écouter les récits véhiculant les blessures des membres et prête aussi à respecter leur silence, qui traduit souvent la douleur ou la honte. C’est dans cet espace social que des êtres en situation de ce que le géographe Michel Lussault appelle « vulnérabilité spatiale100 », sont l’objet des valeurs de l’éthique du care, que Joan Tronto souligne dans son livre Un monde vulnérable. Pour une politique du care : « prévenance, responsabilité, attention éducative, compassion, attention aux besoins des autres101 ».

Care et cohabitation

La comparaison des parcours de « réinsertion » des personnages de Louise et d’Élie nous amène à repérer des acteurs de l’éthique du care qui aident ceux et celles susceptibles d’être perçus comme « indésirables » à entreprendre un chemin de reconstruction, et qui prennent soin des espaces d’indésirabilité. Chez Louise, c’est surtout une assistante sociale jeune remplaçante qui l’écoute, « qui croit en elle et qui, ce faisant, dessine cette aube où meurt le désespoir102 » :

Tout ce qu’elle voit, c’est une personne désireuse d’en aider une autre. Si elle y parvient, si la couleur s’efface, c’est que la libertaire ne se drape pas dans sa race comme le faisait Madame S. Pour une fois, dans ce bureau, il n’y a qu’une personne devant une autre103.

Lorsque Louise entend les paroles que cette assistante sociale lui adresse, « Tu vas t’en sortir. T’es une warrior104 », elle ressent une profonde émotion (« Louise a envie d’embrasser cette jeune femme105 ») et le sentiment de confiance renaît chez elle.

Chez Élie, le parcours est plus complexe et le nombre d’acteurs dont il a reçu la considération et l’attention inhérentes à l’éthique du care a été plus grand. Au début, les sœurs jumelles inuites Mary et Tracy, vulnérables elles-mêmes, lui ont fait découvrir le square Cabot, et le Cri Geronimo l’a accueilli dans sa tente dans le campement du « Village », « sans poser de questions106 ». Il lui a montré ensuite comment survivre lorsque le froid et l’humidité poussent les itinérants à chercher des abris plus sûrs. Jimmy le Nakota, « qui se consacre à aider ses sœurs et frères vivant dans les rues de Montréal107 », lui a demandé de travailler avec lui dans sa roulotte où il donnait à manger et l’a aidé à sortir de la rue. Une professeure retraitée bénévole, Lyne Obomsawin, abénakise, du centre d’amitié autochtone, l’a aidé avec patience à poursuivre ses études. Il se sent très reconnaissant en découvrant que « [d]es gens lui font confiance, ce qui n’était pas arrivé depuis la mort de son grand-père108 », et il commence à ressentir des sentiments tels que « la fierté, l’orgueil, la joie […] qui lui ont été étrangers pendant si longtemps qu’il arrive encore difficilement à les reconnaître109 ». Et Lisbeth, « son amoureuse », lui apporte confiance et tendresse. La collaboration entre Jimmy le Nakota et la jeune avocate Audrey Duval aboutit à la révision de la cause du meurtre de son père et à la conclusion qu’Élie était innocent. Sa communauté innue annule le bannissement. Élie entreprend une carrière d’avocat pour aider d’autres Autochtones. Sur le long chemin qu’Élie a parcouru (« T’as fait beaucoup de chemin depuis que t’as débarqué ici110 », lui dit Jimmy), ce qui l’emporte, c’est « l’inter-dépendance111 », une dynamique positive entre êtres humains qui partagent une même condition vulnérable, ce qui détermine la construction des individus et celle du groupe.

Le vertige : migrations et colonialisme

Stardust et Tiohtiá:ke nous plongent dans des réalités sociales complexes qui traduisent la fragilité et la souffrance des migrants ou « errants112 » provenant des réserves ou des villages autochtones et d’anciennes colonies, qui recherchent des espaces urbains susceptibles d’être intégrés à l’acte d’habiter et d’apporter une sécurité ontologique, et nous montrent la façon dont ces espaces et ces lieux décèlent des sources de violence associée au colonialisme. Ainsi, dans Stardust, Louise observe les « passagères » du CHRS dont la plupart sont « des pas-blanches. […] Mal placées au sein d’une société cloisonnée. Montrées du doigt par un système qui a refusé de les accueillir pleinement113 ». Elle y repère les ravages du système colonial, qui a construit des fictions qui mettent en scène une hiérarchie ontologique, politique et sociale :

Elles viennent de l’ancien empire colonial […]. Territoires jadis occupés où on a injecté dans le sang des peuples qu’être Français valait mieux que tout. On s’est démené pour que les Subsahariens rêvent de France. […] La France […] qu’on nous raconte chez nous. Celle qu’ils s’inventent pour se croire supérieurs à nous. Toute nation se crée des mythes. Toute nation repose sur des fictions. Dans celles qu’on nous conte de la France, il n’y a pas d’exclusion sociale114.

Dans Tiohtiá:ke, la violence du colonialisme de peuplement est exposée dans des récits tels que celui du grand-père d’Élie, qui lui explique la métamorphose subie par son fils – et futur père d’Élie –, provoquée par la violence inhérente au système des pensionnats autochtones, qui a abouti à une dépossession culturelle et à une perte de repères sur lesquelles s’est greffé son alcoolisme : « L’homme qu’il a connu, son père, était dévoré d’une soif qu’aucun alcool ne pouvait étancher115. » Un vécu aussi dramatique dans leur jeunesse était celui des sœurs inuites Mary et Tracy, envoyées également dans les pensionnats autochtones. Le silence de Mary sur cette période de sa vie et « la haine qu’[elle] vouait aux prêtres116 » en constituent des indices.

Ces deux romans, qui se mettent à l’écoute des voix des « indésirables » qui sont souvent condamnées au silence, dénoncent et déconstruisent des fictions et des mythes et dévoilent le legs des récits et des discours qui ont eu le pouvoir de classer, de nommer, de hiérarchiser et d’inoculer le racisme et la violence, et dont la puissance d’envoûtement a atteint l’être humain, en « Sapiens narrans117 » (Camille de Toledo). Face à la vulnérabilité spatiale, et surtout face à la fragilité de la vie, évoquée dans les deux ouvrages, on nous propose de repartir des ruines et de travailler pour l’espoir.

1 Andrée Courtemanche et Martin Pâquet, Prendre la route. L’expérience migratoire en Europe et en Amérique du Nord du xive au xxe siècle, Hull

2 Judith Butler et Frédéric Worms, Le Vivable et l’Invivable, Paris, Presses universitaires de France, « Questions de soins », 2021.

3 Voir l’anthropologue Michel Agier, La Peur des autres. Essai sur l’indésirabilité, Paris, Éditions Payot & Rivages, « Bibliothèque Rivages », 20

4 Léonora Miano, Stardust, Paris, Grasset, 2022.

5 Michel Jean, Tiohtiá:ke [Montréal], Paris, Seuil, 2023 [Montréal, éd. Libre Expression, 2021].

6 Paul Ricœur, « Responsabilité et fragilité », Autres Temps. Cahiers d’éthique sociale et politique, no 76-77, 2003, p. 127-141 [En ligne] DOI :

7 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 7.

8 Ibid., p. 8.

9 Ibid., p. 26.

10 Ibid., p. 28.

11 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 18

12 Ibid., p. 18.

13 Ibid., p. 19.

14 Ibid., p. 19.

15 Ibid., p. 80.

16 Revenu minimum d’insertion, p. 10.

17 Protection maternelle et infantile, p. 54.

18 Contrat emploi solidarité, p. 91.

19 Centre d’hébergement et de réinsertion sociale, p. 38.

20 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 124.

21 Ibid., p. 135.

22 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 23.

23 Ibid., p. 22.

24 Ibid., p. 23.

25 Ibid., p. 23.

26 Shirley Roy, « L’itinérance : forme exemplaire d’exclusion sociale ? », Lien social et Politiques, no 34, 1995, p. 73-80 [En ligne] DOI : https://

27 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 24.

28 Ibid., p. 19.

29 Michel Agier, La Peur des autres, op.cit., p. 23.

30 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 126.

31 Ibid., p. 15. « Grand-mère », en langue douala du Cameroun.

32 Ibid., p. 124, p. 195.

33 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 48.

34 Ibid., p. 48.

35 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 139.

36 Ibid., p. 139.

37 Ibid., p. 139.

38 Ibid., p. 58.

39 Ibid., p. 58.

40 Ibid., p. 183.

41 Ibid., p. 80.

42 Ibid., p. 97.

43 Zygmunt Bauman, Vies perdues. La Modernité et ses exclus, Paris, Payot, « Rivages poche. Petite bibliothèque » et Le Présent liquide. Peurs

44 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 47.

45 Ibid., p. 108.

46 Ibid., p. 81.

47 Antonin Margier et Lucas Melgaço, « Introduction au dossier “Whose right to the city? /Le droit à la ville, pour qui ?” », Environnement urbain

48 Antonin Margier, Cohabiter l’espace public, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017, p. 12, p. 54.

49 Henri Maldiney, Ouvrir le rien. L’Art nu, La Versanne, Encre Marine, 2000.

50 Martin Heidegger, « Bâtir, habiter, penser », in Essais et conférences, trad. par A. Préau, Paris, Gallimard, 1958.

51 Carmen Mata Barreiro, « Montréal, espace d’affect et espace de pensée dans l’écriture au féminin, de la “demeure” à la spatialisation d’une

52 Paul Carle et Lalie Bélanger-Dion, « L’instabilité résidentielle et l’itinérance en région. Le cas du nord des Laurentides », L’Itinérance en

53 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 27.

54 Ibid., p. 28.

55 Ibid., p. 26.

56 Ibid., p. 27.

57 Ibid., p. 28.

58 Ibid., p. 28.

59 C’est la loi no 74-955 du 19 novembre 1974, étendant l’aide sociale à de nouvelles catégories de bénéficiaires et modifiant diverses dispositions

60 Stardust, op. cit., p. 38.

61 Ibid., p. 46.

62 Ibid., p. 49.

63 Ibid., p. 50.

64 Ibid., p. 61.

65 Ibid., p. 63.

66 Ibid., p. 50.

67 Ibid., p. 63.

68 Ibid., p. 87.

69 Ibid., p. 88.

70 Ibid., p. 87.

71 Ibid., p. 99.

72 Ibid., p. 119, 157.

73 Ibid., p. 81.

74 Ibid., p. 126.

75 Ibid., p. 95.

76 Ibid., p. 214.

77 Ibid., p. 97.

78 Ibid., p. 98.

79 Ibid., p. 130.

80 Ibid., p. 100.

81 Ibid., p. 114-115.

82 Ibid., p. 115.

83 Ibid., p. 115.

84 Ibid., p. 182.

85 Ibid., p. 177.

86 Ibid., p. 178.

87 Ibid., p. 214.

88 Ibid., p. 214.

89 Ibid., p. 214.

90 Ibid., p. 136.

91 Aux xve et xvie siècles, des explorateurs européens explorent la façade atlantique du Canada dont Jacques Cartier. Dès 1497, Jean Cabot, un Italien

92 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 32.

93 Djemila Zeneidi-Henry, Les SDF et la Ville. Géographie du savoir-survivre, Paris, Bréal, « d’Autre part », 2002.

94 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 47.

95 Ibid., p. 47.

96 Ibid., p. 143.

97 Voir Antonin Margier, « La prise en compte de l’itinérance inuite : réflexions autour d’un quartier montréalais », Nouvelles pratiques sociales

98 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 76.

99 Ibid., p. 34.

100 Michel Lussault, Cohabitons ! Pour une nouvelle urbanité terrestre, Paris, Éd. du Seuil, Coll. « La Couleur des idées », 2024, p. 109.

101 Joan Tronto, Un monde vulnérable. Pour une politique du care, Paris, La Découverte, 2009 [Moral Boundaries. A Political Argument for an Ethic of

102 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 39.

103 Ibid., p. 39.

104 Ibid., p. 39.

105 Ibid., p. 39.

106 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 125.

107 Ibid., p. 206.

108 Ibid., p. 125.

109 Ibid., p. 76.

110 Ibid., p. 96.

111 Michel Lussault, Cohabitons ! Pour une nouvelle urbanité terrestre, op. cit., p. 128.

112 Le philosophe Étienne Balibar propose le mot « errants », insistant sur la mobilité des humains qu’il faut exprimer en termes de droit. Voir :

113 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 68.

114 Ibid., p. 69, p. 43.

115 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 125.

116 Ibid., p. 143.

117 Camille de Toledo, Une histoire du vertige, Lagrasse, Éditions Verdier, « Collection jaune », 2023.

Notes

1 Andrée Courtemanche et Martin Pâquet, Prendre la route. L’expérience migratoire en Europe et en Amérique du Nord du xive au xxe siècle, Hull, Éditions Vents d’Ouest, 2001, p. 4.

2 Judith Butler et Frédéric Worms, Le Vivable et l’Invivable, Paris, Presses universitaires de France, « Questions de soins », 2021.

3 Voir l’anthropologue Michel Agier, La Peur des autres. Essai sur l’indésirabilité, Paris, Éditions Payot & Rivages, « Bibliothèque Rivages », 2022.

4 Léonora Miano, Stardust, Paris, Grasset, 2022.

5 Michel Jean, Tiohtiá:ke [Montréal], Paris, Seuil, 2023 [Montréal, éd. Libre Expression, 2021].

6 Paul Ricœur, « Responsabilité et fragilité », Autres Temps. Cahiers d’éthique sociale et politique, no 76-77, 2003, p. 127-141 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.3406/chris.2003.2415.  

7 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 7.

8 Ibid., p. 8.

9 Ibid., p. 26.

10 Ibid., p. 28.

11 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 18

12 Ibid., p. 18.

13 Ibid., p. 19.

14 Ibid., p. 19.

15 Ibid., p. 80.

16 Revenu minimum d’insertion, p. 10.

17 Protection maternelle et infantile, p. 54.

18 Contrat emploi solidarité, p. 91.

19 Centre d’hébergement et de réinsertion sociale, p. 38.

20 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 124.

21 Ibid., p. 135.

22 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 23.

23 Ibid., p. 22.

24 Ibid., p. 23.

25 Ibid., p. 23.

26 Shirley Roy, « L’itinérance : forme exemplaire d’exclusion sociale ? », Lien social et Politiques, no 34, 1995, p. 73-80 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.7202/005232ar.

27 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 24.

28 Ibid., p. 19.

29 Michel Agier, La Peur des autres, op.cit., p. 23.

30 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 126.

31 Ibid., p. 15. « Grand-mère », en langue douala du Cameroun.

32 Ibid., p. 124, p. 195.

33 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 48.

34 Ibid., p. 48.

35 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 139.

36 Ibid., p. 139.

37 Ibid., p. 139.

38 Ibid., p. 58.

39 Ibid., p. 58.

40 Ibid., p. 183.

41 Ibid., p. 80.

42 Ibid., p. 97.

43 Zygmunt Bauman, Vies perdues. La Modernité et ses exclus, Paris, Payot, « Rivages poche. Petite bibliothèque » et Le Présent liquide. Peurs sociales et obsession sécuritaire, Paris, Seuil, 2007.

44 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 47.

45 Ibid., p. 108.

46 Ibid., p. 81.

47 Antonin Margier et Lucas Melgaço, « Introduction au dossier “Whose right to the city? /Le droit à la ville, pour qui ?” », Environnement urbain, vol. 10, 2016 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.7202/1040594ar.

48 Antonin Margier, Cohabiter l’espace public, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017, p. 12, p. 54.

49 Henri Maldiney, Ouvrir le rien. L’Art nu, La Versanne, Encre Marine, 2000.

50 Martin Heidegger, « Bâtir, habiter, penser », in Essais et conférences, trad. par A. Préau, Paris, Gallimard, 1958.

51 Carmen Mata Barreiro, « Montréal, espace d’affect et espace de pensée dans l’écriture au féminin, de la “demeure” à la spatialisation d’une identité collective », in Ici et maintenant. Les représentations de l’habiter urbain dans la fiction contemporaine, Christophe Duret et Christiane Lahaie (dir.), Montréal, Lévesque éditeur, « Réflexion », 2022, p. 90.

52 Paul Carle et Lalie Bélanger-Dion, « L’instabilité résidentielle et l’itinérance en région. Le cas du nord des Laurentides », L’Itinérance en questions, Shirley Roy et Roch Hurtubise (dir.) Québec, Presses de l’Université du Québec, « Problèmes sociaux et interventions sociales », 2007, p. 311-332.

53 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 27.

54 Ibid., p. 28.

55 Ibid., p. 26.

56 Ibid., p. 27.

57 Ibid., p. 28.

58 Ibid., p. 28.

59 C’est la loi no 74-955 du 19 novembre 1974, étendant l’aide sociale à de nouvelles catégories de bénéficiaires et modifiant diverses dispositions du Code de la famille et de l’aide sociale du Code de travail, qui créa les CHRS (dont la dénomination du départ était « centres d’hébergement et de réadaptation sociale »).

60 Stardust, op. cit., p. 38.

61 Ibid., p. 46.

62 Ibid., p. 49.

63 Ibid., p. 50.

64 Ibid., p. 61.

65 Ibid., p. 63.

66 Ibid., p. 50.

67 Ibid., p. 63.

68 Ibid., p. 87.

69 Ibid., p. 88.

70 Ibid., p. 87.

71 Ibid., p. 99.

72 Ibid., p. 119, 157.

73 Ibid., p. 81.

74 Ibid., p. 126.

75 Ibid., p. 95.

76 Ibid., p. 214.

77 Ibid., p. 97.

78 Ibid., p. 98.

79 Ibid., p. 130.

80 Ibid., p. 100.

81 Ibid., p. 114-115.

82 Ibid., p. 115.

83 Ibid., p. 115.

84 Ibid., p. 182.

85 Ibid., p. 177.

86 Ibid., p. 178.

87 Ibid., p. 214.

88 Ibid., p. 214.

89 Ibid., p. 214.

90 Ibid., p. 136.

91 Aux xve et xvie siècles, des explorateurs européens explorent la façade atlantique du Canada dont Jacques Cartier. Dès 1497, Jean Cabot, un Italien au service de l’Angleterre, aborde à Terre-Neuve. Voir Paul-André Linteau, Histoire du Canada, Paris, Presses universitaires de France, « Que sais-je ? », 1994, p. 10.

92 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 32.

93 Djemila Zeneidi-Henry, Les SDF et la Ville. Géographie du savoir-survivre, Paris, Bréal, « d’Autre part », 2002.

94 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 47.

95 Ibid., p. 47.

96 Ibid., p. 143.

97 Voir Antonin Margier, « La prise en compte de l’itinérance inuite : réflexions autour d’un quartier montréalais », Nouvelles pratiques sociales, vol. 27, nº 1, 2014, p. 50-63.

98 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 76.

99 Ibid., p. 34.

100 Michel Lussault, Cohabitons ! Pour une nouvelle urbanité terrestre, Paris, Éd. du Seuil, Coll. « La Couleur des idées », 2024, p. 109.

101 Joan Tronto, Un monde vulnérable. Pour une politique du care, Paris, La Découverte, 2009 [Moral Boundaries. A Political Argument for an Ethic of Care, New York, Routledge, 1993].

102 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 39.

103 Ibid., p. 39.

104 Ibid., p. 39.

105 Ibid., p. 39.

106 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 125.

107 Ibid., p. 206.

108 Ibid., p. 125.

109 Ibid., p. 76.

110 Ibid., p. 96.

111 Michel Lussault, Cohabitons ! Pour une nouvelle urbanité terrestre, op. cit., p. 128.

112 Le philosophe Étienne Balibar propose le mot « errants », insistant sur la mobilité des humains qu’il faut exprimer en termes de droit. Voir : Étienne Balibar dans Ali Benmakhlouf, L’Humanité des autres, Paris, Albin Michel, 2023, p. 195.

113 Léonora Miano, Stardust, op. cit., p. 68.

114 Ibid., p. 69, p. 43.

115 Michel Jean, Tiohtiá:ke, op. cit., p. 125.

116 Ibid., p. 143.

117 Camille de Toledo, Une histoire du vertige, Lagrasse, Éditions Verdier, « Collection jaune », 2023.

Citer cet article

Référence électronique

Carmen MATA BARREIRO, « Naufragés dans la ville : vertige et « indésirabilité » », Sociopoétiques [En ligne], 10 | 2025, mis en ligne le 17 novembre 2025, consulté le 17 décembre 2025. URL : http://revues-msh.uca.fr/sociopoetiques/index.php?id=2467

Auteur

Carmen MATA BARREIRO

Universidad Autónoma de Madrid
CRIEM, Université McGill, Montréal

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