Sociopoétique de l’arrivée. Lampedusa comme variation autour d’un nom

DOI : 10.52497/sociopoetiques.2449

Résumés

Le nom de Lampedusa résonne comme une honte, une libération ou un échec, suivant le point de vue que l’on adopte, que l’on soit migrant ou accueillant. À partir d’un corpus composé de quatre œuvres, deux romans pour adultes : Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit (2014) et Mohamed Mbougar Sarr, Silence du chœur (2017), et de deux romans pour enfants et adolescents : Maryline Desbiolles, Lampedusa (2012) et Annelise Heurtier, Refuges (2015), nous nous interrogerons sur ce que le nom de Lampedusa fait à la migration et comment les textes littéraires s’emparent de ce seul nom avec différentes variations, pour évoquer des personnages sidérés, selon la place qu’ils occupent, selon leur expérience de l’arrivée ou de l’accueil. Lampedusa reconfigure la migration car elle implique, à elle seule, une mise en mouvement de chacun.

The name Lampedusa resonates with shame, liberation or failure, depending on whether you’re a migrant or a host. Based on a corpus of four works, two novels for adults: Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit (2014) and Mohamed Mbougar Sarr, Silence du chœur (2017), and two novels for children and teenagers: Maryline Desbiolles, Lampedusa (2012) and Annelise Heurtier, Refuges (2015), we’ll look at what the name Lampedusa does to migration and how literary texts seize on this name alone with different variations, to evoke flabbergasted characters, depending on the place they occupy, depending on their experience of arrival or welcome. Lampedusa reconfigures migration, because it alone implies that everyone is on the move.

Index

Mots-clés

migration, Lampedusa, arrivée, nom, lieu, Kerangal (Maylis de), Mbougar Sarr (Mohamed), Desbiolles (Maryline), Heurtier (Annelise)

Keywords

migration, Lampedusa, arrival, name, place, Kerangal (Maylis de), Mbougar Sarr (Mohamed), Desbiolles (Maryline), Heurtier (Annelise)

Plan

Texte

Le nom de Lampedusa résonne comme un repoussoir ou comme un talisman. Repoussoir pour ceux et celles qui considèrent que l’arrivée de milliers de migrants sur cette île signe les échecs de toutes les politiques migratoires européennes, talisman pour ceux et celles qui arrivent enfin sur l’île, point final de leur voyage en mer et de leur exil, lieu de sauvetage et point d’ancrage enfin situé et stable après un périple souvent mortel. Lampedusa est le lieu de l’arrivée tant souhaitée, comme Ithaque figurait le lieu du retour tant désiré pour Ulysse. La représentation collective, définie par Émile Durkheim en lien avec la conscience collective, relève de processus dynamiques et s’ancre dans des représentations pour lesquelles le nom joue un rôle majeur, qui importe particulièrement dans une perspective sociopoétique1 – et ce d’autant plus ici que Lampedusa devient le nom même d’une œuvre, celle de Maryline Desbiolles. Le nom est un condensé de projections fantasmatiques. Il agit dans l’imaginaire des migrants et des accueillants comme une variation infinie et kaléidoscopique de possibles et mobilise des paradigmes axiologiques très forts et souvent contradictoires : accueil ou haine, hospitalité ou désintérêt, accompagnement ou éloignement, partage ou silence, aide ou indifférence. Lieu éminemment géopolitique, il s’inscrit également dans une géopoétique s’appuyant sur les caractéristiques topographiques du lieu, en particulier son caractère insulaire. En effet, pour beaucoup, le nom de Lampedusa a perdu définitivement son caractère de légèreté renvoyant à l’île paradisiaque de Sicile, devenant désormais un nom « concentrant en lui seul la honte et la révolte, le chagrin, désignant un état du monde, un tout autre récit 2» selon les propos de Maylis de Kerangal, à propos de son roman À ce stade de la nuit qui se veut une méditation sur le naufrage d’un bateau au large de l’île. De nombreux auteurs et autrices ont exploré cette variation autour du nom Lampedusa qui renvoie désormais à une réalité sociale très différente de celles des baigneurs en vacances venus trouver de la tranquillité : la migration a bouleversé les paysages et l’organisation sociale de la petite ville, modifiant durablement les relations entre les arrivants et les enracinés.

L’écriture de la variation autour du nom de Lampedusa oblige à trouver de nouveaux points nodaux, à interroger le tissu social : comment appréhender cette arrivée de migrants ? Quelle hospitalité d’un côté et quelles attentes de l’autre ? L’île offre-t-elle un point de rencontre possible entre les hommes ? C’est ce que tente de définir Mohamed Mbougar Sarr dans Silence du chœur3 décrivant le chaos apporté par soixante-douze hommes, appelés les ragazzi, arrivés dans un bourg de la campagne sicilienne nommé Altino, dont on devine qu’il s’agit de Lampedusa. Le choc induit par les représentations sociales de la migration implique de redéfinir les espaces, même imaginaires, voire de les renégocier, mais aussi d’envisager de nouvelles relations, en particulier celles fondées sur l’accompagnement, comme l’expérimente la jeune Mila redessinant les contours de la société au contact des migrants, dans Refuges, le roman pour la jeunesse d’Annelise Heurtier4, tout comme dans Lampedusa de Maryline Desbiolles5 où l’amitié entre Fadoun et la narratrice remplace de façon réelle l’ombre fantasmatique de Lampedusa qui plane sur la famille de cette dernière.

Ces quatre œuvres, deux romans pour adultes et deux romans pour enfants et adolescents, engagent à s’interroger sur Lampedusa dont le nom fonctionne comme un sociolecte, à la fois pour les enracinés et les migrants. La sociopoétique de l’arrivée ou de la non-arrivée chez Maylis de Kerangal et Maryline Desbiolles conditionne ainsi le nom, lui donnant des significations différentes, selon la réverbération et le miroitement qu’il prend dans la bouche des déplacés ou des habitants. Cette conflictualité du nom, son caractère agonistique dans les textes invitent à considérer, pour les personnages différemment sidérés selon la place qu’ils occupent6, l’arrivée comme point de jonction inédit reconfigurant la migration. Nous nous attacherons dès lors à montrer l’évolution de la littérature du départ vers une littérature de l’arrivée, puis à analyser la géopoétique du nom de Lampedusa et la façon dont le lieu interagit sur les personnes, dans la perspective de proposer une lecture de Lampedusa relevant d’une sociopoétique de l’hybridation.

La littérature de la migration, une littérature de l’arrivée : un changement de paradigme

La migration algérienne est particulièrement emblématique du départ et fonctionne comme une matrice d’écriture pour les auteurs et autrices qui décrivent la migration. En effet, dans la tradition de la littérature migrante, définie par Monique Lebrun et Luc Collès7 et de la littérature de jeunesse migrante, ainsi que nous l’avons théorisée8, publiée des années 1970 à 2010, la problématique du départ de l’Algérie occupe l’esprit des héros. Leur départ forcé, suite à la guerre d’indépendance algérienne, s’accompagne de sentiments de perte et d’arrachement au pays natal, vécus de façon déchirante. Dans cette littérature, l’exil est le moteur de l’écriture, comme le rappelle la correspondance entre Leïla Sebbar et Nancy Huston qui procède à « l’autopsie de l’exil9 ». L’écriture du départ se fonde sur un topos littéraire majeur qui se manifeste par l’image du bateau qui part de la rade d’Alger. Alain Vircondelet a d’ailleurs intitulé un de ses récits autobiographiques La Traversée10, qui symbolise ce moment particulier où le héros, accoudé au bastingage du bateau, comprend que ce départ sonne le glas de l’enfance en Algérie. Véritable figure archétypale représentant le « tragique du trop-tard11 », l’image du bateau rythme les récits. De fait, les récits s’intéresseront davantage « aux difficultés de l’intégration, aux affres identitaires dans le pays d’accueil12 » vécus par les héros13.

A contrario, les textes qui s’inscrivent dans la tradition des récits de la migration14 font montre d’une inversion des perspectives, comme le souligne Ana Isabel Labra Cenitagoya : « Nous pensons qu’il serait possible de considérer cette nouvelle littérature des migrations comme une évolution de la littérature migrante de la deuxième moitié du xxe siècle15 ». Les récits se focalisent davantage sur l’arrivée en Europe comme ligne de mire et début d’un récit possible. C’est ce qu’avance également Catherine Mazauric dans Mobilités d’Afrique en Europe, signalant que « l’accent paraît s’être désormais déplacé, en cet ensemble émergent, vers les différentes étapes du périple nécessaire pour accéder au continent européen16 ». Trop difficiles pour être racontées, les conditions de départ et de voyage sont tues, aussi parce que les migrants eux-mêmes ne prennent pas la parole, à l’inverse des immigrés algériens – dont la langue française est le « butin de guerre » selon Kateb Yacine – qui choisissaient d’abord l’autobiographie pour se raconter17. Les migrations contemporaines, centrées sur l’arrivée massive de réfugiés en 2015, se racontent d’abord par ceux qui les voient, les entendent, les prennent en charge, comme c’est le cas de nos auteurs et autrices, ce qui veut dire que les récits des traversées sont évoqués puisqu’ils sont relayés également par les médias18. En effet, les quatre récits retenus font de l’arrivée un nouveau topos de la migration. Comme le laisse entendre le terme Refuges, titre de l’ouvrage d’Annelise Heurtier, il s’agit plutôt de raconter la fin d’un voyage périlleux et d’évoquer l’idée d’un possible accueil, tandis que pour Maylis de Kerangal, il s’agit d’évoquer le naufrage de migrants à Lampedusa qui solde leur voyage dont elle découvre l’existence « à ce stade la nuit ». La « littérature de la migration » post-2015 englobe en effet différentes œuvres relatant la crise migratoire en Europe. Elle est écrite par des auteurs issus de l’immigration prêtant leur voix aux migrants, comme Azouz Begag avec Mamadou Sow dans l’album Né pour partir – Récit de Mamadou, migrant mineur de Guinée19, mais aussi par des anonymes, membres d’associations qui accompagnent les migrants, comme Marie-Odile Laîné recueillant sous sa plume les récits de migrants sous l’intitulé : Rien de ce qui est humain ne m’est étranger20. Dans ces cas-là, plutôt rares, la parole autobiographique est convoquée : « C’était, pour moi, d’abord l’occasion de donner aux migrants qui avaient perdu leurs repères, la possibilité d’être reconnus comme sujets, et j’ai pu au cours de notre rencontre évaluer la dimension cathartique de cette mise en voix21. » Cependant, les migrations post-2015 sont majoritairement racontées sous des formes romanesques par des auteurs n’ayant aucun lien avec la migration22. Nous avons choisi un corpus majoritairement composé d’autrices françaises non issues de la francophonie avec Maylis de Kerangal, Maryline Desbiolles et Annelise Heurtier. Seul Mohamed Mbougar Sarr, né au Sénégal, est un auteur francophone.

Ces romans mettent l’accent sur la rencontre et l’accompagnement des migrants où la périphrase du titre Silence du chœur met en tension deux blocs de protagonistes présents dans les quatre romans : les écoutants, comme la narratrice de À ce stade de la nuit, versus les migrants, vision fantomatique et indifférenciée résumée à plusieurs reprises par des chiffres qui ouvrent et clôturent le récit : « 283 noyés lors d’un naufrage à l’aube de Noël en 1996, près de 3000 morts ou disparus depuis 2002, environ 350 aujourd’hui, ce 3 octobre 201323 » puis, « autour de 350, plus de 350, au moins 35024 » relayés dans leur silence par la voix de la radio ; la petite fille narratrice privée de Lampedusa et Fadoun, Djiboutienne passée par l’île dans Lampedusa (au milieu desquelles madame Goiran fait office d’adjuvant) ; Lila et Paola, duo courageux de sauveuses, comme Alessandro et Ugo, le pêcheur et son fils, face au bloc des habitants du village de Lampedusa dans Refuges – leurs actions sont entrecoupées des récits de la migration pris en charge par Meloata, Gebriel, Awat, Amanuel, Pietros, Meron, Amir, Saafiya dont les voix en italique ponctuent le roman ; dans Silence du Chœur, les individus migrants arrivés à Altino versus les autochtones issus de la même petite ville, mais aussi le groupe des migrants (ils sont soixante-douze) face aux groupes des habitants, lesquels se divisent en deux : les personnes hostiles et les accueillants.

La migration s’énonce par cercles concentriques dans une chorégraphie sonore dont émergent des personnalités en forme de coryphée : Mila et Paola, Fadoun, le curé, un poète, un ragazzo. La métaphore musicale rend compte du collectif : le chœur, c’est celui des migrants dont la voix unique se fait entendre, mais qu’on cherche à invisibiliser ou qu’on refuse d’entendre. Chacun des récits est en effet celui d’une rupture dans le silence à la faveur de la nuit, comme si la réalité lointaine de la migration n’était envisageable que dans l’envers du décor : la disparition de Fadoun est vécue par la fillette comme une trahison, mais elle est annoncée par ce passage : « Alors que j’étais à moitié endormie, Fadoun me raconta son histoire dont je ne saisissais que des bribes qui se nouaient à mon sommeil25. » Elle repensera la nuit à son récit et comprendra pourquoi Fadoun a disparu. L’identité de migrante de la petite Djiboutienne lui apparaît alors réellement et change son point de vue sur Lampedusa : « Dans la nuit seulement, je mesurais l’étendue de ma bêtise, de mon égoïsme26. » Pourtant, le lecteur est accompagné par le dessin de Rascal figurant sur la première de couverture, sur un fond blanc, où une barque laisse apparaître à son bord des ronds noirs qui semblent être des têtes. Malgré cet avertissement, le lecteur enfantin épouse le point de vue de la narratrice enfermée dans son propre chagrin de ne pas pouvoir aller en vacances à Lampedusa et vit l’amitié des deux petites filles qui semble éternelle. La littérature de la migration post-2015, en littérature de jeunesse, se présente en effet comme une littérature d’accompagnement visant à faciliter la rencontre entre les enfants migrants et les enfants des pays d’accueil. Dans cette perspective, la migration s’offre à la compréhension par une révélation :

Mila ne savait pas quoi répondre. Elle était stupéfaite. Elle avait l’impression que tout un pan du monde se révélait brusquement à elle, avec des réalités dont elle n’avait jamais entendu parler, peut-être parce qu’elle avait choisi de les ignorer, peut-être parce qu’elle ne voulait pas les percevoir, trop recroquevillée sur elle-même27.

De même, la disponibilité de la narratrice dans l’ouvrage de Maylis de Kerangal s’ouvre la nuit : « La nuit s’est creusée comme une vasque28. » Par une intertextualité – elle a lu Le Chant des pistes de Bruce Chatwin lors d’un voyage en train vers la Sibérie –, elle accède à l’écriture lui permettant la représentation de la migration, grâce à l’existence des « songlines, celles des aborigènes australiens29 » : « Pour écrire, j’ai pensé qu’il fallait capter ce chant qui subsistait d’un temps où le livre n’existait que sous la forme chantée30. » L’écriture de Maylis de Kerangal s’opère par « une rêverie cosmologique31 », comme l’explique Dominique Viart qui indique : « Il est tentant de transposer, et de lire dans cet énoncé quelque chose comme un “art poétique” de Maylis de Kerangal32. » Là encore, comme pour le personnage de Mila, l’incrédulité de l’annonce du naufrage qui place la narratrice encore pour le moment hors champ, en dehors du monde, dans sa petite cuisine, et qui la fait rêver à ce qu’elle connaît de Lampedusa, comme une sorte de « remontée-amont33 » – les ors du temps jadis remémoré à travers le film de Visconti Le Guépard , se mue en action. Dans À ce stade de la nuit, à travers la composition même du récit, la narratrice, tout comme Mila dans Refuges, tente de se reconnecter à Lampedusa en cherchant à ressaisir les temps immémoriaux où « appartenir au clan, c’est chanter son paysage34. »

Le nom de Lampedusa, une géopoétique

Cette approche centrée sur les valeurs d’accueil et de rencontre est tributaire d’un ancrage géographique particulier. Les quatre romans sont centrés sur un seul lieu, comme pour les règles de la tragédie où se déploie l’unité de temps, de lieu et d’action. La force politique et revendicatrice des récits est fondée sur la question du nom Lampedusa, comme représentation sociale, géographique et poétique, dont la mise en tension entre ce qu’il représente et ce qu’il est devenu est au cœur de l’écriture. Lampedusa, lieu de villégiature ou lieu de mort ? Ce sont les conditions toponymiques de Lampedusa qui portent l’intrigue et l’action.

Les écrits brefs de Maryline Desbiolles et de Maylis de Kerangal ont comme points communs qu’ils sont fondés sur une expérience du lieu Lampedusa qui n’est pas advenue : Lampedusa figure comme un manque, une absence, une « hantologie », pour reprendre l’expression de Jacques Derrida35. Le nom est toujours là, hégémonique, persistant, dominant, il forme une entité préexistante, liée à une sociopoétique particulière – les vacances, les groupes sociaux aisés, l’île paradisiaque – mais déformée par le réel : Lampedusa est aussi un lieu mortifère. Dans le récit pour enfants de Maryline Desbiolles, Lampedusa, le nom de l’île fonctionne comme un absent, une mémoire trouée dans un système familial détruit. En lieu et place de Lampedusa, lieu de rêve qui était à l’origine du projet de vacances familiales, se trouve un arrachement : le père a quitté la famille, les vacances à Lampedusa n’auront pas lieu, la famille doit déménager. « Cet été-là, nous n’avons pas été à Lampedusa, mais nous avons quitté pour toujours le village36. » Raconté à la première personne du singulier, le récit est vu par la narratrice qui se voit opposer un autre Lampedusa, celui de Fadoun, la jeune Djiboutienne qu’elle rencontre, qui devient son amie et qui lui racontera son Lampedusa à elle. Le nom même de Lampedusa fonctionne donc à plein comme un possible ou comme un briseur de rêve : un point commun entre les deux fillettes. Pour Fadoun, la traversée se solde par un naufrage à l’arrivée de Lampedusa et la perte de la sœur aînée, Samala, qui se noie. Lampedusa est donc irrémédiablement associée au tragique du « trop-tard » défini pour la littérature migrante.

L’évocation de Lampedusa s’articule en outre dans une dialectique du proche et du lointain, d’une géographie imaginaire ou réelle. Ainsi, Fadoun a vraiment vu Lampedusa, tandis que son amie l’a rêvée :

Je regardais l’île de Lampedusa sur la carte, un minuscule caillou au sud de la Sicile, bien plus petit que les lettres de son nom ou que celui des Pélages, l’archipel que Lampedusa formait avec ses deux sœurs Linosa et Lampione (pas même représentée sur la carte comme elle n’est pas habitée), un minuscule caillou au milieu de la mer, entre l’Italie et la Tunisie37.

Chez Maylis de Kerangal, Lampedusa renvoie à un imaginaire de films et de livres et fonctionne, grâce à ses « remontées temporelles38 », avec son historicité fondée sur une anthropologie : les bals de la bonne société, la villégiature, les fastes d’antan, le visage de Burt Lancaster qui incarne le héros, auxquels s’oppose la tragédie entendue à la radio : le naufrage d’un navire avec trois cent cinquante personnes à bord. Si elle ne vit pas la tragédie directement, la narratrice est reliée à Lampedusa par la démultiplication d’un phénomène sonore : le récit qui est en fait à la radio, fait d’elle un témoin muet de la tragédie. Elle est proprement « sidérée » et se met à « considérer » la migration, comme nous invite à le faire Marielle Macé dans son essai.

De la même manière, la narratrice de Lampedusa voit son salut dans la fabrique d’un îlot personnel aux deux fillettes : lors de leur vagabondage, des bouées posées sur une rivière tarie, le Paillon, forment leur île à elles. Ces bouées en caoutchouc sont en fait des pneus de voitures abandonnées. Elles rappellent les bouées de sauvetage des migrants, objets dérisoires, mais ô combien salvateurs. Elles se fabriquent ainsi des fauteuils dans lesquels elles s’affalent. Ce détournement de l’usage même de ces pneus concourt au travestissement des objets. Ils redonnent ainsi au lieu même de Lampedusa une proximité, une réalité, non seulement géographique fondée sur l’aspect insulaire et maritime, mais aussi sociologique, les pneus figurant les bouées de sauvetage des migrants. C’est aussi dans une de ces bouées que Fadoun, avant d’être renvoyée dans son pays, dépose un cadeau à son amie. Ces objets fonctionnent, au cœur même du texte, comme des codes sociaux propres aux réfugiés et comme une mise en abyme de la condition des migrants.

Géopoétique du nom de Lampedusa

« J’explore ce nom, j’en fais le tour, je le soupèse et le décompose, j’y entends in fine ce toponyme, ces quatre syllabes qui font surgir un espace39. » Le nom de Lampedusa constitue une « hantologie ». « J’ai déchiffré les neuf lettres, pâles, ténues : LAMPEDUSA40. » Le texte d’À ce stade de la nuit est construit sur de micro-situations qui révèlent peu à peu ce qu’est Lampedusa : d’abord, un imaginaire flamboyant porté par la concrétisation imageante des films Le Guépard et Le plongeon (The Swimmer) à travers l’incarnation de l’acteur Brut Lancaster, qui symbolisent la déchéance des aristocrates italiens et américains, puis le martèlement d’un nom, « ce nom qui est déjà un récit41 » : Tomasi di Lampedusa, et enfin, l’évocation de récits mythiques chantés, les songlines des Aborigènes. Lampedusa devient in fine un lieu révélé visuellement par une mappemonde, à tel point que la narratrice doit rétablir un parcours géographique sensible de réappropriation du lieu : « Mais les bouts de mes doigts occupaient grossièrement la surface et j’ai fini par me brûler les pulpes42 », explique-t-elle, alors qu’elle a « placé le pouce et l’index en compas sur le globe43 ». Le mot Lampedusa parcourt le texte, ses occurrences sont si nombreuses qu’affecté d’une inquiétante étrangeté, il revêt une dimension mystique : « je suis maintenant rivée à l’île de Lampedusa comme on s’obsède d’une poussière sur une feuille vierge. » La répétition du nom et la lente succession d’autres noms de lieux convoqués sous forme d’énumération dessinent une toponymie, celle des pays d’où proviennent les migrants, mais aussi les îles qui entourent la Sicile. Or, le nom, désormais décalé par l’expérience de la migration, est « retourné comme un gant44 » : « Étrangement, le toponyme insulaire n’avait jamais encore recouvert le nom de fiction qui avait fini par sédimenter en moi45. »

Si Altino est le nom choisi par le narrateur de Silence du Chœur, personne n’est dupe : la description minutieuse de la petite ville, de ses falaises et de sa destruction par une éruption volcanique à la fin du récit, les rochers et la mer font bien penser à Lampedusa. Le nom d’Altino résonne comme un port d’attache, mais aussi comme un point nodal de croisement, de regroupement, aux intérêts variés selon les groupes sociaux. La ville faisant office de « lieux-rencontres46 » est une entité à elle seule :

Les lieux où nous vivons retiennent tout de nous : voix, visages, paroles et gestes ; et on se souvient moins de ces lieux qu’ils ne se rappellent qui nous sommes et d’une manière plus fidèle47.

Ainsi, autant le jour est vivant, rempli de bruits et de rencontres, autant la nuit est symbolique des villes occidentales : rues désertes, silence et nuit noire rendent pour un temps le lieu inhospitalier. Cet envers du décor rend menaçante l’hospitalité pourtant avancée par des accueillants ; la ville est sans cesse en tension, elle est porteuse d’un bouillonnement sous-terrain de violences tues mais palpables, d’un monde inversé dont la violence se déclenchera à la fin du récit. Suite à différentes luttes entre clan d’ici et clan d’ailleurs, les ragazzi sont menaçants et seule la situation finale permettra de mettre fin à ce grondement souterrain : « Leurs regards luisaient d’âpres éclats qui n’étaient plus ceux du Rêve, mais ceux de la survie à tout prix48. »

Pour la narratrice de Refuges, les rochers, les falaises et la mer, les places chaudes de la petite ville sont autant de points d’ancrage qui retrouvent ses sensations d’été à travers sa déambulation dans la ville à vélo. Les sons, odeurs, couleurs forment une impression rassurante du déjà-vu, trahie par l’irruption de la migration dans cet univers protégé. Pourtant, les partisans de l’accueil affrontent ceux qui prônent le rejet, jusqu’au happing ending propre aux récits pour la jeunesse : l’hospitalité accordée à un nouveau bateau qui vient d’arriver, au mépris des règles qui s’appliquent contre les accueillants.

Dans Lampedusa, la création d’un îlot dans le nouveau quartier qu’habite la petite fille permet à Fadoun et la narratrice de s’extraire du monde et de vivre une véritable robinsonnade. « Lampedusa brille par son absence et nous habitons désormais entre des parenthèses. Beaucoup de vide, de trous, de manques autour de moi49. » Là encore, la recréation du caractère insulaire de Lampedusa par le bricolage d’une cabane permet de faire vivre l’imaginaire lié à ce lieu, fantasmé par l’une et mortifère pour l’autre. La géopoétique du nom renvoie à l’imaginaire de l’île, mais comme dans l’essai de Marielle Macé, Sidérer, considérer, qui décrit le contraste incongru entre des lieux de pauvreté des migrants (bidonvilles et campements) et les lieux de fêtes de riches Parisiens. Dans le roman de Maryline Desbiolles, le terrain vague d’un lit de rivière asséché où traînent vieilles chaussures, caddies et valises abandonnés du quartier Pasteur à Nice forme l’îlot de la solitude et de l’amitié des jeunes héroïnes. Le décor (herbes, chaleur et vision désertique) imprime l’idée du chaos qu’elles ont traversé toutes les deux. La reconstruction et la reconfiguration de ce lieu qu’elles s’approprient et où elles jouent procèdent de leur propre reconstruction mémorielle : cette Lampedusa en miniature devient un trait d’union entre les deux enfants.

Le nom de Lampedusa fonctionne en effet comme un paysage. Le nom saisit tout à la fois le lieu, celui qui le pense et qui le regarde. « Tout fait trace. Le lieu n’oublie rien. C’est son malheur. Mais c’est là aussi sa grandeur : il ne peut se permettre d’être amnésique devant l’histoire et certaines de ses tragédies. Contrairement aux hommes50. » Lampedusa contient tout entier la mémoire des hommes et des lieux, des déplacements, des transports, des pays de ceux qui passent. Le nom de Lampedusa lui-même forme un paysage. Il s’agit d’un nom qui oblige à exercer une « pensée-paysage » telle que l’entend Michel Collot51.

L’histoire de Lampedusa est placée sous le signe de l’hybridité des corps, des bateaux qui accostent, des lieux de culte. Le curé, « le Padre », personnage haut en couleur, Sœur Maria, la famille de Calcagno, Mateo Falconi, Sabrina, la militante active, Jogoy, le migrant, Salvatore Pessoto sont, dans Silence du chœur, autant d’occupants de ces lieux, signes de cette hybridité. Ils habitent des Babel en acte devenus des « hyper-lieux de la migration52. »

De la même manière, comme le répète Paola à Mila dans Refuges, l’île est « un pont entre l’Afrique et l’Europe et a longtemps servi d’étape pour les pirates et les navigateurs53. » Faire l’expérience du nom de Lampedusa, c’est par nature faire l’expérience d’un espace mobile mais aussi d’un point d’ancrage et y puiser identité et valeurs particulières : « Tous les Lampedusiens te diront que ce sanctuaire est l’âme de leur île54. » Cette babélisation des voix est amenée par la métaphore des lucioles, signe que le « monde ne disparaît pas quand on ferme les yeux55 », qui termine le roman de Maryline Desbiolles, tandis que Maylis de Kerangal, par les sédimentations de la parole, par « une phrase emportée56 » qui enfle et la pulsion rythmique qu’elle lui donne, inscrit le nom de Lampedusa dans une pensée-paysage, sous « un tropisme paléontologique57 ». Chez Mohamed Mbougar Sarr également, les relances et les répétitions amènent une forme d’anxiété au texte. Le lieu même du texte, le nom même de Lampedusa expérimentent une forme d’insécurité propre à la migration.

Proust décrivait dans La Recherche, « Nom de pays : le nom » les résonances des noms de Balbec, Venise ou Parme. Les couleurs qu’il associe à ces noms de villes impliquent un rapport très étroit entre signifiant et signifié. L’onomastique de Lampedusa révèle une variation, une saturation de l’espace où le nom enfle et se trouve porteur d’une histoire complexe, hybride, babélienne, qui le dépasse. Celui-ci devient « le matériau même de la diégèse58 », impliquant une empathie fictionnelle du lecteur pour le feuilleté du mot et ce qu’il induit comme historicité. Dans la projection fantasmatique de l’arrivée à Lampedusa se joue bien plus qu’un soulagement pour les migrants : la fiction tient dans « cette qualité d’attention portée à ce que l’on tint longtemps pour insignifiant, ces silhouettes d’ombre qui apparaissent ponctuellement dans le récit, et disparaissent aussitôt, mais qui en forment peut-être le plus profond : une image sensible de l’humanité59 ».

1 Voir Alain Montandon, « Sociopoétique », Sociopoétiques, n° 1, 2016, [En ligne] DOI : https://dx.doi.org/10.52497/sociopoetiques.640.

2 Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit [Paris, éditions Guérin, 2014], Paris, Éditions de la Loupe, 2016, p. 98.

3 Mohamed Mbougar Sarr, Silence du chœur, Paris, Présence africaine, 2017.

4 Annelise Heurtier, Refuges, Paris, Casterman, 2015.

5 Maryline Desbiolles, Lampedusa, Paris, L’école des loisirs, 2012.

6 Marielle Macé, Sidérer, considérer, Migrants en France, 2017, Lagrasse, Verdier, « La petite jaune », 2017.

7 Monique Lebrun et Luc Collès, La Littérature migrante dans l’espace francophone : Belgique, France, Québec, Suisse, Fernelmont, InterCommunications

8 Anne Schneider, La Littérature de jeunesse migrante. Récits d’immigration de l’Algérie à la France, Paris, L’Harmattan, « Espaces littéraires »

9 Nancy Huston et Leïla Sebbar, Lettres parisiennes. Autopsie de l’exil, Paris, Bernard Barrault, 1986. L’expression « Autopsie de l’exil » figure

10 Alain Vircondelet, La Traversée, Paris, Éditions First, 2012.

11 Concept défini par Anne Schneider, La Littérature de jeunesse migrante. Récits d’immigration de l’Algérie à la France, op. cit., p. 68.

12 Ana Isabel Labra Cenitagoya, « Fuir le monde pour mieux le cerner. Le traitement utopique du thème des réfugiés dans la narration contemporaine en

13 Voir l’introduction de Catherine Mazauric à son ouvrage Mobilités d’Afrique en Europe. Récits et figures de l’aventure, Paris, Karthala, « Lettres

14 Sur ce changement d’appellation entre « littérature migrante » et « littérature de la migration », voir Anne Schneider, « Les écritures de la

15 Ana Isabel Labra Cenitagoya, « Fuir le monde pour mieux le cerner. Le traitement utopique du thème des réfugiés dans la narration contemporaine en

16 Catherine Mazauric, Mobilités d’Afrique en Europe. Récits et figures de l’aventure, op. cit., p. 25.

17 Voir Anne Schneider, « L’autobiographie, effraction de la parole du migrant », op. cit., p. 153-163.

18 Catherine Mazauric consacre une partie à cette question de la traversée, comme l’indique son chapitre « Traversées », in Mobilités d’Afrique en

19 Azouz Bégag et Mamadou Sow, Né pour partir. Récit de Mamadou, migrant mineur de Guinée, Toulouse, Éditions Milan, 2023.

20 Marie-Odile Laîné, Rien de ce qui est humain ne m’est étranger, Mondeville, La sauce aux arts, 2019.

21 Marie-Odile Laîné, Rien de ce qui est humain ne m’est étranger, Hommes et migrations, no 1339, 2022, p. 196-197 [En ligne] DOI : https://doi.org/10

22 Pour une différenciation des corpus, voir Anne Schneider, « Les écritures de la migration : un changement de paradigme ? De la subjectivation à l’

23 Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit, op. cit., p. 11-12.

24 Ibid., p. 90.

25 Maryline Desbiolles, Lampedusa, op. cit., p. 62.

26 Ibid, p. 74.

27 Annelise Heurtier, Refuges, Bruxelles, Casterman, 2015, p. 219.

28 Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit, op. cit., p. 50.

29 Ibid, p. 52.

30 Ibid., p. 59.

31 Dominique Viart, « Un art anthropologique de la description. Les personnages secondaires chez Maylis de Kerangal », Études françaises, vol. 57, no 

32 Ibid., p. 48.

33 Ibid., p. 50.

34 Ibid., p. 57.

35 Jacques Derrida, Spectres de Marx [Éditions Galilée, 1993], Paris, Seuil, 2024.

36 Maryline Desbiolles, Lampedusa, op. cit., p. 27.

37 Ibid., p. 17.

38 Dominique Viart, « Un art anthropologique de la description. Les personnages secondaires chez Maylis de Kerangal », art. cit., p. 50.

39 Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit, op. cit., p. 37.

40 Ibid., p. 81.

41 Ibid., p. 37.

42 Ibid., p. 82.

43 Ibid.

44 Ibid., p. 98.

45 Ibid.

46 Anne Schneider, « Circulations et reconfigurations des imaginaires dans la littérature de jeunesse française et francophone : De la guerre d’

47 Mohamed Mbougar Sarr, Silence du chœur, op. cit., p. 114.

48 Ibid., p. 378.

49 Maryline Desbiolles, Lampedusa, op. cit., p. 29.

50 Mohamed Mbougar Sarr, Silence du chœur, op. cit., p. 115.

51 Michel Collot, La Pensée-paysage. Philosophie, arts, littérature, Arles, Actes Sud/ENSP, « Paysage », 2011.

52 Anne Schneider, inédit de l’HDR, op. cit.

53 Annelise Heurtier, Refuges, op. cit., p. 134.

54 Ibid., p. 132.

55 Maryline Desbiolles, Lampedusa, op. cit., p. 78.

56 Dominique Viart, « Un art anthropologique de la description. Les personnages secondaires chez Maylis de Kerangal », art. cit., p. 49.

57 Ibid., p. 50.

58 Ibid., p. 52.

59 Ibid.

Notes

1 Voir Alain Montandon, « Sociopoétique », Sociopoétiques, n° 1, 2016, [En ligne] DOI : https://dx.doi.org/10.52497/sociopoetiques.640.

2 Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit [Paris, éditions Guérin, 2014], Paris, Éditions de la Loupe, 2016, p. 98.

3 Mohamed Mbougar Sarr, Silence du chœur, Paris, Présence africaine, 2017.

4 Annelise Heurtier, Refuges, Paris, Casterman, 2015.

5 Maryline Desbiolles, Lampedusa, Paris, L’école des loisirs, 2012.

6 Marielle Macé, Sidérer, considérer, Migrants en France, 2017, Lagrasse, Verdier, « La petite jaune », 2017.

7 Monique Lebrun et Luc Collès, La Littérature migrante dans l’espace francophone : Belgique, France, Québec, Suisse, Fernelmont, InterCommunications & E.M.E., « Proximités-didactique », 2007.

8 Anne Schneider, La Littérature de jeunesse migrante. Récits d’immigration de l’Algérie à la France, Paris, L’Harmattan, « Espaces littéraires », 2013.

9 Nancy Huston et Leïla Sebbar, Lettres parisiennes. Autopsie de l’exil, Paris, Bernard Barrault, 1986. L’expression « Autopsie de l’exil » figure aussi sur la page de garde de l’édition « J’ai Lu ».

10 Alain Vircondelet, La Traversée, Paris, Éditions First, 2012.

11 Concept défini par Anne Schneider, La Littérature de jeunesse migrante. Récits d’immigration de l’Algérie à la France, op. cit., p. 68.

12 Ana Isabel Labra Cenitagoya, « Fuir le monde pour mieux le cerner. Le traitement utopique du thème des réfugiés dans la narration contemporaine en langue française » in Écritures contemporaines de la migration. Frontières, passages, errances, tragiques, Anne Schneider, Magali Jeannin, Yann Calvet, Marie Cléren (dir.), Lausanne, Peter Lang, 2023, p. 122.

13 Voir l’introduction de Catherine Mazauric à son ouvrage Mobilités d’Afrique en Europe. Récits et figures de l’aventure, Paris, Karthala, « Lettres du Sud », 2012, p. 25.

14 Sur ce changement d’appellation entre « littérature migrante » et « littérature de la migration », voir Anne Schneider, « Les écritures de la migration : un changement de paradigme ? De la subjectivation à l’objectivation » in Accompagner la migration, des représentations à l’action, Virginie Brinker, Pauline Franchini, Caroline Raulet-Marcel, Anne Schneider (dir.), Paris, Éditions in Press, « Psychologie/hospitalité(s) », 2025.

15 Ana Isabel Labra Cenitagoya, « Fuir le monde pour mieux le cerner. Le traitement utopique du thème des réfugiés dans la narration contemporaine en langue française » in Écritures contemporaines de la migration. Frontières, passages, errances, tragiques, op. cit., p. 122. L’autrice souligne l’expression par les italiques.

16 Catherine Mazauric, Mobilités d’Afrique en Europe. Récits et figures de l’aventure, op. cit., p. 25.

17 Voir Anne Schneider, « L’autobiographie, effraction de la parole du migrant », op. cit., p. 153-163.

18 Catherine Mazauric consacre une partie à cette question de la traversée, comme l’indique son chapitre « Traversées », in Mobilités d’Afrique en Europe. Récits et figures de l’aventure, op. cit., p. 149-203.

19 Azouz Bégag et Mamadou Sow, Né pour partir. Récit de Mamadou, migrant mineur de Guinée, Toulouse, Éditions Milan, 2023.

20 Marie-Odile Laîné, Rien de ce qui est humain ne m’est étranger, Mondeville, La sauce aux arts, 2019.

21 Marie-Odile Laîné, Rien de ce qui est humain ne m’est étranger, Hommes et migrations, no 1339, 2022, p. 196-197 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/hommesmigrations.14684.

22 Pour une différenciation des corpus, voir Anne Schneider, « Les écritures de la migration : un changement de paradigme ? De la subjectivation à l’objectivation », in Accompagner la migration, des représentations à l’action, op. cit.

23 Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit, op. cit., p. 11-12.

24 Ibid., p. 90.

25 Maryline Desbiolles, Lampedusa, op. cit., p. 62.

26 Ibid, p. 74.

27 Annelise Heurtier, Refuges, Bruxelles, Casterman, 2015, p. 219.

28 Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit, op. cit., p. 50.

29 Ibid, p. 52.

30 Ibid., p. 59.

31 Dominique Viart, « Un art anthropologique de la description. Les personnages secondaires chez Maylis de Kerangal », Études françaises, vol. 57, no 3, 2021, p. 47 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.7202/1086997ar.

32 Ibid., p. 48.

33 Ibid., p. 50.

34 Ibid., p. 57.

35 Jacques Derrida, Spectres de Marx [Éditions Galilée, 1993], Paris, Seuil, 2024.

36 Maryline Desbiolles, Lampedusa, op. cit., p. 27.

37 Ibid., p. 17.

38 Dominique Viart, « Un art anthropologique de la description. Les personnages secondaires chez Maylis de Kerangal », art. cit., p. 50.

39 Maylis de Kerangal, À ce stade de la nuit, op. cit., p. 37.

40 Ibid., p. 81.

41 Ibid., p. 37.

42 Ibid., p. 82.

43 Ibid.

44 Ibid., p. 98.

45 Ibid.

46 Anne Schneider, « Circulations et reconfigurations des imaginaires dans la littérature de jeunesse française et francophone : De la guerre d’Algérie aux récits de la migration contemporaine », chapitre : « Des lieux-rencontres à Lampedusa : des hyper-lieux de la migration », inédit de l’HDR soutenue le 17 juin 2021, Paris, Sorbonne Nouvelle.

47 Mohamed Mbougar Sarr, Silence du chœur, op. cit., p. 114.

48 Ibid., p. 378.

49 Maryline Desbiolles, Lampedusa, op. cit., p. 29.

50 Mohamed Mbougar Sarr, Silence du chœur, op. cit., p. 115.

51 Michel Collot, La Pensée-paysage. Philosophie, arts, littérature, Arles, Actes Sud/ENSP, « Paysage », 2011.

52 Anne Schneider, inédit de l’HDR, op. cit.

53 Annelise Heurtier, Refuges, op. cit., p. 134.

54 Ibid., p. 132.

55 Maryline Desbiolles, Lampedusa, op. cit., p. 78.

56 Dominique Viart, « Un art anthropologique de la description. Les personnages secondaires chez Maylis de Kerangal », art. cit., p. 49.

57 Ibid., p. 50.

58 Ibid., p. 52.

59 Ibid.

Citer cet article

Référence électronique

Anne SCHNEIDER, « Sociopoétique de l’arrivée. Lampedusa comme variation autour d’un nom », Sociopoétiques [En ligne], 10 | 2025, mis en ligne le 07 novembre 2025, consulté le 17 décembre 2025. URL : http://revues-msh.uca.fr/sociopoetiques/index.php?id=2449

Auteur

Anne SCHNEIDER

Université de Caen Normandie

Autres ressources du même auteur

Droits d'auteur

Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)