À son retour de Cuba, Manuel reconnaît à peine sa terre natale, Haïti. Le paradis vert que le jeune adulte avait quitté il n’y a que quinze ans s’est transformé en champs bruns et érodés. Les maigres récoltes se flétrissent sous le soleil brûlant, tandis qu’une insatiable soif de vengeance divise la communauté agricole locale en deux camps ennemis. « Nous mourrons tous : les bêtes, les plantes, les chrétiens vivants1 », se lamente sa mère Délira en plongeant les mains dans la poussière qui menace non seulement la vie, mais aussi la survie et la solidarité des femmes de Fonds-Rouge. Dès que son fils surmonte le choc initial, c’est lui qui lui enseigne : « [L]a terre, c’est […] une bataille sans repos […]. Mais la terre est comme une bonne femme, à force de la maltraiter, elle se révolte2. » Ainsi Gouverneurs de la rosée, chef-d’œuvre publié en 1944 de Jacques Roumain, auteur haïtien, pose à peu près les trois mêmes questions entrelacées qui nous préoccupent en tant que chercheurs féministes d’aujourd’hui face à la chaîne de catastrophes en train de s’accélérer de manière de plus en plus inquiétante : quelles sont les normes que l’on exige d’une soi-disant bonne femme ? Comment se comportent-elles face aux catastrophes ? Pourquoi est-ce l’homme, et non la femme, qui prend la parole pour prononcer de beaux discours sur la manière de sauver la terre ? Délira, visiblement irritée par l’attitude de « je-sais-tout » que son fils adopte, lui donne une réponse fougueuse : « Ne me tourmente pas, maudit. […] La misère, je la connais […]. Tout mon corps me fait mal, tout mon corps accouche la misère3. »
« Une affaire de femmes » : dessiner les grandes lignes de la recherche féministe
De nombreux exemples, tant passés que récents, montrent que les femmes sont affectées différemment des hommes par les catastrophes, tant sur le plan physique, avec les tremblements au sens propre, que sur le plan symbolique, à travers leurs répercussions au sens figuré4 : au Sri Lanka, en 2004, quatre fois plus de femmes que d’hommes ont été tuées par un tsunami5, tandis qu’à Gujarat, à l’ouest de l’Inde frappée par un grave tremblement de terre en 2001, des lotissements entiers sont reconstruits sans cuisine. « C’est une affaire de femmes6 », explique Maureen Fordham, professeure associée spécialisée dans la réduction des risques et des catastrophes, en émettant des hypothèses sur les raisons pour lesquelles on semble s’être si peu préoccupé de savoir d’où venait, chaque soir, le dîner chaud. Elle suggère que cette question était probablement perçue comme trop banale pour les hommes, qui avaient vingt réponses toutes prêtes. Ces réponses, collectées par Ronald Perry et Enrico Quarantelli, font écho à la question fondamentale, mais controversée, What is a Disaster? (2015), et sont entièrement rédigées par des sociologues hommes, qui voyaient rarement la nécessité d’interroger leurs collègues féminines sur leur domaine de recherche commun. « Ma grand-mère disait toujours…7 », rappelle Yvonne Clark, directrice générale de la Croix-Rouge jamaïcaine, en soulignant le rôle central que les femmes jouent en situation d’urgence, souvent derrière des portes closes, mais rarement sur la scène de la gestion institutionnelle des catastrophes, où leurs voix restent inaudibles. « For my grandfather had learnt/from his father and his father before him/all the ways of orchestrating disaster8 », poursuit Olive Senior, poétesse jamaïcaine, à l’occasion du terrible cyclone qui, le 11 août 1903, traverse la Martinique, la Jamaïque et les îles Caïmans.
Face à ce constat, depuis la fin des années 1990, la sociologie féministe a entrepris d’explorer les implications de la notion de Gendered Terrain of Disaster (19989) forgée par Elaine Enarson et Betty Hearn Morrow. Du Bangladesh à l’Écosse, les différentes études de cas qu’elles analysent « à travers les yeux des femmes » documentent les multiples raisons pour lesquelles les catastrophes ont un impact spécifique sur les femmes. Parmi les causes de ce constat, une culture du corps souvent soulignée, qui peut amener les femmes à courir moins vite que les hommes ; une répartition des rôles sociaux selon laquelle dans certaines cultures l’enseignement de la natation n’est pas destiné aux filles ; ainsi qu’un accès inégal aux ressources sociales, qui, dans certains contextes, interdit aux femmes de sortir de chez elles sans être accompagnées d’un homme10. Dès lors, la question « Qu’est-ce que le genre a à voir avec cela11 ? » s’impose avec une acuité croissante. Toutefois, il convient de reconnaître que cette interrogation est rarement abordée dans une perspective véritablement autocritique, susceptible de remettre en question les présupposés, les prémisses et les hypothèses des analyses en cours. Une telle approche pourrait pourtant renforcer leur solidité argumentative, favoriser leur évolution conceptuelle, et anticiper les objections critiques. À l’inverse, il est désormais établi, comme le souligne le titre explicite d’une étude commandée par la Banque mondiale en 2021 – Gender Dimensions of Disaster Risk and Resilience, que les femmes sont quatorze fois plus nombreuses que les hommes à mourir (des suites) de catastrophes12. Cette étude met en lumière l’impact potentiellement décisif de facteurs en apparence anodins, tels que le type de vêtement porté (jupe, pantalon, sari, etc.), dans les situations de crise. Elle insiste également sur l’importance de considérer des facteurs sociaux tels que la répartition des rôles dans les soins aux enfants, l’accès à la mobilité (qui conduit le véhicule), les conditions d’habitat (sous un toit précaire ou dans un logement sécurisé), ou encore les environnements professionnels (bureau climatisé versus travail en extérieur), autant de variables qui influencent de manière significative la vulnérabilité face aux désastres.
Dans ce cadre, les recherches situées à l’interface entre production scientifique et engagement militant s’inscrivent dans une dynamique à la fois pragmatique et utopique, orientée vers la recherche de solutions concrètes, mais surtout vers l’action. Cette orientation témoigne d’une volonté explicite de promouvoir une sociologie engagée, capable de répondre aux enjeux contemporains en mobilisant les savoirs au service de la transformation sociale.
« Par nos recherches, par notre travail professionnel autant que communautaire et par notre activisme, notre objectif est de […] rendre les communautés plus sûres et plus humaines – pour tout le monde13. » C’est ainsi que Betty Hearn Morrow et Elaine Phillips reprennent les trois lignes directrices de la recherche féministe sur les catastrophes forgées à la (pour)suite du Gendered Terrain of Disaster. Effectivement, s’attaquer aux racines politiques, sociales et culturelles de la vulnérabilité accrue des femmes en cas de catastrophe veut (1) dire remettre en cause les structures héritées du passé qui assurent les privilèges masculins en (2) allant à la rencontre des femmes. Ces dernières, face aux catastrophes, font preuve de stratégies de prévention et de gestion qui, dans un monde où les tempêtes, les tsunamis et les sécheresses seront bientôt à l’ordre du jour, peuvent, au-delà du contexte familial dans lequel elles ont été développées, servir de modèle. L’objectif principal de cette démarche est pour cela (3) de faire entendre des voix féminines fortes, non pas en les représentant, mais en les associant directement, dans les débats portant sur la gestion des éruptions volcaniques, des cyclones et des inondations.
Il s’agit de s’opposer avec rigueur au mansplaining exercé par les institutions de recherche et de gestion des catastrophes, en lisant autrement dit les chiffres à contre-courant. Ces derniers, enregistrant les nombres des morts féminins, les montants des dommages des femmes et le bilan des dégâts qu’elles subissent, cantonnent les femmes à une posture de victime. Dans The Gendered Terrain of Disaster, Elaine Enarson et Betty Hearn Morrow – de même que de nombreux autres héritiers de leurs recherches – rendent visibles les fonctions clés des femmes avant, pendant et après des catastrophes telles des éruptions volcaniques, des cyclones ou des tremblements de terre, qui tracent un sillon de dévastation dans des paysages textuels, sociaux et culturels. C’est précisément en raison des facteurs qui les rendent particulièrement vulnérables que les femmes occupent une position centrale dans l’acquisition, la gestion et la transmission des savoirs liés aux catastrophes. Cette position initiale les place en tant que chercheuses, gestionnaires et auteures légitimes et pertinentes dans les contextes de crise.
Repenser les femmes – trop souvent perçues comme des « victimes » impuissantes des catastrophes14 – en tant qu’« agents de changement15 » dans ce contexte nécessite, comme nous en avons pris conscience ces dernières années, une relecture critique de la notion de « vulnérabilité ». Cette relecture s’oppose d’abord à l’idée commune selon laquelle la vulnérabilité serait l’antonyme de la « résistance ». Comme le soulignent Judith Butler, Zeynep Gambetti et Leticia Sabsay dans Vulnerability in Resistance (2016), « la vulnérabilité et la résistance ont souvent été vues comme des opposés, avec l’idée que la vulnérabilité nécessite une protection et le renforcement d’un pouvoir paternaliste, au détriment de la résistance collective16. » Ces auteures n’hésitent pas à remettre en question cette dualité, notamment dans le contexte incertain qu’a révélé la pandémie de Covid-19. Elles y perçoivent néanmoins une occasion unique de reconceptualiser la vulnérabilité, en la transformant d’un « lieu d’inaction17 » en un « véritable sens de l’action18. » Selon elles, il ne s’agit pas seulement de reconnaître que la vulnérabilité peut être un moteur d’action, mais aussi de comprendre que l’exposition, plus ou moins volontaire, au risque peut parfois constituer un mode actif de résistance. Reste à savoir si ces réflexions, qui portent sur des contextes de violence étatique, de militantisme anti-guerre et de politique anti-austérité, engendreront également des changements face à la « guerre suicidaire contre la nature19 », contre laquelle António Guterres, Secrétaire général des Nations unies, met en garde.
« Sa mise à nu forcée » : regarder la Catastrophe en sa face féminine
Les effets du tremblement de terre dévastateur qui a réduit la capitale haïtienne Port-au-Prince en cendres le 12 janvier 2010 sont bien connus, ses répliques sismiques – au sens littéral autant que figuré – se font ressentir même encore aujourd’hui. La terre haïtienne est souvent envisagée dans ce pays comme « tè glise20 », mais le terrain a rarement été aussi incertain qu’à 16 h 53, heure locale, pendant les 90 secondes qui ont suffi à provoquer la mort de 300 000 personnes, autant de blessés graves, quand près de 1,5 million d’habitants ont perdu leur maison. De nombreux hauts fonctionnaires du pays furent ensevelis sous les décombres des bâtiments gouvernementaux. Depuis, la situation politique du pays n’a pas pu se stabiliser, tant s’en faut. Dans son journal Failles (2010) qui se présente comme une longue médiation sur l’impossibilité de trouver une forme pour dire le séisme outre celle de la métaphore d’un corps féminin violé, Yanick Lahens, écrivaine haïtienne, nous rend témoins de la violence, de la misère et de l’ignominie du désastre :
Le 12 janvier 2010 à 16 heures 53 minutes, dans un crépuscule qui cherchait déjà ses couleurs de fin et de commencement, Port-au-Prince a été chevauchée moins de quarante secondes par un de ces dieux dont on dit qu’ils se repaissent de chair et de sang. Chevauchée sauvagement avant de s’écrouler cheveux hirsutes, yeux révulsés, jambes disloquées, sexe béant, exhibant ses entrailles de ferraille et de poussière, ses viscères et son sang. Livrée, déshabillée, nue, Port-au-Prince n’était pourtant point obscène. Ce qui le fut, c’est sa mise à nu forcée. Ce qui fut obscène et le demeure, c’est le scandale de sa pauvreté21.
L’une des images les plus connues du séisme est celle des traits apathiques d’une jeune femme retirée des ruines de sa maison au lendemain de la catastrophe. La photo que Jean Morel prend pour ensuite la poster sur Twitter est, dans les jours qui suivent le séisme, relayée, copiée et partagée par de nombreuses agences de presse internationales – jusqu’à ce jour de novembre 2013, lourd de conséquences, où Jean Morel fait valoir ses droits patrimoniaux devant la justice. Les dommages et intérêts qui lui seront versés s’élèveront probablement à des centaines de millions d’euros. Le succès fulgurant de cette photo est d’une part sans doute dû à son accessibilité. Du fait que l’infrastructure haïtienne, gravement endommagée par le séisme, est surchargée de convois d’aide, de personnes en fuite et de manifestations de solidarité, il est tout simplement moins cher et plus rapide de reprendre la photo d’un photographe haïtien établi que d’envoyer des journalistes en Haïti. D’autre part, sa portée mondiale tient aussi également au langage visuel de la photo nous confrontant avec une femme qui nous regarde droit dans les yeux contrairement à de nombreux autres exemples dont les vues passent juste devant la caméra. « Chaque catastrophe a son image. Chaque drame a son visage22 », constate Christian Rappaz, journaliste suisse, qui parvient à retrouver cette femme – disparue dans le chaos post-sismique peu après que Jean Morel prit sa photo – aux alentours de Port-au-Prince dans l’un des nombreux camps d’hébergement d’urgence où elle s’est entre-temps mise à vendre son corps pour assurer sa survie et celle de son fils. Par la suite, le visage de la Titit Calixte prostituée devient l’icône de la catastrophe survenue :
En Haïti, ce fut celui de cette jeune femme groggy, de ce visage qui apparut en première page d’une trentaine de quotidiens du monde entier le 14 janvier. Il symbolisait l’hébétude totale d’une population anéantie par l’ampleur d’une catastrophe effroyable. […] Nous avons pu nous-mêmes retrouver cette femme. Et lui rendre son nom. Elle s’appelle Titit Calixte. […] Elle ne savait rien de son destin d’icône mondialisée. Titi se prostitue pour survivre et nourrir son fils23.
En effet, aussi désagréable que cela puisse paraître, il faut l’admettre : l’aide humanitaire est aussi ou même avant tout un « média régime24 » et peu de choses génèrent autant de fonds que le regard désespéré des femmes qui peuvent à peine nourrir le bébé maigre qu’elles portent dans leurs bras. « La plus grande catastrophe, c’est l’oubli », les deux principales associations allemandes de bienfaisance à gestion ecclésiastique – la Diakonie et la Caritas – luttent contre l’indifférence face aux catastrophes en mettant en avant chaque année une situation désastreuse qui suscite peu d’attention de la part du public et des médias, que ce soit celle de la famine d’Afrique de l’Est, de la guerre en Syrie ou de la fuite de Somalie. Mais tandis que la peur des femmes affamées, assoiffées et horrifiées est omniprésente sur les affiches de ces associations, pour illustrer leurs projets internationaux d’aide aux victimes de catastrophes, les vies de ces femmes semblent marginalisées et cantonnées à de brèves formulations, au nom de tous les hommes, femmes et enfants dont le quotidien est menacé par la catastrophe. Cela soulève la question d’une distinction à ne pas oublier : celle entre la Catastrophe écrite avec un grand C et les catastrophes au pluriel pour s’inspirer de la distinction qu’Édouard Glissant, philosophe martiniquais, établit entre l’Histoire avec grand H et les histoires au pluriel, c’est-à-dire entre les récits officiels européens et les multiples versions des événements produites par la mémoire locale25.
Mettre le doigt dans cette plaie, ce n’est pas couper la parole à l’aide humanitaire. Il s’agit au contraire de nous engager – dans le droit fil de la réflexion que suscitent les affiches des associations Diakonie et Caritas – de relever le défi de contrarier, c’est-à-dire de lire à contre-courant pour contredire les structures certes sociales, mais tout aussi discursives qui font taire les femmes face aux désastres : les yeux remplis de peur, les bouches contractées par la douleur, les voix enrouées par des cris de frayeur, semblables à celles des sœurs fatidiques, non pas paralysées par la terreur, mais plutôt par l’appareil photo, avec lequel ces associations nous invitent à examiner cette réalité de plus près. Il serait sans doute mégalomane d’affirmer que de cette manière on allégerait les détresses concrètes, urgentes, terribles de femmes qui, comme Titit Calixte, ont perdu leurs biens et leurs proches dans la catastrophe. Tout ce que l’on peut faire, c’est montrer leurs autres visages – ceux des femmes autant que ceux des catastrophes – pour rendre possible d’autres scénarios plus nuancés que ceux préconçus sur les femmes : women-as-vulnerable, women-as-caregivers, women-as-knowledgeable, women-as-agents, sur lesquels Nicole Detraz s’est récemment penchée avec son étude approfondie des liens entre femmes et changements climatiques (Women and Climate Change). « [R]epresentation matters », constate-t-elle :
The roles and identities assigned to people crucially shape expectations about who should be present in climate change spaces, who is a legitimate voice in those spaces, what jobs and tasks we should assign, and who we should look to for insight about existing problems and paths forward26.
« [De véritables] ragots » : lire la littérature de désastre d’un point de vue féministe
À l’égard des champs de mines de la représentation sexuée des catastrophes, de nombreuses approches féministes reconnaissent que pour poser des questions de genre en contexte de catastrophe, il importe de poser un regard critique autant qu’autocritique sur une dramaturgie de catastrophe dans laquelle « souffrance et perte27 » sont codées au féminin, dépendantes de la bonne volonté d’une foule de super-héros masculins dont les bras puissants promettent le salut là où l’apocalypse semble scellée. Sherilyn MacGregor, chercheuse américaine en politique environnementale, observe :
One can Google the phrase « climate victim » and find a wealth of images of women in saris standing hip-deep in flood waters. […] A Google search of « resilience » yields images of super-heroes and men in suits […]. [Thus,] white-Western-male geoengineers are celebrated as modern-day Baconian Supermen who can harness the powers of techno-science to control the very weather28.
De nombreux projets de recherche abordent la thèse selon laquelle les stéréotypes de genre véhiculés lors de la représentation des catastrophes contribuent à renforcer les inégalités entre les sexes. Cependant, une analyse plus approfondie des études de cas choisies montre que, souvent, le retour aux rôles de genre traditionnels qui s’opère après ces catastrophes ne fait que se superposer aux images sexuées dans lesquelles l’événement est mis en mots. Ainsi, Susanna M. Hoffman, anthropologue spécialisée dans le domaine des Disaster Studies, s’inspire de ses propres expériences vécues lors de la tempête de feu d’Oakland (Californie, 1991), pour interroger deux aspects : d’une part, les stratégies d’adaptation mises en place après la catastrophe, notamment les politiques de gestion des catastrophes qui renvoient les femmes vers des rôles domestiques traditionnels29, et d’autre part, la manière dont l’événement est surmonté psychiquement à travers une rhétorique qui, dans le but de rendre l’indicible plus accessible, tend à sexualiser l’expérience30 sans pour autant interroger comment cette sexualisation pourrait renforcer les rôles de genre traditionnels – et inversement.
Tant que les représentations visuelles accompagnant les études féministes continueront à figurer des femmes voilées marchant pieds nus dans des paysages désertiques, les efforts visant à déconstruire les structures dénoncées par ces recherches risquent de demeurer de simples intentions louables, sans portée transformative réelle.
À l’instar de l’ouvrage Women and Climate Change (2023) de Nicole Detraz, les essais qui dépassent la simple présentation de données statistiques pour s’intéresser aux récits eux-mêmes demeurent rares. Ces travaux analysent les narrations à travers lesquelles la recherche, dans sa volonté de “décrire” et de “comprendre” la sexuation des catastrophes naturelles31, attribue aux femmes des caractéristiques, des rôles et des attentes spécifiques – souvent de manière inconsciente, voire involontaire. « Si nous voyons ou entendons les femmes discuter comme des victimes », nous avertit Nicole Detraz, « il nous sera difficile de les imaginer dans des espaces de négociation mondiaux, des conférences en sciences atmosphériques, ou dans des réunions de direction des organisations de lutte contre le changement climatique32. » La littérature (en tant qu’objet de recherche) et les Lettres (en tant que discipline de recherche) peuvent intervenir à deux niveaux :
- Gender Data Gap : Vu qu’il manque une base de données solide pour saisir les impacts que les désastres ont sur la vie des femmes, lire la littérature de désastre d’un point de vue féministe veut dire l’appréhender comme médium de documentation, comme plateforme de critique et comme proving ground en envisageant d’autres stratégies de prévention, de vécu et de gestion des catastrophes.
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Masculinist tone : Comme la recherche est largement dominée par une voix machiste, qui déduit des résultats du peu de statistiques approfondies existantes sans s’interroger sur les structures imprégnées d’histoire faisant des catastrophes des événements sexués, lire la littérature de désastre d’un point de vue féministe veut dire s’opposer au malestream pour mieux comprendre le contexte social qui transforme des événements en catastrophes.
Renforcer la place de la littérature dans les études sur les catastrophes implique, entre autres, un retour aux fondements épistémologiques, aux sources premières, ainsi qu’aux méthodes et instruments mobilisés par les Disaster Studies. Comme le montre Deborah R. Coen (2013) à travers l’exemple de la sismologie, jusqu’au xxe siècle, ces disciplines s’appuyaient largement sur des récits de témoins oculaires publiés dans la presse, laquelle n’hésitait pas à médiatiser ces témoignages de manière spectaculaire afin de stimuler les ventes. « La véritable observation des phénomènes sismiques est encore à venir. […] L’essentiel des récits sur les tremblements de terre consiste en fait en des ragots33 […] », se lamentait le géologue Robert Mallet dans son essai sur Les principes premiers de la sismologie d’observation (First Principles of Observational Seismology) en 1857. Quatre-vingts ans plus tard, l’invention de l’échelle de magnitude de Richter semble enfin réaliser sa prophétie. En 1935, Charles Francis Richter inaugure une nouvelle ère de la sismologie en introduisant le sismogramme, un outil permettant de quantifier l’énergie libérée par un séisme et d’évaluer ainsi les dommages causés. Les récits de catastrophes autrefois largement portés par des femmes – nombreuses parmi les principales contributrices des felt reports34 – tendent aujourd’hui à être éclipsés par des représentations quantitatives : chiffres, données, diagrammes et faits, qui distinguent les micro-séismes (<2) des événements cataclysmiques à l’échelle mondiale (≥10). À l’aube de ce qui pourrait constituer l’apogée prolongée de l’ère des catastrophes, les données chiffrées – bien qu’efficaces pour nourrir une rhétorique guerrière – peinent à susciter une mobilisation individuelle suffisante en faveur de changements radicaux de modes de vie, pourtant nécessaires pour prévenir une catastrophe climatique imminente, souvent abordée dans l’urgence. Comme le constate Susan Scott Parrish, professeure américaine en histoire culturelle :
[W]e need media that can linger long enough to trace indirect, slow or structural causes and effects; that can turn the invisible into a sensed or credited reality; that can describe the outer world of matter and how it interacts with inner world of thought and emotion and bodily response; that can be flexible enough to host a variety of knowledge modes and a multilogue of witnesses, including typically obscured witnesses; that can acknowledge the powers of both human and nonhuman actors in producing or alleviating danger; that refuses to foreclose these complex detective and deliberative processes for the sake of quick and flimsy social « repair »; that can draw out the shortening span of human attention; and thus, finally, can produce a healthy « disaster citizenship35. »
Au regard de l’histoire des disciplines qui composent les Disaster Studies, le renouveau du récit apparaît comme un levier puissant pour interroger les enjeux de genre soulevés par les catastrophes. Il ne s’agit pas uniquement de rendre audibles les voix des femmes en tant qu’expertes en prévention et en gestion des crises – un rôle qu’elles ont toujours assumé –, mais également, et peut-être surtout, de promouvoir une démarche autocritique vis-à-vis des « sens communs36 » et des présupposés que même la recherche féministe peine à déconstruire face à l’événement catastrophique. Cette démarche ne vise pas à invalider la recherche, mais à s’inspirer des réflexions autour du « savoir situé37 » pour remettre en question les fondements de la prétendue neutralité scientifique, et ainsi envisager l’objectivité comme une construction sociale et un vecteur de pouvoir. Autrement dit, pour les études littéraires, il ne suffit pas d’ajouter des œuvres de femmes sur les catastrophes aux corpus existants : il s’agit d’activer le potentiel subversif de la littérature, capable de reconfigurer des cadres interprétatifs figés, afin d’imaginer, expérimenter et ouvrir de nouveaux espaces d’action pour les femmes, face à la catastrophe – qu’elle soit réelle ou fictionnelle.
« Dialoguer avec les sans-voix » : faire le bilan des approches féministes de la littérature contemporaine
Dans Walking on Fire (2001), Beverly Bell – fondatrice du Center for Economic Justice, basé à Albuquerque (Nouveau-Mexique) – se consacre aux récits de survie et de résistance des femmes haïtiennes. Elle mobilise les fondements, les méthodes et les intentions de l’histoire orale (oral history) afin de donner la parole à celles que l’on considère comme “doublement touchées”, selon l’expression utilisée dans une étude menée pour Amnesty International (2011) sur les risques de violences sexuelles dans les camps de déplacés après le séisme dévastateur du 12 janvier 2010. Ces femmes sont affectées non seulement par les secousses du désastre initial, mais également par ses « répliques humanitaires38 », et plus largement par une Histoire dans laquelle leurs trajectoires demeurent invisibilisées.
« Les femmes haïtiennes […] sont absentes en tant que témoins tout aussi qu’en tant qu’actrices de l’histoire. […] Au mieux, les femmes sont dépeintes de manière périphérique, comme des victimes impuissantes ou du folklore exotique39 ». Beverly Bell, assise sous les manguiers féconds de Mòn Pitimi, s’en rend compte, quand Josie, Nana, Micheline, Dieusil, Rosianne et Maude se mettent à raconter leurs histoires, les yeux rivés sur le feu de cuisson. Pour elle, cette anecdote livrée tout au début de Walking on Fire, est l’occasion de partir à la recherche d’autres lieux et d’autres formes de récits où se font entendre sous forme de cacophonie des voix narratives, des bruits ambiants, les histoires personnelles des narratrices et l’Histoire de leur pays natal. Récits et recherche se conjuguent allègrement :
All interviews were open-ended and unstructured so as not to skew the outcome. […] We worked together, correcting what I had misheard; adding what she had forgotten the first time; deleting what she realized, in retrospect, was dangerous to print. […] None of the terms that normally characterize narratives of this sort – story, oral history, life history, ethnography, testimony – accurately reflect the nature of what [wa]s told here. […] The best description of these narratives is the Creole word istwa, meaning both story and history40.
En fin de compte, l’ouvrage Walking on Fire, qui cherche à mettre en lumière les exploits, les luttes et les héritages des femmes dans l’histoire haïtienne, révèle certes la violence brute inhérente aux systèmes de domination, mais témoigne avant tout des efforts d’une chercheuse activiste qui, pour nommer l’abus, le viol et l’avilissement, s’aventure sur des terrains inexplorés – non pas pour les femmes qui ont subi ces violences, mais avec elles : « Le message haïtien est l’opposé de celui de la pitié, du type “lisez et pleurez”. Les témoignages des femmes nous enjoignent plutôt à “lire et agir”41. »
Toutefois, il ne suffit pas d’ajouter simplement des œuvres de la littérature de catastrophe écrites par des auteures concernées aux programmes de lectures. Il est sans doute essentiel de repenser le canon littéraire en y intégrant des récits de fictions et des témoignages de femmes, comme celui de Sonali Deraniyagala, dans Wave : A Memoir of Life After the Tsunami (2013), écrit après le terrible tsunami de 2004, qui a emporté son mari, ses deux fils et ses parents. Le témoignage de Sonali Deraniyagala mérite une attention particulière pour plusieurs raisons : le tsunami ayant causé une surmortalité féminine, les récits de survivantes demeurent « naturellement » rares, notamment ceux qui dépassent la simple narration de l’événement pour explorer la dimension du deuil. Ces récits mettent en lumière la douleur des femmes dont les avertissements n’ont pu prévenir la tragédie, le désespoir des mères impuissantes face à la noyade de leurs enfants, ainsi que la culpabilité éprouvée par les filles contraintes d’abandonner leurs parents âgés afin de sauver leur propre vie. Ainsi, Sonali Deraniyagala revient sur les premiers mois après la catastrophe, où « les voix hébétées des amis et de la famille flottaient autour » : « […] Ils parlaient de chiffres. Cent mille, un quart de million. […] Ces mots, tsunami, vague géante, n’avaient aucun sens42. »
Par la suite, elle n’hésite pas à souligner que c’était autant le tsunami lui-même qui la poussait à la dépression, l’alcoolisme et la tentative de suicide, que l’insuffisance des termes par lesquels nous nous sommes habitués à « parler de catastrophe43 » : les chiffres exacts des morts, des destructions et des appels à l’aide. Son témoignage, qu’elle met par écrit sur les conseils d’un psychiatre new-yorkais, raconte l’histoire de son retour à la vie – sans dissimuler les revers qu’elle continue d’affronter aujourd’hui – sous la forme d’une quête des mots justes pour exprimer l’agonie et l’apathie des lendemains de la catastrophe. Tout ce qui suit témoigne de l’effort qu’il faut faire pour s’opposer à l’état du mutisme auquel Sonali Deraniyagala se sent réduite à la suite de la catastrophe. D’abord sous la forme du flot incessant de pensées par lequel la narratrice raconte son histoire, puis avec les premiers mots forts par lesquels elle se fait entendre entre guillemets (« … ») comme figure agissante auprès de ses sauveurs, enfin au moyen du livre grâce auquel elle s’adresse en sa qualité d’auteure à un public beaucoup plus large que celui de sa famille, des amis et des thérapeutes avec lesquels elle partage son histoire au cours de l’intrigue qu’elle tisse dans Wave.
Dans ce contexte, il apparaît également essentiel de mener une réflexion autocritique sur les modalités par lesquelles les voix féminines sont mobilisées face à la catastrophe. C’est précisément cette interrogation que Gary Victor propose dans Collier de débris (2013), son premier essai post-sismique, qui suit les traces des survivantes du terrible tremblement de terre du 12 janvier 2010, dont les conséquences à long terme restent bien visibles en Haïti. Publié trois ans après la catastrophe, cet ouvrage se distingue par le recul temporel qu’il adopte, contrastant avec des textes contemporains du séisme tels que Failles de Yanick Lahens (2010), Tout bouge autour de moi de Dany Laferrière (2010), Le Tremblement de Lionel-Édouard Martin (2010) et Haïti, kenbe la ! de Rodney Saint-Éloi (2010), souvent évoqués de manière trop brève et superficielle aux côtés de Collier de débris. À la différence de ces témoignages, où les auteurs mettent en avant leurs propres vécus, Collier de débris ne se concentre pas sur l’expérience personnelle de l’écrivain, mais sur celle d’une femme issue des quartiers les plus pauvres de Port-au-Prince. Par ce biais, Gary Victor cherche à donner voix à sa lutte quotidienne pour survivre après le séisme, en se positionnant comme un médium de son témoignage. Dans la préface de son ouvrage, Gary Victor se souvient de la rencontre avec cette femme au cœur des décombres de Port-au-Prince, tout en reconnaissant sa propre présence dans le récit, où il joue le rôle d’intermédiaire, exerçant une influence décisive sur le témoignage qu’il retranscrit :
Quand un fonctionnaire du Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD) me demanda si j’étais intéressé à rédiger un texte relatant librement les activités d’enlèvement des débris à Port-au-Prince après le séisme du 12 janvier 2010, je n’avais pas cru que je serais capable d’écrire une ligne sur ce sujet. […] Mais ma volonté ne parvenait pas vraiment à refréner un besoin presque instinctif de me détourner du spectacle de la catastrophe pour m’enfermer dans des imaginaires où les douleurs pouvaient se dissoudre44.
En effet, les vingt photographies de débris, de femmes et d’hommes au travail, de la destruction des bidonvilles et de la reconstruction du quartier, intégrées au cœur du livre sous forme de chapitre à part entière, au même titre que les trente-cinq autres chapitres dans lesquels Gary Victor consigne son récit, ne servent pas seulement à authentifier ce dernier, mais rappellent également son caractère de reportage. Autrement dit, en introduisant la question du regard dans le texte, ces images soulignent la différence entre la voix et la perspective narrative, une distinction qui, depuis les Figures de Gérard Genette (1966-2002), fait partie des prémisses essentielles de la critique littéraire. Cette dernière postule que le narrateur, même s’il reste discret et invisible, est un « je » à part entière, qui, en observant les événements à travers les yeux d’un autre, nous en dit davantage sur lui-même, ses convictions et ses idées sur autrui, que sur ceux dont il raconte l’histoire. Comme le résume Gary Victor dans sa préface pour imposer une interprétation précise du glissement continu entre le « je » personnel et le « nous » collectif, qui caractérise le récit qui suit ses remarques préliminaires :
J’ai écrit le texte […] pour dialoguer avec les sans-voix, assister à la transmutation des débris, entendre battre le cœur des femmes et des hommes […] dans l’anonymat […]. Collier de débris m’a permis de renaître, de me dégager des miasmes émotionnels du séisme. L’espoir qui ne meurt jamais dans le cœur des oubliés a rallumé le mien45.
Le récit débute environ deux ans après la catastrophe qui a emporté le mari et le fils de la narratrice. Sa survie est entièrement marquée par les décombres dans lesquels elle s’installe avec sa fille. La poussière, pénétrant tous les orifices de son corps, colore de gris tant ses souvenirs que ses visions : « Il ne reste plus que des débris. […] Ces débris sont une plaie béante dans nos corps, dans nos âmes. […] Avec ces débris, notre horizon a le gris du désespoir46. » Le programme Cash-for-Work – mis en place par les Nations unies pour permettre à la population haïtienne de participer activement à la reconstruction de son pays – lui offre non seulement une alternative à la prostitution, qu’elle aurait autrement été contrainte de pratiquer pour subvenir aux besoins de sa fille et d’elle-même, mais lui permet aussi de s’attaquer aux débris de Port-au-Prince, les transformant en pierres symboliques, tant au sens littéral que figuré, pour un avenir meilleur :
D’ailleurs, les débris maintenant, nous les transformons. Surtout en adoquins. […] L’adoquin symbolise l’espace, la vie, l’espoir. L’adoquin met la beauté là où il n’y en avait pas. Une route adoquinée devient plus qu’une simple voie d’accès. C’est un terrain de jeu, un lieu de rencontre et de convivialité pour la population47.
De même que les décombres, sous les mains des travailleurs du Cash-for-Work, se transforment en quelque chose de tout nouveau, dans Collier de débris, les fragments du récit – constamment interrompus par des blancs qui divisent le texte en courts chapitres de quelques pages seulement – sont unis par une chronique qui, en mettant par écrit ces bribes, les aligne et les juxtapose de manière indissociable, afin que la mémoire de la lutte extraordinaire qu’elle témoigne ne soit pas oubliée. C’est une lutte contre la perte et pour un avenir, certes, mais aussi une lutte contre les rôles de genre figés et pour l’émancipation sociale des femmes rendue possible par le désordre général de la catastrophe. « Je me suis fait rapidement remarquer par ma disponibilité, par mon sérieux », la narratrice nous rapporte-t-elle :
J’étais une femme. Je savais que je devais faire mieux que les hommes, me faire respecter par ceux qui croyaient qu’une femme seule, avec un enfant à nourrir, était une proie facile, prête à tout accepter48.
Des hommes vont flamber l’argent des mètres cubes dans les boîtes avec le cocktail habituel femme-alcool-joint. Moi, je mets de l’argent de côté pour que ma fille puisse continuer d’aller à l’école, pour reprendre mes cours d’informatique que j’avais dû arrêter après le séisme. Je connais plusieurs femmes qui ont commencé un petit commerce avec l’argent qu’elles gagnent dans l’enlèvement des débris. Je veux aussi me construire une petite demeure dès qu’on aura nettoyé mon quartier49.
Intégrés dans le regard autoréflexif et autocritique que Collier de débris jette sur les conditions de sa création, ces passages ne soulignent pas – ou du moins pas en premier lieu – la force, la résilience et le sens des responsabilités dont les femmes, dans le contexte des catastrophes, sont supposées faire preuve. Ils remettent plutôt en cause les idées des « femmes » et des « hommes » sur lesquelles se fonde l’ordre des sexes décrit – tout en tenant compte du fait qu’eux-mêmes, en les reprenant, reproduisent les notions de genre auxquelles ils nous renvoient. Collier de débris est donc aussi un appel à ceux qui s’engagent dans le noble objectif de renforcer les voix des femmes en état d’urgence à remettre en question, outre leurs propres prémisses et intentions, les discours dont leurs propos se nourrissent : non pas pour saper ces derniers, mais pour renforcer leur force de frappe critique.
Comme l’affirme l’anthropologue français Philippe Descola, « nul besoin d’être grand clerc pour prédire que la question du rapport des humains à la nature sera très probablement la plus cruciale du présent siècle50 » : il suffit, selon lui, de regarder autour de soi pour s’en convaincre. Les bouleversements climatiques, l’érosion de la biodiversité, la prolifération des organismes transgéniques, l’épuisement des énergies fossiles, la pollution des milieux fragiles et des mégapoles, ainsi que la disparition accélérée des forêts tropicales, sont désormais des sujets de débat mondial et alimentent quotidiennement les préoccupations de nombreux habitants de la planète. Dans ce contexte, il est possible d’imaginer bien plus que les cinq raisons évoquées par les Nations unies à l’occasion de la Journée internationale de la femme 2023 pour expliquer pourquoi la protection de notre survie passe par l’implication des femmes : (1) l’action en faveur du climat requiert l’engagement de 100 % de la population, (2) la responsabilisation des femmes conduit à de meilleures solutions climatiques, (3) les femmes sont essentielles pour renforcer la résilience climatique des communautés, (4) le changement climatique nous affecte tous, mais de manière inégale, (5) les pays reconnaissent l’importance de l’égalité des genres dans la planification climatique51. À cette occasion, la littérature joue un double rôle : d’une part, elle agit comme un sismographe, enregistrant les vécus féminins face aux sécheresses, tsunamis et tremblements de terre ; d’autre part, elle constitue un terrain de laboratoire pour envisager d’autres scénarios de catastrophe, explorant ainsi des pistes pour comprendre et repenser les défis globaux auxquels l’humanité est confrontée.
